Vitrolles (13)
Dr Bruno de Montvallon
Un petit mot d’un médecin exaspéré par l’incurie des structures dirigeantes dans le domaine de la santé en France, ainsi que par le silence de bon nombre d’organismes de formation et d’information.
Le Dr Frachon a révélé le scandale du Mediator, ce qui a entraîné un battage médiatique phénoménal ainsi que la refonte du système AFSSAPS.
Un scandale bien plus important à mon sens concerne les médicaments dits génériques.
Tous les textes officiels utilisent le terme « générique » et non « DCI ».
Or le droit de substitution accordé aux pharmaciens concerne dans la majorité des cas la substitution par des DCI et non des génériques. Pour mémoire, un générique est une copie conforme du produit princeps avec un véritable nom de médicament (ex. Flanid pour Surgam, Panos pour Myolastan, Antarene pour Nureflex…), une galénique respectée, et l’affichage de ce produit dans le Vidal dans lequel tout médecin peut vérifier sa composition.
Par contre, un DCI ne mentionne que le nom de la molécule principale et est agréé de principe sans étude des excipients ni de la galénique ni même évaluation de son efficacité et de ses éventuels effets secondaires.
Au tout début, j’étais naïf, je tirais les oreilles des diabétiques dont l’HbA1C variait de façon inconsidérée, jusqu’au jour où, leur demandant de me ramener leurs ordonnances, je constatais que TOUS les patients déséquilibrés avaient pris de la Metformine et non du Glucophage. Idem pour l’HTA, l’hyperuricémie…
Tout le monde doit avoir gardé en mémoire le cri d’alarme des cardiologues à la sortie des DCI du Plavix (le DCI Winthrop, même labo que le produit princeps, a eu la confirmation de son efficacité, d’autres DCI sont pourtant toujours sur le marché…).
En bref, les DCI ne sont pas plus contrôlés que les médicaments en vente sur Internet dont il faut, paraît-il, se méfier.
Plusieurs de mes patients ont fait des allergies avec certains DCI, alors que le produit princeps ne leur avait jamais posé de problème (excipients ?).
Auparavant, je prescrivais en « génériques » quand ils existaient, en interdisant sur mes ordonnances la substitution par des « DCI », mon premier devoir étant de soigner mes patients, pas de leur faire prendre un risque inconsidéré.
Cette façon de procéder énervait bon nombre de pharmaciens mais était parfaitement légale dans la mesure où le mot « DCI » n’est mentionné dans aucun texte officiel réglementant l’usage des médicaments.
Le comble de l’hypocrisie, dans le cadre du CAPI, est la demande de prescrire dans le panel des médicaments génériqués, sans aucune obligation de prescrire nommément le principe actif.
Depuis l’accord CPCAM-pharmaciens, j’ai rajouté en haut de mes ordonnances la mention « En cas d’effet secondaire lors de la substitution par un DCI NON IDENTIQUE, la responsabilité du pharmacien sera engagée ».
J’ai eu depuis l’appel téléphonique de 3 pharmaciens qui m’ont dit que près de 15 % des produits princeps sur le marché n’ont PAS de copie identique (différence d’excipients, de galénique ou de pelliculage) et qu’ils refusaient donc d’assumer la responsabilité de la délivrance de ces copies. En bref, au vu de la mention sur mes ordonnances, ils refusent la délivrance de DCI et refusent donc le tiers payant à certains patients puisqu’ils leur imposent les princeps.
Dans l’attente de la réaction d’autres pharmaciens, est-ce légal ?
Il faut donc que nous assumions, nous médecins, la responsabilité de la substitution de nos ordonnances en DCI alors que nous ne pouvons en aucun cas contrôler la composition de ces « copies » et que des pharmaciens reconnaissent la non-conformité de beaucoup de ces DCI. Sur quels critères l’AFSSAPS (aujourd’hui l’ANSES ndlr) a-t-elle autorisé la commercialisation de ces produits ?
Faudra-t-il un autre scandale type Mediator pour que la direction de l’AFSSAPS s’intéresse à la fiabilité de ces substitutions ?
