Titre original
Johnny got his gun
Date de sortie
4 novembre 1971
Réalisateur
Dalton Trumbo
Scénario
Dalton Trumbo, d’après son roman publié en 1939, et Luis Bunuel
Distribution
Jeremy Bottoms, Katy Fields, Marsha Hunt, Jason Robards, Donald Sutherland
Durée
111 minutes
L’histoire
Le dernier jour de la Première Guerre mondiale, Johnny Bonham a été amputé des quatre membres et son visage a disparu. Mais son cerveau fonctionne toujours. Cloué au lit, Johnny revit les événements qui ont précédé cette tragédie et essaie de deviner le monde qui l'entoure à présent à l'aide de la seule possibilité qui lui reste : la sensibilité de sa peau. Il parvient à communiquer avec le personnel infirmier en morse, et le supplie de l'achever. En vain...
Dalton Trumbo, un maudit du maccarthysme
Quand il réalise «Johnny got his gun », Dalton Trumbo est âgé de 66 ans. Un coup d’éclat qui vient après les noires subies par la faute du Macccarthysme . Pourtant, les débuts de Trumbo à Hollywood avaient été plutôt réussis, l’ancien journaliste s’étant reconverti en un scénariste très recherché. Ainsi, entre 1935 et 1947, il signe de nombreux succès, parmi lesquels A aan to remember (Garson Kanin, 1938) et Un nommé Joe (Victor Fleming, 1943). Mais, Trumbo qui a toujours affiché ses idées de gauche, dans ses scénarios comme dans ses films, se retrouve à la fin des années 1940 sur la fameuse «liste des dix d’Hollywod ». Condamné pour avoir refusé de dénoncer les «communistes » du milieu du cinéma, il se retrouve incarcéré et voit son nom purement et simplement rayé des génériques des fils auxquels il a collaboré. A sa sortie de prison, mis au ban des studios, il survit tant bien que mal en signant des scénarios sous le nom de Robert Rich ou en les faisant signer par des prête-noms : Ian Mc Lellan Hunter, Millard Kaufman, Ben L. Perry, Sally Stubblefield ou Guy Endore . Il lui faut attendre dix ans pour émerger de l'anonymat. Heureusement, certains amis ne l’ont pas oublié. C’est le cas d’Otto Preminger pour lequel il écrira Exodus et Kirk Douglas qui lui permet de travailler sur le scénario de Spartacus réalisé par Stanley Kubrick en 1962. Johnny s'en va-t-en guerre sera le seul film qu’il tournera en tant que réalisateur. Son dernier grand succès en tant que scénariste sera « Papillon» en 1975. Cette même année, un an avant sa mort, Dalton Trumbo sera réhabilité par ses pairs d’Hollywood, en recevant du producteur Walter Mirisch, l'Oscar qu'il avait obtenu en 1957 sous le pseudonyme de Robert Rich pour le scénario du film « Les Clameurs se sont tues ».
Un roman, un film
Dalton Trumbo n’a écrit qu’un seul roman, Johnny Got his gun, publié le 3 septembre 1939 deux jours après le début de la Seconde Guerre mondiale qu’il adaptera, après bien des vicissitudes en 1971 pour ce qui sera son seul film, sorti en pleine guerre du Vietnam, ce qui rendit son propos d’autant plus dérangeant.
Notre avis
Peu de films ont donné au spectateur un tel sentiment de malaise. Et, pourtant, il s’agit bien là d’un chef-d’œuvre ! D’une histoire atroce, Trumbo a réalisé un film d’une force inouïe à partir de ce postulat simple : que peut-on faire quand on a perdu l’usage de tous ses membres et de presque tous ses sens (la sensibilité de la peau de son torse est la dernière chose qui relie Johnny au monde des « vivants ») ? Avec un minimum de moyens, Trumbo va droit à l’essentiel. Ainsi, pour dénoncer les horreurs de la guerre, deux plans suffisent : celui d’un soldat allemand empalé sur des barbelés et celui de l’explosion de l’obus qui va réduire Johnny à l’état de légume. Pas de voyeurisme, non plus dans ce film qui ne cède jamais à la facilité. Le corps de Johnny (où ce qu’il en reste…) est toujours montré recouvert d’un drap blanc. Le corps médical ne sort , lui, pas indemne, de ce film. Les chirurgiens ne voient en Johnny qu’un cobaye de laboratoire et restent insensibles à ses appels quand il trouve la force de leur demander en morse de l’euthanasier. Inoubliable aussi cette scène où Johnny voit en rêve un rat venir le dévorer et où il ne parvient plus à distinguer le cauchemar de la réalité. Mélangeant la couleur pour tout ce qui est rêves et souvenirs et le noir et blanc pour tout ce qui ramène Johnny à sa condition de mutilé, le film de Dalton Trumbo obtint le Prix du jury au Festival de Cannes 1971. Une salutaire réflexion sur la guerre et l’euthanasie, deux sujets qui, malheureusement, ne sont pas prêts de passer d’actualité dans un monde devenu absurde et où, comme le dit Trumbo les chiffres nous ont déshumanisés, où les morts sont transformés en héros et où les blessés sont condamnés à devenir des exclus.
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