L'année 2023 a vu, pour la première fois, un patient atteint de maladie de Parkinson récupérer une marche fluide, à l'aide d'une neuroprothèse. Ce dispositif d'électrostimulation greffé dans la moelle épinière a été mis au point par une collaboration de chercheurs Inserm et CNRS de l’université de Bordeaux avec l'équipe suisse de Grégoire Courtine et la neurochirurgienne Jocelyne Bloch.
Le concept avait déjà beaucoup fait parler de lui en 2022 en permettant à des patients paraplégiques médullolésés de remarcher. Début 2023, un dispositif amélioré avec une interface cerveau-machine, proche de celui utilisé pour la maladie de Parkinson, avait permis à un premier patient médullolésé de marcher de manière autonome, grâce à un émetteur fixé dans le cerveau.
L’application à la maladie de Parkinson doit beaucoup à Erwan Bézard, directeur de recherche Inserm à l'Institut des maladies neurodégénératives (CNRS/université de Bordeaux). C'est sa rencontre avec Grégoire Courtine, le « père » du dispositif à l’école polytechnique de Lausanne qui a ouvert la voie à cette nouvelle indication.
Diminution des chutes
« Il est plus facile d'utiliser ce dispositif chez un patient parkinsonien, explique Erwan Bézard. Contrairement à un médullolésé, il marche déjà et n'a pas un énorme besoin de se remuscler. À peine la prothèse installée, la démarche s'améliore et le risque de chute diminue. »
Dans leur étude (1), les auteurs décrivent les premières étapes d'évaluation chez le primate non humain et les résultats de l'implantation chez Marc, le premier patient sélectionné. Ce dernier, aujourd'hui âgé de 62 ans, est « un patient typique », commente Erwan Bézard : diagnostiqué à 36 ans et appareillé pour la stimulation profonde en 2006. Après 30 ans d'évolution de la maladie, il ne parvenait à marcher qu'avec de grandes difficultés.
Au bout d'un an, le nombre de chutes est passé de deux à cinq par jour à une ou deux chutes par semaine. Quant au « freezing », cette incapacité à décoller les pieds du sol, elle a complètement disparu. Des analyses de cinématique démontrent une amélioration sensible de la démarche. « On peut aussi imaginer des impacts sur le long terme en termes de qualité de vie du patient et de l’entourage », estime le chercheur.
Une nouvelle étape dans la prise en charge à un stade avancé
Pour Erwan Bézard, ce nouveau dispositif pourrait constituer à l'avenir la troisième étape de la prise en charge dans la maladie de Parkinson à un stade avancé, après la lévodopa (dans les premiers stades de la pathologie) puis la stimulation cérébrale profonde. « Les troubles de la marche interviennent en moyenne après huit ans d'évolution, explique le chercheur. Ce n'est pas un traitement qui se substitue aux deux autres, mais qui s'ajoute. Chez l'animal, on voit bien qu'il y a un intérêt à maintenir la stimulation cérébrale profonde en plus des électrodes de stimulation de la moelle épinière. »
L'équipe suisse va poursuivre l'expérience sur un groupe de six malades atteints de Parkinson. Il reste à savoir si une telle innovation, au coût probablement très élevé, pourra bénéficier au plus grand nombre, alors que les deux scientifiques ont lancé une start-up - Onward - pour travailler à sa commercialisation.
Le cas de Marc constitue un « tour de force » qui démontre la « faisabilité » d'une telle approche, selon d'autres neurologues dans un commentaire publié dans le même numéro de Nature Medicine.
(1) T. Milekovic et al, Nat Med, nov 2023. doi.org/10.1038/s41591-023-02584-1
Cancer colorectal chez les plus de 70 ans : quels bénéfices à une prise en charge gériatrique en périopératoire ?
Un traitement court de 6 ou 9 mois efficace contre la tuberculose multirésistante
Regret post-vasectomie : la vasovasostomie, une alternative à l’AMP
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce