Voilà un des rares sujets de santé qui oppose nettement la gauche et la droite, et même, au sein de cette dernière, ses ailes libérale et sociale. La ministre de la Santé appartenant à la deuxième, on l’a vu plutôt mal à l’aise mardi devant les députés tenter le grand écart pour justifier de restrictions à l’Aide médicale d’État qui à l’évidence ne sont pas sa tasse thé. Pas le choix… L’AME -qui a succédé à l’aide médicale en 2000- suscite depuis de nombreux mois l’hostilité croissante de toute une partie de la majorité qui l’accuse pêle-mêle de coûter de plus en plus cher et d’être le cadre de fraudes et abus à répétition. Ce dispositif offre en fait une prise en charge médicale à 100 % aux étrangers en situation irrégulière qui n’ont pas droit à la CMU. Et elle est gratuite. Du moins, elle l’était…
À compter de l’an prochain, tout postulant à des soins dans ce cadre devra en effet acquitter un droit d’entrée de 30 euros. Même si le montant est symbolique, le dispositif devient donc payant. Ainsi en ont décidé (pour l’instant) les députés. Et ils en ont également profité pour rogner un peu le panier de soins offert dans ce cadre aux étrangers et le périmètre des ayants droits amenés à en bénéficier. Même s’il était attendu depuis la rentrée et si la ministre assure que l’essentiel du dispositif est préservé, ce tour de vis fait mauvais effet. Après l’expulsion des Roms l’été dernier, l’image de la France en sort un peu plus écornée sur des terrains qui font d’ordinaire sa réputation : son système de santé et sa tradition d’accueil. Pourtant, de l’aveu même de Roselyne Bachelot, l’AME ne connaît pas vraiment de dérive. Et même si la facture est importante (500 millions d’euros), en comparaison des 21 milliards de déficit de la Sécu, il faut quand même relativiser.
Le plus aberrant dans cette affaire concerne d’ailleurs la santé publique. Ces populations consultent déjà trop tardivement. En réduisant leur accès aux soins, on risque de favoriser le développement de foyers infectieux dangereux pour la population dans son ensemble. Tout ça pour un bénéfice financier illusoire. Car il faudra bien que nos hôpitaux les prennent en charge un jour ou l’autre. Et, de ce point de vue, on sait bien que le plus tôt est le mieux, pour l’individu comme pour la collectivité.
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