LE MESSAGE principal du Congrès de l’American Association for the Study of Liver Diseases (Aasld) est à l’intention du public : «Vous devez connaître votre taux d’Alat.» Il est destiné à améliorer le dépistage des hépatites chroniques, d’autant plus que des médicaments sont apparus ou sont en développement aussi bien dans l’hépatite B (analogues nucléosidiques-nucléotidiques) que dans l’hépatite C (antiprotéases). Un message qui s’applique imparfaitement à notre pays, confirment plusieurs spécialistes, où l’on n’a toujours pas réussi à revacciner correctement contre l’hépatite B.
Une étude réalisée par la célèbre Mayo Clinic confirme, à partir d’une étude de cohorte effectuée chez près de 20 000 patients, que les taux de transaminases sont prédictifs de la mortalité globale, ce qui met en lumière la place de la sclérose hépatique, non seulement dans les hépatites chroniques B et C, mais aussi dans l’alcoolisme, chez les obèses et dans le syndrome métabolique.
Or, constate le Pr Thierry Poynard (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris), trop d’élévations modérées des transaminases, asymptomatiques, sont méconnues ou négligées quand elles sont connues, alors que l’évolution vers la fibrose peut se faire à bas bruit. D’autant que les valeurs « normales » d’Alat, calculées en comparaison avec des populations témoins (ne contiennent-elles pas des malades méconnus ?), sont largement débattues par les spécialistes.
Pour le Pr Poynard, ce phénomène peut avoir des effets dramatiques quand on sait qu’il y a en France 300 000 porteurs chroniques du VHB contre 150 000 il y a dix ans (un effet des flux migratoires, du recul vaccinal…). Sur ces 300 000 personnes, 60 000 seulement connaissent leur statut et 13 000 sont traitées. A cela s’ajoutent quelque 500 000 porteurs du VHC, les hépatopathies liées à l’alcoolisme, au syndrome métabolique…
Dans ce contexte, le Pr Poynard plaide pour une plus grande utilisation du Fibrotest, afin de déceler précocement une fibrose qui, on le sait, est une étape vers la cirrhose et, dans certains cas, vers le cancer. Une étude effectuée avec le Pr Grimaldi, sur 1 000 patients hospitalisés en diabétologie, a permis de retrouver 10 % de fibroses. Des résultats qui ont conduit à un dépistage auprès de 15 000 personnes, avec la collaboration de la Cpam de Paris.
Dépistage précoce et traitement précoce.
Le dépistage amélioré ne signifie pas qu’il faudrait traiter tous les patients dépistés, souligne le Pr Stanislas Pol (CHU Cochin, Paris). Ainsi, dans l’hépatite B, «on ne traite pas la phase dite de tolérance immunitaire, où la forte charge virale ne s’accompagne pas de lésions hépatiques. A l’autre extrême, les portages où la charge virale est très faible». S’il ne s’agit pas de traiter tout le monde, il faut – s’accordent à dire les experts – traiter précocement tous les patients qui tireraient bénéfice de tels traitements, puis surveiller scrupuleusement et régulièrement l’ensemble des malades. Cela ne peut se faire sans les généralistes, ce qui implique des formations pour le moment quasi inexistantes.
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