Aux 50 ans du vaccin de la poliomyélite

Douze Nobel planchent sur la protection vaccinale

Publié le 12/05/2005
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LE SIDA, le sras, la grippe aviaire et les autres maladies émergentes modifient notre approche de la sécurité sanitaire : aujourd'hui, les menaces d'épidémies ou de pandémies ne peuvent plus se gérer de façon isolée. Elles nécessitent une mobilisation plus rapide associée à une coopération internationale.
A l'heure où nous fêtons le 50e anniversaire du vaccin de la poliomyélite, on se prend à rêver au même succès collectif.
En effet, l'histoire de la vaccination contre cette maladie est exemplaire : mis à part quelques pays dans lesquels la vaccination est insuffisante ou refusée, la maladie est pratiquement éradiquée dans le monde. Ce succès est dû à la convergence exceptionnelle des efforts et des contributions de nombreux acteurs : équipes de chercheurs performantes, dons privés, soutiens actifs des pouvoirs publics, civisme des volontaires qui se sont portés candidats pour tester les vaccins, mobilisation des industriels pour produire rapidement les doses nécessaires et, enfin, efforts communs des organisations internationales, des associations caritatives et des ONG pour assurer une couverture vaccinale mondiale. Face à ce succès, peut-on raisonnablement penser que cette expérience puisse servir de modèle et de référence pour accélérer la recherche, le développement et la diffusion de vaccins adaptés aux nouvelles maladies ?
Douze lauréats de prix Nobel de différentes disciplines et des représentants de la société civile de la science et de l'industrie se sont réunis dans le cadre du Forum mondial des sciences et de la vie, BioVision 2005 ; le cœur du problème : comment améliorer la recherche, le développement et la diffusion des vaccins au niveau mondial.
Beaucoup de choses ont changé depuis cinquante ans. Nous vivons dans un monde idéologique qui pense que les maladies sont neutralisées. Or tel n'est pas le cas : les menaces de la grippe aviaire réveillent un peu l'endormissement général.

Des limites scientifiques, économiques et éthiques.
Certes, la recherche avance, mais elle est confrontée à ses limites : scientifiques, économiques et éthiques. En effet, l'expérimentation devient difficile car on manque de modèles (les modèles de souris ne sont pas un bon reflet de l'immunologie humaine) ; la petite partie du budget pharmaceutique réservée à l'activité vaccinale, 2,5 % du marché des médicaments, ne suffit pas à compenser les coûts grandissants des essais cliniques ; enfin, l'omniprésence du principe de précaution et la lourdeur de la réglementation ne facilitent pas les choses.
Toutefois, diverses solutions existent. Elles passent d'abord par une différenciation des problèmes : il existe des vaccins « classiques » rentables, mais qui, pour être utilisés dans les pays en développement, doivent être adaptés (vaccin contre la polio monovalent en Inde et bientôt en Egypte) et d'autres, à développement tardif, mais qui bénéficient de budgets de recherche totalement inégaux (le VIH et le paludisme). Pour éviter que l'écart ne se creuse encore entre le nord et le sud, entre pays riches et pays pauvres, des mesures doivent être prises afin que les mondes de l'industrie et de la recherche se rejoignent.

Raisonner en termes de vies sauvées.
La prise de conscience collective passe par un changement de mentalité : ne plus raisonner en termes de rentabilité, mais de vies sauvées et accepter une certaine prise de risque.
Le développement des partenariats entre les secteurs public et privé est plus que jamais d'actualité et doit, pour ne pas décourager les donateurs, s'appuyer sur des projets précis et ciblés.
Enfin, les actions sur le terrain sont toujours nécessaires et efficaces à condition qu'elles puissent être durables, c'est-à-dire se pérenniser en dehors de toute contingence des inévitables alternances de l'activité politique.

Table ronde organisée dans le cadre de BioVision : « Comment améliorer les efforts mondiaux pour la recherche, le développement et la diffusion des vaccins ». Animée par R. Yogeshwar (WDR TV), avec : K. Gautam (Unicef), V. Hale (One World Health), D. Heymann (Who), M. Katz March of Dimes), P. Kourilsky (Pasteur), R. S. Scott (Rotary'sPolio Eradication), M. De Wilde (Sanofi Pasteur).

> Dr CHRISTINE JEANROY

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7748