Point d'étape ou plafond de verre ?
Avec un taux de 56,8 % en octobre 2017 et une progression constante de 2 points par an, la chirurgie ambulatoire continue sa percée dans le paysage sanitaire français. L'ambition d’Agnès Buzyn est de porter ce pourcentage à 70 % en 2022. Réaliste ?
Le contexte politique y est propice. Le développement de l'ambulatoire est l'une des « priorités » de la stratégie nationale de santé du gouvernement. En ouverture des dernières Journées nationales de chirurgie ambulatoire (JAB), la directrice générale de l’offre de soins Cécile Courrèges l’a confirmé : « la chirurgie ambulatoire est l'une des dynamiques de transformation de notre système de santé les plus significatives ».
Dans un secteur sous forte pression budgétaire, l'argument économique estimé par la CNAM à 200 millions d'euros pour 2018, est évidente. À terme, la Cour des comptes attend 645 millions d'euros par an du virage ambulatoire (qui va au-delà de la chirurgie).
135 GHT, 135 centres
Si cette pratique bénéficie d’un bel élan, les « Sages » de la rue Cambon déplorent dans leur dernier rapport sur la Sécu le « retard persistant » de la chirurgie ambulatoire en France, marqué par une « conversion lente et inégale » des pratiques. L’avance des cliniques, leader historique, s’est également « effritée sous l’effet de la très forte augmentation des capacités du secteur public ».
Quels leviers actionner pour aller plus loin ? Les professionnels misent sur l'approche structurelle. Pour le Pr Corinne Vons (lire page 3), présidente de l'Association française de chirurgie ambulatoire (AFCA), qui dit 135 groupements hospitaliers de territoire (GHT) dit 135 centres ambulatoires autonomes ! Aujourd'hui, on compte ces structures sur les doigts d'une main : Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loir, voir ci-dessous), Angers, Avignon, Domont (Val-d'Oise).
L'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) dont le taux de chirurgie ambulatoire atteint 37 % fin 2017, s'est emparé du concept. Une « plateforme de chirurgie ambulatoire multidisciplinaire » de 2 000 m2 doit ouvrir au printemps dans un nouveau bâtiment à la Pitié-Salpêtrière. L'AP-HP a vu juste. Selon le Dr Gilles Bontemps (CNAM), le « potentiel de développement de la chirurgie ambulatoire est dans les 30 CHU ». La moitié d'entre eux possède une marge de progression de 2 000 à 5 000 actes par an.
Au total, la CNAM estime qu'il faudrait « basculer » plus d’un million d’actes en ambulatoire et augmenter la progression de 2 à 3 points par an pour parvenir au taux ministériel de 70 %... La caisse a repéré une marge de progression sur la chirurgie des hernies inguinales et sur la cholécystectomie et des disparités sur la chirurgie du cristallin.
La Sécu lancera dans les prochains mois un nouvel outil de datavisualisation qui doit permettre aux établissements de calculer leur potentiel de développement par spécialité. La CNAM travaille également avec les chirurgiens et les anesthésistes-réanimateurs à l'élaboration de nouveaux chemins cliniques. Délivré en 2018, le premier d'entre eux portera sur la hernie inguinale.