« Caché », de Michael Haneke

Coupables

Publié le 17/05/2005
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MICHAEL HANEKE supplie les journalistes de ne pas raconter son film. Surtout pas la fin bien sûr, mais pas non plus certains thèmes qui sont abordés. Il a raison, même si cela rend difficile l'analyse. Car c'est ce qui permet à « Caché » de garder son pouvoir de mise en question. Le cinéaste autrichien, qui tourne désormais en France, dit aussi que c'est au spectateur de choisir les réponses.
Soit un bel appartement, plein de livres. Lui anime une émission littéraire à la télévision, elle travaille dans l'édition. Ils ont un fils, qui entre dans l'adolescence. Le générique s'égrène, nom après nom, sur un plan fixe de ce confortable lieu de vie. On apprendra vite, cela on peut le dire, que quelqu'un surveille et filme ce couple sans histoire.
Mais ce n'est pas seulement ce mystérieux personnage qui est caché. C'est aussi ce qui est enfoui au fond de nous.
C'est « un thriller sur la culpabilité », indique le cinéaste quand il faut bien se plier au travail de promotion et trouver une formule pour résumer son film. Plus précisément sur la façon dont nous réagissons face aux conséquences de nos actes. Nous ne sommes pas toujours responsables de ce que nous faisons, nous sommes responsables de la conscience que nous en avons.
Michael Haneke filme des images simples, sans effets (et surtout pas spéciaux), mais qui peuvent avoir plusieurs interprétations. C'est ainsi qu'il conçoit le travail du cinéaste : poser des questions et laisser le spectateur en faire ce qu'il veut. Bien sûr, on est frustré, on voudrait savoir le pourquoi du comment, mais c'est beaucoup plus stimulant que ces films simplistes dont le cinéma actuel nous abreuve.
Daniel Auteuil et Juliette Binoche sont si proches, si familiers, que l'on ne voit pas sans effroi s'effriter leur vie tranquille. Annie Girardot, en une seule scène, installe le malaise. Les acteurs (sans oublier Maurice Bénichou) sont des atouts de poids de ce deuxième film à représenter la France, après « Lemming ». Les pièces maîtresses du puzzle que Haneke nous invite à construire, avec les échos d'une culpabilité qui est aussi collective ?

Sortie le 12 octobre.

> R. C.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7751