Le Temps de la médecine :
La mort en face
L'actuelle définition de la mort résulte d'une évolution médicale et sociale. Si elle laisse la possibilité du prélèvement des organes tout en étant sans ambiguïté quant à l'irréversibilité du processus, elle n'est pas toujours bien comprise ni acceptée par les familles.
La mort encéphalique est l'un des rares diagnostics médicaux à être fixé par voie légale. Le décret n°96-1041 du 2 décembre 1996, relatif « au constat préalable au prélèvement d'organes de tissus et de cellules à des fins thérapeutiques et scientifiques », définit la mort comme la présence de 2 EEG nuls et aréactifs effectués à un intervalle minimal de 4 heures.
« Le développement des techniques de réanimation a conduit à faire évoluer, par nécessité, la définition de la mort », explique le Pr Sadek Beloucif (Amiens). On se rappelle qu'en 1959 Mollaret et Goulon définissaient la mort cérébrale, irréversible, comme un « coma dépassé ». Cette terminologie n'a pas été sans entraîner une certaine confusion et des controverses. Ce que soulignait en 2001 Alexander Capron, dans un éditorial du « New England Journal of Medicine » intitulé « La mort cérébrale bien définie et toujours non résolue ». C'est le comité ad hoc de la Harvard Medical School qui, en 1968, transférait le concept de mort depuis l'organisme entier vers un organe, le cerveau. Capron indique ensuite que le titre du rapport de ce comité, « Une définition du coma irréversible », suggère que la mort encéphalique pouvait être considérée comme une condition de vie limitée mais non pas de mort (tout comme la notion française de « coma dépassé »). Mais il y a tout de même maintenant une trentaine d'années que la circulaire ministérielle française de Jean-Michel Jeanneney notait que pour recourir au critère de mort il fallait reconnaître le caractère « destructeur et irrémédiable des altérations du système nerveux dans son ensemble ». Déjà la destruction des fonctions cérébrales, inaccessibles aux techniques de réanimation, devenait notre nouveau paradigme. Le décret français en est une suite logique.
Maintenant, analyse le Pr Beloucif, en cherchant à repousser les limites de la connaissance, le médecin a compris que le maintien du fonctionnement des organes vitaux (le cur, les reins, le foie...) pouvait ne pas être vain et permettre l'expression d'une solidarité nouvelle entre les humains et prolonger la vie d'autrui.
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