La photo du surpoids et de l’obésité en France

Aucune catégorie socioprofessionnelle n’est épargnée, selon ObEpi

Publié le 18/04/2006
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L’AUGMENTATION de l’obésité touche tous les pays du monde, toutes les tranches d’âge, toutes les catégories sociales. La France est concernée par l’« épidémie » même si la croissance du nombre d’obèses est moins rapide comparativement à ce qui se passe chez nos voisins.

L’étude ObEpi est une étude épidémiologique mise en place à l’initiative de l’institut Roche avec la collaboration du Dr Marie-Aline Charles, épidémiologiste à l’Inserm U 258 et le Pr Arnaud Basdevant, chef du service de nutrition de l’Hôtel-Dieu à Paris.

Tous les trois ans.

Cette étude de référence permet d’évaluer tous les trois ans la progression de l’obésité et du surpoids en France et d’en mesurer la gravité.

En France, où le nombre d’adultes obèses est aujourd’hui de 5,3 millions, on constate une progression de ce chiffre d’environ 5 % par an. Aucune catégorie sociodémographique n’est épargnée.

Outre les conséquences en termes de santé publique, ce constat amène à prendre en compte les conséquences en termes d’économie de la santé.

L’Institut français pour la nutrition a invité d’éminents chercheurs à traiter les problèmes actuels concernant la nutrition, dans un contexte économique. Le Pnns (programme national nutrition santé) est ainsi remis en cause, comme toutes les campagnes actuelles de santé publique visant à augmenter la consommation des fruits et légumes frais, sans prendre en considération le coût de ces produits, parfois prohibitifs, alors que les calories « grasses » et « sucrées » n’ont jamais été moins chères et aussi omniprésentes.

Peut-on prendre des mesures économiques pour lutter contre l’obésité ?

Le coût de 100 calories va de 5 cents à 11 euros.

Actuellement, la consommation évolue en fonction des prix qui, eux-mêmes, dépendent de la productivité dans les différents secteurs de la production. L’abondance et la variété de l’offre permettent un choix alimentaire particulier. Le choix entraîne un déplacement des coûts.

Mais, en dépit de l’abondance, les facteurs économiques continuent d’exercer une pression déterminante.

Il a pu être estimé que le coût de 100 calories d’alimentation pouvait varier de 5 centimes d’euro à 11 euros selon le type d’aliment, ce qui explique les inégalités de consommation en fonction du revenu. Les écarts de consommation sont beaucoup plus faibles pour les viandes et les corps gras que pour les fruits et légumes.

Les mesures possibles sont multiples et se situent à différents niveaux, mais beaucoup sont difficiles à mettre en place. A court terme, il faudrait agir sur l’information (publicité, étiquetage), sur le niveau d’éducation, sur les prix et taxes des produits gras et sucrés et subventionner de façon socialement discriminative les fruits et légumes.

Mais, si on veut agir sur le long terme, il faut agir aussi sur les normes, les standards, le coût des matières premières et de la main-d’oeuvre, et mettre en place des aides à la recherche et au développement sur des objectifs nutritionnels.

Des mesures politiques.

Des mesures politiques sont aussi indispensables pour lutter contre l’obésité, avec, au premier plan, la lutte contre la précarité.

Des études suggèrent que le coût élevé des aliments bénéfiques pour la santé (fruits et légumes, poisson) pourrait contribuer au développement de l’obésité et que la précarité serait un facteur de risque majeur d’obésité. La qualité du régime, sa variété et la consommation de fruits et de légumes augmentent en fonction du statut socio-économique, de l’éducation, des revenus des ménages et de la classe sociale. Ce qui suggère que la lutte contre l’obésité passe aussi par la lutte contre la précarité et que, là, il faut envisager la mise en place de mesures politiques.

Enfin, l’efficacité des mesures à mettre en place, qu’elles soient économiques ou politiques, doit intégrer la dimension médicale qui reconnaît les fondements métabolique et génétique limitants de cette maladie qu’est l’obésité.

Table ronde « Economie et Obésité » organisée par l’institut Roche dans le cadre des 5es Jairo. Avec la participation de M. Laville (Lyon), O. Ziegler (Nancy), M.-A. Charles (Paris), S. Michels (Paris), P. Combris (Paris), J. Domergue (Hérault).

> Dr ANNIE BIDART

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7943