A L'OCCASION d'une table ronde organisée par la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf) au Medec, le Dr Serge Larue-Charlus, conseiller de Philippe Douste-Blazy, a annoncé que la parution au « Journal officiel » du décret relatif à l'évaluation des pratiques professionnelles (EPP) était imminente. « Le texte est actuellement à Matignon, il ne s'agit plus que d'une question de jours », a-t-il indiqué. Rendu obligatoire pour tous les médecins libéraux, hospitaliers et salariés par la réforme de l'assurance-maladie, le dispositif devrait être opérationnel à partir du 1er juillet 2005. Les médecins disposeront alors d'un délai de cinq ans pour s'y soumettre, sous peine de sanctions. Même si les esprits ont beaucoup évolué depuis l'instauration d'une évaluation des pratiques professionnelles basée sur le volontariat, en 1999, une grande partie des praticiens redoutent toujours de passer à l'acte. « Il faut dissiper tout malentendu, déclare le Dr Michel Chassang en ouverture des débats. L'évaluation se distingue du contrôle. L'EPP n'a pas pour but de détecter les médecins déviants. Il s'agit une démarche d'accompagnement qui doit permettre à tous les médecins d'améliorer la qualité de leurs pratiques professionnelles. »
Le Dr Bernard Huynh, président de l'Union régionale des médecins libéraux d'Ile-de-France, ne doute pas de l'engagement futur des intéressés : « Beaucoup de médecins se portent déjà volontaires en Ile-de-France. Plus de 2 000 ont entamé une procédure d'évaluation et 2 000 autres sont sur liste d'attente. Il règne en la matière une espèce de prosélytisme. »
Un enjeu, des obstacles.
L'obligation de l'évaluation des pratiques pourrait néanmoins se heurter à de sérieux obstacles. D'ordre logistique en premier lieu. Selon plusieurs experts, le nombre de médecins habilités par la Haute Autorité de santé (HAS) à encadrer des actions d'évaluation - environ cinq cents aujourd'hui - devrait être porté à plus de un millier pour permettre le bon fonctionnement du système. De même, les unions régionales de médecins libéraux ne devraient plus être les seules instances à organiser des actions d'évaluation. « Il est évident que nous aurons besoin des organismes de formation médicale continue (FMC) », affirme le Pr Jean-Michel Chabot, responsable de l'EPP à la Haute Autorité. « L'évaluation pourra prendre la forme d'un bilan de compétence ou encore de groupes de pairs. L'objectif est d'offrir une large palette aux médecins », confie le Dr Bernard Ortolan, responsable Csmf et président du Conseil national de FMC pour les médecins libéraux. Toutes ces actions devraient rapporter aux médecins un certain nombre de points, baptisés crédits, dont une partie pourra également servir à valider la formation médicale continue. L'articulation exacte entre FMC et EPP reste toutefois à définir en fonction du cahier des charges et des barêmes.
Souhaitant répondre à l'ambiguïté qui règne pour les médecins spécialistes qui conjuguent plusieurs modes d'exercice, le Dr Jean-François Thébaut, cardiologue et secrétaire générale de l'Umespe, la branche spécialiste de la Csmf, a expliqué que plusieurs voies d'accès à l'EPP s'offriraient à eux : « L'évaluation traditionnelle, l'accréditation pour les médecins qui ont des pratiques à risques et la certification. »
Le plus grand frein au développement de l'EPP dans les mois à venir pourrait provenir du financement. Le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (Faqsv) devrait être exploité « dans un premier temps afin de lancer le dispositif », a annoncé le Dr Larue-Charlus. Le Dr Michel Chassang ajoute toutefois que la profession devra trouver des solutions adéquates et pérennes si elle souhaite conserver une totale indépendance.
Sujet sensible s'il en est, le chapitre des sanctions a été abordé par les intervenants. La dernière version du décret à paraître stipule que, dans le cas où un médecin mettrait en jeu la sécurité de ses patients, le médecin habilité doit en prévenir une commission placée au conseil régional de l'Ordre des médecins qui pourra entamer une procédure disciplinaire. Et la loi prévoit que les médecins seront passibles de sanctions s'ils refusent de se soumettre à l'EPP avant juillet 2010.
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