L’IRLANDE, dont le gouvernement n’est pas follement dynamique, croyait pouvoir s’extraire du guêpier où elle se trouve sans l’aide de quiconque. L’Union européenne et le FMI lui ont fait savoir, pendant le dernier week-end, que la débâcle financière d’un État qui a emprunté énormément d’argent aux banques européennes ne saurait être réglée à huis-clos et que les prêteurs sont aussi menacés par une catastrophe que l’emprunteur. C’est un plan de 80 milliards qui a été mis au point, bien que les échéances de remboursement irlandaises ne soient pas immédiates. Il vaut mieux toutefois que Dublin soit blindée contre les reboursements en capital qu’elle doit faire l’année prochaine.
On aura remarqué qu’un consensus européen s’est très vite dégagé au sujet de cas irlandais alors que la crise grecque avait opposé les Allemands aux Français, les premiers n’étant pas disposés à voler au secours d’un peuple qui avait usé de tous les stratagèmes possibles, y compris le truquage de ses comptes, pour continuer à vivre très largement au-dessus de ses moyens. Ce n’est pas par compassion qu’il fallait sauver la Grèce, qu’il faut construire un mur financier autour de l’Irlande, qu’il faudra peut-être, plus tard, protéger l’Espagne ou le Portugal. C’est parce que chacun de ces pays, y compris l’Italie, y compris la France, a emprunté à des banques privées internationales. Lesquelles, si elle ne peuvent pas rembourser, entraîneraient dans leur chute la nation qui les héberge. L’argent public prend ainsi le relais du privé, non de gaieté de cœur, non par empathie, mais parce que, si des banques françaises sont ruinées par les prêts qu’elles ont faits, ce sont les clients individuels des mêmes banques, c’est-à-dire ceux qui y ont un compte, qui risquent de perdre ce qu’ils possèdent.
L’AN PROCHAIN, LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS DEVRA EMPRUNTER ENCORE 200 MILLIARDS
L’UE a mis sur pied, au printemps dernier, un fonds de 750 milliards dont l’unique fonction est d’empêcher la faillite des États-membres. Les 80 milliards (la Royaume-Uni versera pour sa part 11 milliards de ce total) ne sont pas difficiles à trouver. Le sentiment de sécurité pourrait donc être assez fort en Europe si d’autres pays n’étaient menacés dans l’immédiat au même titre que l’Irlande, par exemple l’Espagne et le Portugal. Il faut savoir qu’il n’existe, en Europe et en Amérique du Nord, que des pays lourdement endettés. Mais leur position financière est différente, selon qu’ils sont en mesure de faire face ou non aux échéances de reboursement. Il est donc évident qu’un pays comme l’Allemagne, qui dégage des excédents commerciaux considérables, n’est pas pris à la gorge. Ce n’est pas le cas de la France, dont tous les comptes publics affichent des déficits et qui, l’an prochain, devra encore emprunter 200 milliards sur les marchés internationaux pour boucler ses dépenses nationales. Cependant, la réforme des régimes de retraite et la mise en œuvre d’un plan budgétaire visant à une forte réduction du déficit tendent à rassurer les marchés, qui, dans leur désir de prêter, savent faire la part des choses. La France continue à emprunter à des taux très bas, mais la vraie solution, c’est la fin du recours à l’emprunt qui, dans le meilleur des cas, n’interviendra pas avant au moins quatre ans.
On peut donc penser ce qu’on veut de la politique de rigueur du gouvernement Fillon, elle n’en est pas moins destinée à nous éviter une faillite retentissante et une perte éventuelle de souveraineté. Quel que soit le parti qui prendra le pouvoir en 2012, il ne pourra pas faire l’impasse sur une crise financière qui ne sera nullement terminée. Comment contribuer à la croissance tout en réduisant la dépense publique, c’est la quadrature du cercle. Une réforme fiscale devrait donc tendre non seulement à réparer les injustices mais à dégager plus d’argent pour l’État, sans toutefois nuire à la consommation. Aujourd’hui le service d’une dette publique qui atteint 1 500 milliards d’euros est le premier poste du budget national, avant la Défense, avant l’Éducation. L’impôt sur le revenu suffit à peine pour payer les intérêts de la dette (plus de 50 milliards par ans, sans compter le capital qu’il faudra bien rembourser un jour). Voilà où nous en sommes.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature