Accès aux soins

Face aux déserts, François Braun prêt à tout pour transformer l'essai

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Publié le 07/10/2022
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En inaugurant le CNR santé dans la Sarthe lundi, François Braun a livré son premier véritable discours programmatique. Les premiers jalons seront posés, dès cet automne, avec les négociations de la nouvelle convention médicale et le budget de la Sécu contre lequel les internes ont déjà commencé à sonner la charge.

Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

« Percuter la ligne » de l'accès à la santé. Avec ce clin d'œil au rugby - sa passion -, le ministre de la Santé François Braun a lancé lundi, au Mans (Sarthe), le volet santé du Conseil national de la refondation (CNR) voulu par le président de la République. Si les débouchés de cette grande « concertation des parties prenantes » restent encore confus – d'autant qu'ils se mêlent aux débats du budget de la Sécu et aux négociations de la convention médicale – la journée a été l'occasion pour le ministre de présenter, pour la première fois depuis sa nomination, les grandes lignes de sa politique de santé.

« Le seul et unique but que je poursuivrai est de promouvoir l’accès universel à notre système de santé, d’en refonder les bases et d’en assurer la transition vers un système durable », a cadré François Braun. En clair, améliorer l'accès à la santé et aux soins des Français car « la situation actuelle » – espérance de vie prédéterminée par le travail, six millions de Français sans médecin traitant, 80 % de cancers évitables – n'est « pas acceptable », a estimé l'ex-urgentiste. La Sarthe n'a pas été choisie par hasard : le département, qui compte 59 médecins généralistes libéraux pour 100 000 habitants contre 85 en moyenne au niveau national, symbolise la désertification médicale.

Intransigeance

À l'heure où il faut « des solutions » et non plus « un diagnostic », le ministre fait donc appel à l'« intelligence des territoires ». Dès la semaine prochaine et jusqu’à la fin de l’année, à l'image du Mans, des concertations locales devront se tenir en lien avec les ARS et les élus. Si l'exécutif laisse la main au terrain sur l'organisation, des réponses aux défis urgents de l'accès à un médecin traitant (ou à une équipe traitante), des soins non programmés, de l'attractivité des métiers de santé et de la prévention sont attendues. « Je serai intransigeant », a même prévenu François Braun, qui veut que « chaque Français trouve s’il le souhaite » un médecin traitant d'ici la fin du quinquennat.

Pour autant, le ministère a déjà quelques pistes. Pour « libérer du temps médical » et prendre en charge davantage de patients, le nombre d'assistants médicaux doit passer à 10 000 à horizon 2025, alors qu'un peu plus de 3 000 contrats ont été signés jusqu'à présent. Le développement des exercices coordonnés en maisons de santé ou au sein des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) doit permettre « d'attirer et de fixer » les médecins. Tout le territoire devra d'ailleurs être couvert par ces mêmes CPTS d’ici à la fin 2023, a déclaré le ministre.

Le développement des consultations avancées dans les territoires fragiles, les téléconsultations, l'aide des collectivités territoriales pour les locaux et l'immobilier sont d'autres « leviers » cités. Pour répondre aux soins non programmés « à toute heure de la journée », le service d'accès aux soins (SAS) est appelé à être généralisé dès 2023, dans une logique de « responsabilité territoriale le jour, la nuit et le week-end ». Ces solutions relèvent pour certaines des négociations conventionnelles entre la Cnam et les médecins, qui doivent s'ouvrir d'ici un mois. Le ministre s'est donc dit « prêt à donner les moyens d’investir dans cette convention » dans une logique de « droits et devoirs ».

Pour aider les médecins à s'installer, François Braun – qui exclut toute coercition formelle – a confirmé la mise en place de la quatrième année du DES de médecine générale, quitte à se mettre à dos les carabins. Cette « année de transition », prévue dans le prochain projet de loi financement de la Sécurité sociale (PLFSS) et dont les modalités seront définies par une mission ad hoc, a déclenché la colère des représentants d'internes (lire ci-contre). Enfin, une simplification des contrats d'aides et un guichet unique sont prévus, toujours pour faciliter les installations.

Fin de l'intérim cannibale

Également au menu de la feuille de route de Ségur, le partage de compétences entre professionnels de santé. Les différents Ordres sont à la manœuvre sur ce dossier, mais ils devront proposer des « bougés » très concrets. « À défaut, nous prendrons nos responsabilités, car c’est ce que nos concitoyens attendent », a mis en garde François Braun. Le ministère veut aussi agir sur l'attractivité des métiers, et met en avant « un choc quantitatif et qualitatif ». Dans ce cadre, il souhaite par exemple « ouvrir plus largement » les compétences et augmenter le nombre d'infirmiers en pratique avancée (IPA).

À l'hôpital, il faut réinvestir l'échelon des services, dans la lignée du rapport Claris, ou encore engager un chantier de simplification, a indiqué l'ancien chef des urgences de Metz-Thionville. Le ministre a également sonné la fin de l'intérim médical « cannibale» à l'hôpital. « À partir du printemps prochain, il ne sera plus possible de payer démesurément un intérimaire, a assuré François Braun, ni de démarrer son exercice professionnel par de l'intérim. »

Enfin, le ministre de la Santé a répété sa volonté de mettre les bouchées doubles sur la prévention, qui fait maintenant clairement partie de ses prérogatives. Mais à part les mesures du PLFSS (consultations aux âges clés de la vie, gratuité de la contraception d'urgence, dépistage gratuit et sans ordonnance des IST), François Braun n'est pas allé plus loin que le voeu pieu d'une « nouvelle alliance » entre tous les acteurs de santé.

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin