À l'approche de la rentrée des classes, ce 1er septembre, les pédiatres expriment leur inquiétude à l'égard de l'organisation de la reprise « telle qu'elle se profile, tant sur le plan de la prévention que de celui de la prise en charge des enfants » dans un contexte de circulation du SARS-CoV-2.
Dans une tribune publiée ce 19 août, l'Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA) et plusieurs groupes de la Société française de pédiatrie rappellent leur prise de position en faveur de la scolarisation des enfants –— et ce dès avril. « Nous voulons que la rentrée ait lieu, que l'école reprenne dans des bonnes conditions », insiste auprès du « Quotidien » la Dr Fabienne Kochert, présidente de l'AFPA. Une position que partage le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique sur le Covid-19 : « On ne peut pas laisser cette génération d'enfants sans reprendre », a-t-il déclaré sur France Info, en mettant en avant le « rôle de prise en charge sociale de l'école pour les enfants des familles les plus défavorisées ».
Mais l'arrivée des épidémies hivernales (VRS, grippe, rotavirus…), dont les symptômes pourraient se confondre avec ceux du Covid-19, très peu spécifiques, nécessite d'anticiper des mesures « adaptées, mais raisonnables et efficaces », mettent en garde les pédiatres.
Développer les alternatives aux tests PCR
Les spécialistes émettent des réticences à l'égard d'une stratégie de diagnostic des enfants par PCR. « La pratique des prélèvements naso-pharyngés quasi systématiques (tels qu’ils sont recommandés aujourd’hui) chez les enfants présentant une fièvre, des signes respiratoires ou digestifs n’est pas si anodine qu’elle peut le paraître », écrivent-ils. Et d'incriminer leur aspect désagréable et nécessairement répétitif (un nourrisson pouvant connaître jusqu'à 6 à 8 épisodes viraux durant la saison froide), leur rendement modeste, le risque de s'exposer à un refus des enfants ou des parents, sans oublier les délais pour la réalisation du test et l'obtention des résultats.
Les pédiatres suggèrent plutôt de recourir à des tests de diagnostic rapide du SARS-CoV-2 (notamment salivaires), certes moins sensibles, mais permettant de prendre rapidement des décisions pour la collectivité : « l’objectif de ces tests devant être plus d’évaluer le risque de contagiosité que d’éliminer le diagnostic de Covid-19 », expliquent-ils.
Plaidoyer pour la vaccination, notamment contre le rotavirus
Les spécialistes insistent ensuite sur l'importance de généraliser la vaccination des nourrissons contre le rotavirus, rejoignant en cela l'Académie de médecine. « 15 à 30 % des enfants hospitalisés ou vus en consultation pour Covid-19 ont des signes digestifs, dont la diarrhée, ce qui rend très difficile le diagnostic différentiel avec les gastro-entérites à rotavirus », précisent-ils. Et de regretter que cette vaccination ne soit pas recommandée en routine, comme c'est le cas dans 15 pays européens. Selon les spécialistes, la balance risque/bénéfice penche en faveur de la vaccination, et le risque d'invagination intestinale est bien connu et circonscrit. « Garantir le remboursement de ces vaccins serait une mesure de cohésion sociale indispensable », estiment-ils.
Plus largement, les pédiatres insistent sur la nécessité de « prévenir tout ce qui peut être prévenu », comme la grippe, indique la Dr Kochert. « C'est important de ne pas surcharger les cabinets médicaux, où l'on doit aussi faire respecter des mesures barrière. Et d'éviter des tests invasifs excessifs chez les plus petits qui auraient des symptômes peu spécifiques », explique la présidente de l'AFPA.
Pour des directives claires
Enfin, les sociétés savantes demandent aux pouvoirs publics de préciser la conduite à tenir en cas de dépistage d'un sujet atteint de Covid-19 (enfant ou adulte) dans une collectivité. « Si des stratégies claires et précises ne sont pas définies, il nous semble que la rentrée scolaire risque d’être chaotique avec des fermetures de classes, voire d’écoles non justifiées par des raisons sanitaires ou épidémiologiques, et fortement délétères pour les enfants et leurs apprentissages », craignent-ils.
« Il y aura des contaminations à l'école mais on va les gérer », a de son côté assuré Jean-François Delfraissy.
« On est capable maintenant de tester, il faut qu'on fasse un effort majeur sur l'isolement (des cas positifs pour éviter la contagion, NDLR), mais il faut qu'on rentre dans cette stratégie de gestion de risque », a-t-il poursuivi, en soulignant qu' « il n’y a pas de risque zéro ». À la moindre suspicion, « on doit tester de façon très très large », a-t-il explicité. En cas d'infection avérée, « on peut fermer la classe », poursuit-il. « Fermer l'école, il faudra bien y réfléchir, ça va dépendre de l'environnement qu'il y a autour de cette école en général », a-t-il en revanche déclaré. Il s'est aussi prononcé contre un dépistage régulier des enseignants.
Et les masques ?
Parmi les mesures qui entreront en vigueur au 1er septembre, les enfants à partir de 11 ans (collégiens, lycéens) devront porter un masque grand public lorsqu’une distanciation ne pourra être garantie. Une mesure en cohérence avec les recommandations datées du 21 août de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Quant aux enfants âgés de 6 à 11 ans, l'OMS recommande aux autorités sanitaires de décider en fonction de plusieurs critères : l'intensité de la transmission du virus dans la zone où vit l'enfant, l'environnement socio-culturel, la capacité des enfants à utiliser correctement un masque, la disponibilité des adultes, mais aussi les incidences potentielles sur l'apprentissage et le développement psychosocial et les interactions particulières de l'enfant avec des personnes à risques. « Cela n'a pas de sens d'imposer une obligation du port du masque pour les moins de 11 ans », commente la Dr Kochert. Les masques sont enfin prohibés pour les moins de cinq ans.
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