Ce jeudi 17 février 2011 débute au Bangladesh le plus grand programme de vaccination contre le cholera au monde. 240 000 habitants de la ville de Mirpur – située à l’ouest de la capitale Dacca et qui connaît deux épidémies saisonnières de choléra chaque année - vont être inclus. 2/3 d’entre eux recevront 2 doses orales d’un vaccin bon marché fabriqué en Inde (le Sanchol, dont le prix est d’environ 3 dollars pour 2 doses, soit 1/10e du prix de son concurrent, le Dukoral) et le dernier tiers un placebo. Les patients seront surveillés pendant quatre ans.
«C'est la plus grande étude au monde sur la vaccination contre le choléra», a déclaré Nasmeen Ahmed du Centre international de recherche sur les maladies diarrhéiques du Bangladesh, qui lance l'étude avec le gouvernement. «Des résultats positifs pourraient conduire d’autres pays où le choléra est un gros problème sanitaire à mener des campagnes de vaccination massives», a-t-elle ajouté. En Indonésie, une épidémie de choléra est présente depuis 1961, ce qui en fait la plus longue pandémie de choléra jamais relatée. En Haïti, l’actuelle épidémie a fait plus de 4000 morts depuis le mois d’octobre. Une autre épidémie est active aussi en Afrique centrale: elle a fait près de 2000 morts depuis octobre dernier au Cameroun, Niger, Nigéria et Tchad. Au total, le choléra touche de trois à cinq millions de personnes annuellement dans le monde et en tue environ 100.000.
Une solution pas si idéale
Toutefois, la vaccination n’est pas forcément la solution idéale pour lutter durablement contre le choléra. Les vaccins assurent un effet sur le court terme et ne couvrent pas toutes les souches de choléra . « Les deux vaccins disponibles (Dukoral et Sanchol) offrent une protection durable de 50% qui se maintient pendant deux ans en situation d’endémie » indique l’OMS. On a montré que le Dukoral, vaccin préselectionné par l’OMS, conférait une protection de 85-90% sur le court terme contre V. cholerae O1 dans toutes les tranches d’âges, pendant 4 à 6 mois après la vaccination. Mais selon l’Institut Pasteur, il ne protège pas contre la souche O-139, qui est aujourd’hui responsable de plusieurs épidémies dans plusieurs pays d’Asie et qui pourrait être à l’origine d’une huitième pandémie cholérique. Le Shanchol qui, lui, est en attente de présélection par l’OMS, confère une protection plus longue contre V. cholerae O1 et O139 chez les enfants de moins de 5 ans.
De plus, l’administration de ces deux vaccins est complexe à mettre en place dans le cadre d’une action à grande échelle : ils nécessitent la prise de deux doses à un intervalle allant de sept jours à six semaines. Et une vaccination sur un très grand nombre de personnes, même avec un vaccin bon marché, coute toutefois très cher. Enfin, surtout, la vaccination de masse ne doit pas remplacer la mise en route de mesures efficaces à plus long terme. A savoir, l’amélioration de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement. « Mais l’impact de la vaccination à Mirpur pourrait se faire ressentir dès mars ou avril prochain, en pleine période d’épidémie sévère, alors que l’amélioration des infrastructures sanitaires prendra des dizaines d’années » explique le Dr Stephen Luby (directeur bangladesh au CDC) dans un article du Times. Pendant que les villes se reconstruisent, que peut on alors proposer aux habitants contre le choléra ? La vaccination de masse peut être une solution. Reste à savoir, grâce à de programme de grande ampleur, si elle est réalisable sur le terrain et avec un bon rapport cout-efficacité.
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