Dermatologie

Hémangiome infantile, la révolution du propanolol

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Publié le 26/09/2014
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Découverte par hasard, l’efficacité du propanolol sur les hémangiomes infantiles a ouvert de nouvelles perspectives thérapeutiques pour les formes graves.

Si la plupart des hémangiomes infantiles (HI) de l’enfant restent des tumeurs bénignes spontanément régressives, dans 20 % des cas environ, l’hémangiome peut être potentiellement grave du fait de sa topographie ou à cause de sa taille. Avec à la clé, un risque de complication fonctionnelle voire vitale et/ou de séquelles esthétiques. Pour ces formes à risque, les possibilités thérapeutiques sont longtemps restées limitées à la corticothérapie par voie générale à fortes doses, avec une efficacité variable et un risque d’effets secondaires non négligeable chez un nourrisson en pleine croissance. D’autres options thérapeutiques étaient envisageables hors AMM (interféron, vincristine) mais, là encore, avec une efficacité variable et des effets secondaires potentiels potentiellement graves.

Depuis peu, les bêta-bloquants peuvent être utilisés de façon officielle dans cette indication, la solution pédiatrique de propanolol développée par les laboratoires Pierre Fabre (Hemangiol®) ayant obtenu cet été le feu vert européen et l’aval de la HAS.Pour le Pr Christine Bodemer (hôpital Necker-Enfants malades, Paris) « l’utilisation du propanolol dans ces indications d’hémangiomes infantiles compliqués, est une véritable révolution dans l’univers de la dermatologie pédiatrique ». Le choix de ce médicament s’est imposé naturellement alors que les effets spectaculaires du propanolol ont été découverts par hasard devant l’observation d’un enfant atteint d’un très volumineux hémangiome infantile, mis sous cortisone (pour l’hémangiome) puis bêtabloquant (du fait du développement secondaire d’une myocardiopathie hypertrophique).

La confirmation de cette efficacité s’est faite par l’observation d’autres patients avec un hémangiome compliqué et les résultats positifs du propanolol dans cette indication ont été rapportés par de nombreuses équipes impliquées dans la prise en charge d’HI, avec près de 300 publications internationales confirmant ces résultats. Fin 2013, un essai randomisé testant l’efficacité et la tolérance d’Hemangiol® auprès de 460 nourrissons a confirmé ces bons résultats.

À la suite de cette étude, Hemangiol a obtenu une AMM européenne « dans le traitement des HI prolifératifs requérant un traitement systémique : HI avec retentissement fonctionnel ou vital, HI ulcéré douloureux et/ou répondant mal aux soins locaux, mais aussi HI présentant un risque de risque de cicatrices permanentes ou de défiguration ».

D’autres bêtabloquants sont à l’essai avec des résultats variables et font régulièrement l’objet de présentations aux congrès internationaux.

Repérer les hémangiomes de façon précoce

Dans ce contexte d’évolution thérapeutique, il devient donc nécessaire de repérer de façon précoce les hémangiomes infantiles du nourrisson et de les adresser rapidement pour avis spécialisé au moindre doute de complication potentielle voire de façon systématique. « Il apparaît clairement que le traitement est d’autant plus efficace qu’il a été prescrit très tôt », souligne le Pr Bodemer.

Cependant, «quel que soit le souhait de tout parent de voir  s’effacer  une lésion visible chez son enfant le plus rapidement possible, il ne s’agit pas de traiter tous les hémangiomes infantiles du nourrisson par bêtabloquant », met en garde le Pr Bodemer. Ce d’autant que « des effets secondaires sont toujours possibles : agitation la nuit avec cauchemars, risque d’hypoglycémie (peu fréquente) et mise en évidence d’une tendance à l’asthme ».

Hemangiol est d’ailleurs contre-indiqué chez les prématurés n’ayant pas atteint l’âge corrigé de 5 semaines, en cas d’hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients, d’asthme ou antécédent de bronchospasme, de bradycardie, de blocs auriculo-ventriculaires des 2e et 3e degrés, d’insuffisance cardiaque non contrôlée par un traitement, d’hypotension artérielle ou de phéochromocytome.

D’après la communication du Pr Christine Bodemer à l’occasion des Journées Dermatologiques de Paris.
Bénédicte Gatin

Source : Le Généraliste: 2692