Prise en charge de l'hypercholestérolémie

Dissiper les idées reçues

Publié le 23/03/2005
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SELON les estimations de l'Organisation mondiale de la santé, « les maladies cardio-vasculaires et les accidents vasculaires cérébraux constituent ensemble la principale cause de décès, avec 17 millions de morts chaque année dans le monde, soit un décès sur trois ». Pour un individu donné, le risque cardio-vasculaire correspond à la probabilité de développer une maladie cardio-vasculaire pendant une période définie, habituellement de cinq ou dix ans, en fonction de paramètres comme son sexe, son âge et son lieu d'habitation. Le risque varie en effet en Europe en fonction d'un gradient nord-sud, comme l'a démontré le programme Monica (Multinational MONItoring of trends and determinants of CArdiovascular diseases) de l'Organisation mondiale de la santé. Le risque cardio-vasculaire de la France se situe ainsi normalement, en fonction de sa latitude, ce qui élimine la notion de « paradoxe français ».

Des normes revues à la baisse.
Plus de 200 facteurs conditionnent le risque cardio-vasculaire. La concentration plasmatique en lipides circulants est un facteur majeur. L'étude Interheart, qui a été publiée en septembre 2004 dans « The Lancet », est une étude cas-témoins qui a porté sur 15 152 cas et 14 820 témoins issus de 52 pays représentant tous les continents habités. Elle a montré que le risque d'infarctus est lié à 9 facteurs potentiellement modifiables. Parmi ceux-ci, la fraction attribuable de risque cardio-vasculaire, c'est-à-dire le nombre de cas d'infarctus expliqués par les fractions LDL et HDL du cholestérol, dépasse 50 %.
De plus, l'étude 4S (Scandinavian Simvastatin Survival Study), publiée dans « The Lancet » en 1994, avait montré que le niveau de risque induit par ces fractions lipidiques était réversible sous traitement hypolipémiant. De nombreuses études ont confirmé cette efficacité thérapeutique. Des recommandations ont ainsi été fondées sur des objectifs thérapeutiques de concentration de HDL cholestérol en fonction du risque cardio-vasculaire global du patient.
Néanmoins, une enquête réalisée par l[212]Union des caisses régionales de l'assurance-maladie (Urcam) a montré en 2002 que le taux de LDL cholestérol n'était pas mesuré chez un patient sur trois. Dans le même esprit, l'étude Reality, qui a porté sur 3 173 patients inclus par 123 médecins, a montré que les cibles de LDL cholestérol sont de moins en moins bien atteintes lorsque le risque cardio-vasculaire augmente. De plus, la même étude a montré que le risque d'événement cardio-vasculaire est triplé lorsque cet objectif thérapeutique n'est pas atteint trois années de suite. Ainsi, l'atteinte prolongée des objectifs thérapeutiques n'est obtenue que chez une minorité de patients. De nouvelles approches semblent donc nécessaires.

Une baisse supplémentaire de 18 % du LDL cholestérol.
En effet, le bon taux de LDL cholestérol à atteindre pour chaque patient a été redéfini en mars 2005 dans les recommandations de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Il constitue l'élément clé des recommandations de dépistage et de prise en charge du patient dyslipidémique. Dans une revue de la littérature publiée en 2004 dans le « Journal of the American College of Cardiology », JH O'Keefe et coll. avaient montré que dans les populations indigènes vivant de la chasse, chez les nouveau-nés et chez les primates en liberté, exempts d'athérosclérose, le taux de LDL cholestérol est de l'ordre de 0,5 à 0,7 g/l. Dans cet esprit, chez un individu sans facteur de risque, les taux de 1,6 g/l de LDL cholestérol, de 1,5 g/l de triglycérides et de 0,40 g/l de HDL cholestérol sont considérés comme normaux. En présence d'antécédents de maladie cardio-vasculaire avérée ou de risques équivalents (diabète de type 2 à haut risque, risque d'événement coronaire supérieur à 20 % à dix ans), l'objectif thérapeutique est inférieur à 1 g/l.
Le cholestérol provient de deux sources principales dans l'organisme, le foie et l'intestin. Le cholestérol que contient ce dernier est constitué pour 70 % de cholestérol biliaire et de 30 % de cholestérol alimentaire. Le cholestérol intestinal est pour moitié absorbé par les cellules intestinales, l'autre moitié étant éliminée dans les selles. Une voie consiste à agir sur cette absorption intestinale en renforçant les mesures hygiéno-diététiques qualitatives et quantitatives et en agissant sur l'absorption digestive grâce à une nouvelle approche thérapeutique, dont l'ézétimibe est la première molécule. Comme l'a souligné P. Sabouret (Paris), elle « permet une avancée majeure dans la prise en charge des dyslipidémies ». En effet, cette molécule agit par un mécanisme d'action complémentaire de celui d'une statine, en inhibant de façon sélective l'absorption du cholestérol au niveau de la bordure en brosse des entérocytes. Cela permet « une baisse supplémentaire de 18 % du LDL cholestérol, ce qui correspond à trois fois le doublement d'une dose de statine », soit un passage de la dose de 10 mg/jour à 80 mg/j. A son efficacité, « s'allient une simplicité d'emploi, avec une prise par jour à 10 mg, et un profil de tolérance satisfaisant ».
L'action originale de l'ézétimibe, complémentaire de celle des statines, permet le développement du concept de bithérapie dans le traitement des dyslipidémies et devrait permettre d'optimiser la prise en charge chez les patients à haut risque cardio-vasculaire qui ne sont pas équilibrés sous statine à dose standard ou qui la tolèrent mal.

D'après le communications de l'amphi en lipidologie « Dissiper les idées reçues pour optimiser la prise en charge du cholestérol », sessions parrainées par les Laboratoires MSD-Chibret et Schering-Plough.

> Dr GÉRARD BOZET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7715