SÉROPOSITIVE depuis 1987, Catherine Kapusta-Palmer, militante de longue date à Act-Up Paris, membre du Conseil national du sida et du Planning familial, témoigne sur le site développé par Tibotec Pharmaceuticals, destiné aux patients atteints par le VIH/SIDA (www.tibotec-vih.fr). « J’ai été contaminée par l’homme avec qui je vivais à cette époque, une contamination accidentelle. On savait tous les deux qu’il était séropo et on prenait nos précautions. C’est la vie », commente-t-elle. Lui était déjà très malade. Pendant une longue période, sa séropositivité à elle est restée au second plan. Il y a vingt ans, « l’épidémie était identifiée comme surtout homosexuelle et toxicomane. Les femmes étaient très peu présentes, très peu informées, très peu visibles. » Elle se bat aujourd’hui pour que les spécificités des femmes soient prises en compte. « Le corps d’un homme et le corps d’une femme, ce n’est pas la même chose. Les effets du virus ou ceux du traitement, ce n’est pas la même chose. »
Craignant que la grossesse et les variations hormonales ne provoquent des variations dans les résultats, les investigateurs n’ont inclus les femmes dans les essais cliniques qu’en 1993. Mais l’épidémie s’est progressivement féminisée et les femmes ne sont plus sous-représentées dans les protocoles de recherche. En France, 32% des personnes vivant avec le VIH sont des femmes, dont 27 % sont d’origine subsaharienne.
Apprendre à vivre avec le virus.
L’arrivée des trithérapies a bouleversé le quotidien des femmes comme des autres groupes touchés par le virus. Le nombre de décès a considérablement reculé et l’espérance de vie s’est allongée – 5,4% des femmes et 8% des hommes suivis ont plus de 60 ans. « L’infection à VIH est ainsi devenue une maladie chronique, avec laquelle les personnes atteintes doivent (ré)apprendre à vivre, à défaut d’en guérir », soulignent Patrick Peretti-Watel et Bruno Spire dans leur ouvrage publié sous l’égide de l’ANRS (Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites)* .
Des traitements efficaces qui ont permis des progrès spectaculaires dans le domaine de la prévention de la transmission de la mère à l’enfant (de 15-20 % à 1-2 %) mais qui exigent une adhésion très forte des patients. Il a été démontré qu’une observance inférieure à 95% augmentait fortement le risque d’échappement virologique et que le risque d’échec thérapeutique croissait à mesure que l’observance diminuait. Une telle observance correspond, pour un traitement en deux prises par jour, à moins d’une erreur par semaine (oubli de prise, non-respect des contraintes alimentaires, décalage de plusieurs heures). Dans les maladies au long cours, l’observance habituellement constatée est d’environ 50 %. Le niveau d’exigence élevé dans le cas du VIH se heurte aux contraintes du traitement, à ses effets secondaires (la lipodystrophie qui masculinise est, notamment, très mal vécue par les femmes), à l’organisation du système de soins (compatibilité des horaires de consultation et de délivrance des médicaments avec le mode de vie du patient) et au vécu des personnes traitées. . Vivre avec le VIH en France impose encore des réajustements « en termes d’emploi, de ressources, de vie affective et sexuelle et de projets parentaux », notent Patrick Peretti-Watel et Bruno Spire.
Aujourd’hui, il est largement admis que le suivi médical d’un patient recevant un traitement antirétroviral ne peut se limiter au contrôle régulier des critères immunovirologiques d’efficacité et à la surveillance des effets indésirables liés au traitement. L’éducation thérapeutique revêt un intérêt essentiel pour l’observance, la prévention de la transmission du virus et des complications (néoplasiques, métaboliques et cardio-vasculaires) et la qualité de vie des patients.
Précarité et vulnérabilité.
L’ouvrage de Patrick Peretti-Watel et Bruno Spire donne un tableau complet et actualisé de la situation et des besoins des personnes séropositives à partir des données de l’enquête nationale ANRS-VESPA, au cours de laquelle 3 000 personnes ont été interrogées. La prévalence d’une faible adhésion au traitement est de 45 % chez les femmes contre 41 % chez les hommes, qu’ils soient homo- ou hétérosexuels. La prévalence des conduites sexuelles à risque atteint respectivement 24, 14 et 16 %. Par ailleurs, 20 % des femmes qui suivent bien leur traitement ont eu des conduites sexuelles à risque au cours des douze derniers mois, contre 29 % de celles qui adhérent peu. La faible adhésion est chez la femme corrélée aux comportements à risque. L’abus d’alcool, la précarité matérielle, les effets secondaires perçus des traitements et la discrimination au sein de la famille favorisent une faible adhésion et témoignent de situations de précarité et de vulnérabilité tant sur le plan matériel que relationnel et psychologique. Les conduites à risque sont chez les femmes consécutives à leur incapacité à négocier l’usage du préservatif avec un partenaire stable.
* « Sida, une maladie chronique passée au crible, Enquête nationale sur le quotidien des personnes infectées », Presses de l’Ecole des hautes études en santé publique, novembre 2008, 223 pages, 23 euros.
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