CE N’EST PAS TOUT d’avoir des bâtiments classés. Ce qui assure véritablement leur protection, c’est de les faire vivre. Et, ce qui compte, c’est l’intérêt plus ou moins grand que va porter au patrimoine le directeur de l’hôpital et le soutien d’une association. A Bazas, petite ville de Gironde, qui attire les touristes pour sa magnifique place et sa cathédrale du XIIIe siècle, la directrice de l’hôpital, Mme Marquant, a fait réhabiliter l’apothicairerie il y a trois ans. Et a encouragé M. Tamarelle, un biologiste de l’hôpital de Langon qui prenait sa retraite, à créer une association pour la prendre en charge. C’est ainsi que l’association pour la sauvegarde de l’apothicairerie de l’hôpital Saint-Antoine de Bazas fait visiter toute l’année sur rendez-vous l’apothicairerie et son ensemble homogène de faïences du XVIIIe siècle de Bordeaux et du Sud-Ouest. L’hôpital vend ticket (2 euros) et livret. «L’apothicairerie est citée dans “le Guide vert”, “le Guide du routard” et dans les dépliants de l’office du tourisme de Bazas. Pour les groupes, nous faisons partie de la visite de Bazas et nous avons aussi des visiteurs individuels, souvent amateurs de faïences. Soit quelque 300visiteurs individuels l’an dernier et autant le week-end des Journées du patrimoine.»
A Chalon-sur-Saône, où s’est créé un petit musée hospitalier, l’association Abigaïl Mathieu est abritée au sein de l’hôpital (XVIIe-XVIIIe) qui rémunère les deux permanents (sur deux emplois jeunes devenus des CDD). Ce qui a permis de faire l’inventaire du mobilier, de réaliser une plaquette et une exposition l’an dernier, d’assurer toute l’année des visites, y compris pour le public scolaire (1 182 visiteurs/an plus 1 400 pour les Journées du patrimoine).
Les hôpitaux de Bourgogne bénéficient, il est vrai, de la proximité des Hospices de Beaune (400 000 visiteurs par an) et sont réunis dans le réseau des hôtels-Dieu et apothicaireries de Bourgogne avec l’appui des offices de tourisme. L’agence régionale de l’hospitalisation de Bourgogne est une des rares à avoir un chargé de mission à temps partiel dévolu au patrimoine (il s’occupe aussi de l’action culture à l’hôpital). «Si personne ne s’en occupe, les bâtiments, classés ou pas, se dégradent, explique Bruno François ; la fréquentation n’est jamais gagnée. Il faut créer des événements pour renouveler l’intérêt des visiteurs.» L’ARH souhaite créer un label « patrimoine hospitalier de Bourgogne ».
En plus de l’intérêt des directeurs d’hôpital, c’est aussi la force de persuasion qui finit par avoir gain de cause. Ainsi l’aventure du Conservatoire du patrimoine médical de Marseille, porté par l’association créée en 1996 par le Pr Yves Baille avec le projet de coupler un centre de documentation et de recherches historiques et un musée de la santé. Le musée va s’installer dans une grande et belle bastide du XIXe sur le terrain de l’hôpital de la Timone. Le directeur général de l’AP-HM vient de nommer un directeur administratif et de recruter une attachée de conservation. Les locaux du Conservatoire et ceux de l’association se trouvent à l’hôpital Salvator.
Des hôpitaux psychiatriques très accueillants.
En matière d’animation du patrimoine, les centres psychiatriques occupent une place à part. Ils bénéficient généralement de grands jardins, voire de parc (13 hectares pour l’hôpital Sainte-Anne, à Paris, 74 hectares au Vinatier à Bron).
L’hôpital Sainte-Anne, construit par Haussmann au XIXe siècle, sur l’emplacement de la ferme Sainte-Anne (XIIIe) et de l’hôpital voulu par Anne d’Autriche au XVIIe siècle, réussit à mobiliser son personnel, de la bibliothécaire aux psychiatres, pour toutes les manifestations auxquelles il participe : Journées du patrimoine, Livres en fête, Printemps des poètes, Fête de la musique ; le Pr Daniel Fredy, du département d’imagerie morphologique et fonctionnelle n’est-il pas le président de l’association des amis du petit musée de la psychiatrie et des neurosciences, qui retrace les grandes étapes de l’histoire de l’hôpital et est ouvert toute l’année. Sans prétendre à l’art-thérapie, des activités artistiques sont souvent proposées aux malades.
A Sainte-Anne, le musée Singer-Polignac est riche de la collection d’art brut du centre d’étude de l’expression (70 000 oeuvres numérotées et signées des malades). De la même manière, la ferme du Vinatier à Bron (Rhône) s’est convertie en 1997 en Ferme (Fondation pour l’étude et la recherche sur les mémoires et l’expression) et a donné naissance à un nouvel espace culturel où se succèdent, tout au long de l’année, expositions, concerts et ateliers d’expression pour les malades. C’est une façon de favoriser les liens entre l’hôpital psychiatrique et son environnement. Une petite équipe s’y consacre à temps plein.
A l’hôpital Esquirol, de style néoclassique, dont le service de communication (4 personnes) a été réuni avec celui de l’hôpital national à Saint-Maurice, le patrimoine est mis en valeur pour les journées du patrimoine et les rendez-vous au jardin de juin. Des visites sont organisées par des associations à la demande.
«Nous entretenons d’excellentes relations avec la municipalité, qui met une navette à la disposition des visiteurs pour lesjournées du patrimoine, explique Sandrine Bodeau, responsable de la cellule communication, des concerts sont organisés dans la chapelle d’Esquirol en partenariat avec la ville.» Tandis que l’hôpital national fête ses 150 ans (« le Quotidien » du 13 septembre), des conteuses proposeront à Esquirol des rendez-vous contés (les 16 et 17 à 14 h 30 et 16 h 15).
Pour en savoir plus sur les manifestations : www.journeesdupatrimoine.culture.fr.
Une sélection de manifestations, rubrique "Dossiers Web"
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