De notre correspondante
AU DÉBUT des années 1970, les patients atteints de cancers hématologiques à haut risque avaient une faible chance de survie à long-terme. Le taux de survie a commencé à s’élever avec le développement de la greffe allogénique de moelle osseuse ou de sang, qui combine les effets de la chimiothérapie à haute dose, de l’irradiation corporelle totale et l’effet du greffon contre la leucémie (GVL). Depuis, de nombreux patients atteints de leucémie et de lymphome à haut risque connaissent des rémissions à long-terme.
Toutefois, la toxicité des conditionnements myélo-ablatifs, des infections et de la réaction du greffon contre l’hôte (RGCH) entraînaient un risque important de décès, qui empêchait l’allogreffe chez les patients âgés ou présentant des co-morbidités.
Gooley et coll. (Fred Hutchinson Cancer Research Center, Seattle, Etats-Unis) ont comparé les résultats de 1418 patients qui ont reçu, entre 1993 et 1997, une première greffe de moelle osseuse ou de cellules souches du sang (sang périphérique ou de cordon ombilical) provenant de donneurs non apparentés, à ceux de 1148 patients qui ont reçu une première allogreffe une décennie plus tard, entre 2003 et 2007. Ces patients étaient traités pour divers cancers hématologiques: leucémies, lymphomes, myélome multiple, et syndromes myélodysplasiques.
Dans cette étude rétrospective, ils ont analysé la mortalité globale, celle non précédée de rechute, la récidive et le risque des complications majeures de la greffe (RGCH, infections, etc), après avoir pris en compte le fait que les patients traités entre 2003 et 2007 étaient, en moyenne, plus âgés et plus malades que ceux traités dans les années 90. Ils ont ainsi constaté, au cours de la dernière décennie, une baisse importante du risque de décès lié à l’allogreffe des cellules hématopoïétiques, ainsi qu’une augmentation de la survie a long-terme.
On observe ainsi dans la période 2003-2007, par rapport à 1993-1997, une réduction de 41% de la mortalité globale, ainsi qu’une baisse de la mortalité non précédée de rechute - à la fois 200 jours après la greffe (-60%) et globalement (-52%). Ces résultats sont similaires lorsque l’analyse se limite aux patients recevant le conditionnement myéloablatif.
En outre, des baisses importantes sont observées pour les risques de RGCH, d’infections virales, bactériennes ou fongiques et de complications causées par des atteintes toxiques du foie, des reins et des poumons. Le taux de survie à un an est estimé à 55% pour les patients des années 1990, contre 70% pour ceux de cette dernière décennie.
Plusieurs changements dans la pratique de l’allogreffe pourraient avoir contribué à ces meilleurs résultats:
- Patients âgés ou présentant des co-morbidités traités avec des conditionnements moins intenses, donc moins toxiques;
- surveillance pharmacologique étroite avec ajustement des doses de chimiothérapie;
- moindre recours à l’immunosuppression systémique à haute dose contre la RGCH;
- utilisation de l’ursodil pour prévenir les complications hépatiques;
- nouvelles méthodes de détection précoce des infections virales et fongiques ainsi que traitement préventif de ces infections;
- utilisation d’antifongiques plus efficaces et moins toxiques;
- utilisation de cellules souches hématopoïétiques du sang périphérique plutôt que de la moelle osseuse, comme source des cellules du donneur, ce qui entraîne plus rapidement une prise de greffe et une restauration de l’immunité;
- Enfin, appariement plus juste des donneurs de cellules souches ou de moelle avec les patients sans parenté familiale.
New England Journal of Medicine, 25 novembre 2010, Gooley et coll., p 2091 et 2158.
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