Un « bus du cœur » accueille, dans cinq grandes villes en octobre et en novembre, les femmes en situation de précarité afin de les « remettre dans un parcours de soins cardio-gynécologiques », à l'initiative du Fonds de dotation Agir pour le cœur des femmes.
Du 29 septembre au 1er octobre, il était garé près du centre-ville de Lille et il a reçu 225 femmes. « Le dépistage dure 45 minutes mais les femmes sont prises en charge pendant une heure à une heure et demie », explique le Pr Claire Mounier-Véhier, co-fondatrice de ce fonds et ex-présidente de la Fédération française de cardiologie.
Dans le bus, les professionnels de santé mesurent la tension artérielle, le poids et la taille, mais aussi réalisent un repérage des addictions et un bilan lipidique complet. Un gynécologue ou une sage-femme les rencontre pour repérer les personnes à risque et leur proposer un entretien médical, dont une synthèse est transmise par courrier au médecin traitant. « Elles sortent toutes avec un cahier de dépistage cardiovasculaire et gynécologique que j'ai écrit et qui a été validé par les acteurs des différentes villes », indique la cardiologue. Elles peuvent aussi repartir avec un appareil d'auto-mesure tensionnelle après avoir appris à l'utiliser et un panier-repas équilibré conçu par des diététiciennes.
La précarité et le risque cardiovasculaire
À Lille, « plus de la moitié des femmes reçues n'avaient plus de suivi gynécologique, la moitié n'avait pas vu de cardiologue de leur vie et la quasi totalité n'avait plus de suivi médical », souligne la cardiologue. Deux femmes ont même dû être hospitalisées en urgence pour des raisons cardiologiques lors de leur séance de dépistage…
Les femmes accueillies, âgées de 30 à plus de 70 ans, qui fréquentent en majorité les centres sociaux et les services des mairies de quartier, avaient été ainsi invitées à participer. La ville de Lille a aussi largement diffusé l'information dans l'espace public et via les réseaux sociaux, ainsi que dans les médias locaux. Quant à la CPAM, elle avait mené deux campagnes d'invitations par mail auprès de femmes ciblées en fonction de leurs ressources.
Avant ou après leur passage dans le bus, les femmes ont pu glaner des informations parmi des stands sur l'alimentation, la gestion du stress, les cardiopathies et la grossesse, la pneumologie et la bronchopneumopathie chronique obstructive, l'activité physique, etc. Le Samu et la Croix rouge les ont initiées aux gestes qui sauvent et la CPAM proposait la mise à jour des droits sociaux. Le mercredi, une garderie a été organisée pour permettre aux mamans de participer.
Selon Claire Mounier-Véhier, il y a urgence : « les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité chez ces femmes » qui vivent dans des conditions précaires. « La précarité est un accélérateur de l'exposition aux facteurs de risque cardiovasculaire », rappelle-t-elle. Ces femmes sont sous-dépistées, sous-traitées, insuffisamment suivies et à très haut risque de récidive et de mortalité après un premier accident cardiaque. Et les confinements ont accentué cette inégalité.
Professionnels de santé bénévoles
Cette toute première opération a mobilisé à Lille 89 bénévoles, dont la moitié de professionnels de santé, médecins, sages-femmes, infirmières et pharmaciens, qui se sont relayés tout au long des trois jours. Les médecins qui voudraient s'associer aux suivantes*, à Avignon, La Rochelle ou Saint-Étienne, peuvent se rapprocher du fonds (busducoeur@agirpourlecoeurdesfemmes.com).
Comme pour les autres étapes, l'opération lilloise a été soigneusement préparée par les initiateurs du projet, Agir pour le cœur des femmes, les communes qui accueillent le bus et tous les autres acteurs locaux de la prévention. Le projet est financé en majeure partie par des partenaires privés (entreprises, assurances, groupes de cliniques, etc.). « Il n'y a pas d'argent en France clairement dédié à la prévention », regrette Claire Mounier-Véhier.
Elle espère en tout cas que les opérations organisées cet automne dans ces cinq villes permettront à 1 000 femmes de bénéficier de ce repérage. Agir pour le cœur des femmes prépare déjà les éditions suivantes, dans 20 villes en 2022 et 20 villes supplémentaires chaque année.
*Le bus du cœur était du 5 au 7 octobre à Marseille et sera du 13 au 15 à Avignon, du 27 au 29 à La Rochelle et du 3 au 5 novembre à Saint-Étienne.
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