LE QUOTIDIEN : Le plan 2017-2021 pour la greffe de cellules souches hématopoïétiques a pour objectif de parvenir à 310 000 donneurs volontaires de moelle osseuse inscrits sur le registre France Greffe de Moelle avant fin 2021. Cet objectif est-il en passe d'être atteint ?
Dr ÉVELYNE MARRY : Entre 2017 et 2018, nous avons enrichi le registre de 18 303 nouveaux donneurs. Le nombre d'inscrits est ainsi passé de 278 125 donneurs au 31 décembre 2017 à 290 342 un an plus tard, la différence nette tenant compte des sorties. Cette tendance est positive. Si elle se poursuit, nous devrions atteindre, voire dépasser l'objectif des 310 000 inscrits !
Les besoins sont-ils couverts ?
La probabilité moyenne d'avoir un système HLA compatible entre deux individus en dehors de la famille est d’une chance sur un million. Le don de moelle osseuse est donc basé sur la solidarité internationale à travers un réseau de 73 registres internationaux, qui regroupent près de 34 millions de donneurs. Malgré tout, 35 % des patients ne trouvent pas de donneur compatible. C'est notamment le cas des populations métissées qui présentent des spécificités génétiques. Il est donc essentiel d'augmenter le nombre de donneurs et de diversifier les profils.
Lorsque plusieurs donneurs sont compatibles, sur quels critères se porte le choix du greffon ?
Tout d'abord, nous cherchons de potentiels donneurs dans la fratrie. Ensuite, nous recherchons dans le registre un donneur avec un système HLA compatible. S'il y a plusieurs donneurs potentiels, nos critères concernant les donneurs sont par ordre de priorité : sexe masculin, moins de 30 ans et statut vis-à-vis du cytomégalovirus identique. En effet, si le donneur est positif pour ce virus, celui-ci peut se réactiver chez un receveur négatif. Or, le malade est alors très vulnérable sur le plan immunologique. Néanmoins, 80 % des individus sont porteurs de ce virus, et une prévention antivirale est mise en place en cas de différence de statut. Nous privilégions par ailleurs les donneurs nationaux en respectant les mêmes critères de choix.
Pourquoi privilégier les hommes ?
À chaque grossesse, les femmes développent des anticorps qui se retrouvent dans le greffon et compliquent la gestion de la greffe. C'est pourquoi nous privilégions les donneurs masculins.
Pourtant, les femmes sont beaucoup plus mobilisées que les hommes : elles représentent 65 % du registre français. Le même phénomène est observé dans les autres registres. Il faudrait que les hommes s'emparent également de ce don et qu'ils prennent conscience que le prélèvement est complètement sécurisé, qu'il n'est pas douloureux et surtout, qu'il permet de sauver une vie.
Quelle est la différence entre les deux techniques de prélèvement ?
Dans 20 à 25 % des cas, le prélèvement des cellules de la moelle osseuse se fait par ponction au niveau de l'os postérieur du bassin sous anesthésie générale. Cette technique permet de recueillir les cellules souches hématopoïétiques et leur environnement. Elle est privilégiée pour les enfants ou les patients souffrant d'aplasie médullaire notamment.
Dans 75 à 80 % des cas cependant, le prélèvement se fait par aphérèse en ambulatoire. Cette technique permet de récupérer les cellules souches périphériques sont récupérées après les avoir fait sortir des os vers le sang grâce à un médicament. Elle est indiquée pour bénéficier à des receveurs adultes atteints notamment de leucémie ou de lymphome.
Existe-t-il des alternatives lorsqu'aucun donneur n'est compatible ?
Les greffes de sang de cordon ont eu le vent en poupe dans les années 2010-2015. Si ces greffons présentent l'intérêt d'être bien tolérés, ils sont peu riches en cellules souches et conviennent surtout à des enfants ou à des adultes de moins de 40 kg. Plus récemment, un nouveau type de greffe s'est développé : la greffe haplo-identique. Le donneur est alors un membre de la famille qui partage la moitié des caractéristiques HLA du patient. Ces greffes sont possibles avec la mise en place d'un protocole thérapeutique particulier juste après la greffe.
Les médecins généralistes ont-ils un rôle à jouer ?
Nous travaillons à l'élaboration de modules d'e-learning qui seront disponibles d'ici l'année prochaine, pour les informer des spécificités du don de moelle osseuse afin qu'ils soient en mesure à leur tour de sensibiliser leur patientèle et de répondre à leurs interrogations sur ce don trop largement méconnu.
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