Je vous demande donc, en tant que journalistes, de faire une enquête à ce propos pour estimer le danger réel de ces substitutions, voire de demander une réponse étayée aux autorités de tutelle.
L’argument du moindre coût de ces produits n’est pas toujours vérifié, beaucoup de laboratoires fabricant les produits en passe d’être génériqués baissent d’eux-mêmes leurs prix, à un niveau souvent moindre que les DCI.
Peste et choléra (de Patrick Deville)
Moissac (82)
Dr Yves Pirame*
Le battage médiatique autour du livre de Patrick Deville ces dernières semaines ne faiblit pas, et l’acheminerait en tête des favoris du Goncourt !
Sous prétexte d’écrire un roman, l’auteur révèle à ceux qui n’en ont jamais entendu parler - ils sont la majorité - une image singulièrement réductrice, et même fallacieuse, d’une des gloires du service de santé des Troupes coloniales.
Il se donne un mal de chien pour parler d’Alexandre Yersin en taisant ce qui, au-delà du pastorien, en a fait un personnage historique. Pourquoi ?
Car c’est sous le képi rouge à l’ancre de marine que son héros, s’arrachant au brillant avenir, que lui promettait Pasteur, a fait toute sa carrière en Indochine dans le Corps de santé colonial. Il s’y engagea le 30 décembre 1892 comme médecin de 2° classe, après avoir obtenu, étant né Suisse, sa réintégration dans la nationalité française. Il franchit tous les grades, jusqu’à celui de médecin principal de 1re classe (cinq galons) le 23 juin 1913, avant d’être admis à la retraite en 1920, en qualité de médecin colonel.
C’est à ce titre, et parce qu’il appartenait à ce service créé pour accompagner l’expansion coloniale de la France, qu’il put, en une vie d’homme, découvrir le bacille de la peste, créer le deuxième Institut Pasteur en Indochine, explorer la chaîne annamitique, être à l’origine de la ville de Dalat, ouvrir l’École de médecine de Hanoï, introduire la culture de l’hévéa, du quinquina, etc.
Pour expliquer les cinq galons sur sa vareuse qui lui valurent à Nha Trang le titre de Ong Nam (Monsieur cinq), Patrick Deville n’imagine rien moins, contre tout bon sens, que ce sont ceux d’un uniforme de médecin des messageries maritimes pendant la brève période où il navigua pour cette compagnie. Et les Indochinois de l’époque d’en affubler un génie tutélaire de leur panthéon, encore vénéré de nos jours en plein cœur du Saïgon historique dans un hôpital d’enfants, l’ancien hôpital Grall, fleuron pendant 115 ans de la présence française ! On y conserve la stèle érigée à Albert Calmette et Alexandre Yersin en 1963 par les élèves des Écoles de Santé Navale et de Santé Militaire qui y servaient.
L’escamotage falsificateur de l’auteur procède d’un révisionnisme outrageant un Corps prestigieux qui a tant fait pour l’image secourable de la France à travers le monde. Une histoire de médecin militaire devenant, dans une lointaine colonie, un bienfaiteur de l’humanité peut-elle encore se vendre ? Des galons d’opérette sur la manche d’un jeune médecin cabotant en mer de Chine, voilà qui pose un homme !
Et les Vietnamiens qui continuent d’implorer un improbable médecin de bateau-lavoir !
À preuve du sérieux du romancier, en page 111 : « Dès son retour, il entreprend l’installation d’un modeste centre d’études des épizooties animales. »
Lorsque j’étais lycéen, le professeur de lettres soulignait de rouge le pléonasme.
Et quid des platitudes éculées, assurément dignes d’un grand prix littéraire ? Page 114, évoquant Lyautey :
« Mais c’est une pédale qui défend un youpin. L’aveugle et le paralytique. Ça lui vaudra un coming out involontaire et la phrase de Clemenceau, lui aussi pourtant dreyfusard, feignant d’admirer le courage de Lyautey : voilà un homme admirable, courageux, qui a toujours eu des couilles au cul même quand ce n’était pas les siennes. »
L’intelligentsia parisienne de nos jours a de ces engouements !
*Ancien médecin des Troupes coloniales
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