LES CORTICOIDES inhalés constituent la pierre angulaire du traitement de fond de l'asthme, et il convient de rechercher pour chaque patient la dose minimale efficace qui permet de contrôler l'asthme.
Les recommandations internationales préconisent d'ajuster les doses en se fondant sur les symptômes d'asthme, les besoins en bronchodilatateurs et les résultats des épreuves fonctionnelles respiratoires. Cependant, en pratique, il peut être difficile d'appliquer ces recommandations, en raison de la nature variable de la maladie, de la minimisation des symptômes par les patients et de la mauvaise collaboration des patients pour effectuer les tests à domicile.
Deux études ont apporté la preuve de principe que l'utilisation de marqueurs biologiques - précisément, l'hyperréactivité bronchique (provoquée par histamine ou métacholine) ou l'éosinophilie induite dans l'expectoration - pour ajuster les doses de corticoïdes inhalés permet d'obtenir de meilleurs résultats. Les difficultés techniques associées à ces mesures limitent toutefois leur emploi en pratique clinique.
L'inflammation bronchique.
Un autre marqueur biologique d'asthme, moins invasif et plus simple à effectuer, est la fraction expirée de monoxyde d'azote (Feno). Les valeurs de la Feno s'élèvent proportionnellement à l'inflammation bronchique ; une hausse de la Feno est associée à une détérioration du contrôle de l'asthme, tandis que sa valeur est abaissée, de façon dose-dépendante, par le traitement anti-inflammatoire.
Smith et coll. (université d'Otago, à Dunedine, Nouvelle-Zélande) ont évalué l'utilité de ce marqueur pour ajuster les doses de corticoïdes inhalés. Les résultats de leur étude sont publiés dans le « New England Journal of Medicine » et ont été décrits cette semaine au congrès de l'American Thoracic Society à San Diego.
L'étude randomisée, contrôlée par placebo, porte sur 97 patients asthmatiques (âgés de 12 à 73 ans) qui recevaient des doses modérées de corticoïdes inhalés (asthme léger à modéré).
Les patients ont été randomisés, en simple insu (les patients ignoraient leur groupe d'affectation), à l'une des deux méthodes suivantes d'ajustement des doses d'un corticoïde inhalé, le fluticasone :
1) méthode reposant uniquement sur les mesures de la Feno ;
2) méthode axée sur les recommandations internationales, les critères étant les symptômes, la fonction pulmonaire, et l'utilisation de bronchodilatateurs.
Dans une première phase, les patients ont été vus une fois par mois afin de déterminer, en fonction des mesures de la Feno ou de l'algorithme fondé sur les recommandations internationales (groupe témoin), la plus faible dose de corticoïde inhalé qui confère une stabilité de l'asthme. La dose était progressivement abaissée (750, 500, 250, 100 μg, puis placebo), jusqu'à l'obtention d'une valeur de la Feno supérieure à 15 ppb (parts par « billions », c'est-à-dire par milliard), ou jusqu'à la perte du contrôle de l'asthme selon l'algorithme du groupe témoin, point à partir duquel la dose de fluticasone était augmentée à nouveau progressivement jusqu'à ce que le taux de la Feno redevienne inférieur à 15 ppb, ou jusqu'à ce que l'asthme soit à nouveau contrôlé. Cela permettait de déterminer la dose optimale pour le patient.
Dans une seconde phase, les patients ont conservé cette dose optimale et ont été évalués tous les deux mois pendant un an. Si le contrôle de l'asthme se détériorait (selon l'algorithme fondé sur les recommandations dans le groupe témoin ou la valeur de la Feno dans l'autre groupe), la dose de fluticasone était augmentée, puis ajustée à la baisse, après un contrôle de l'asthme maintenu pendant au moins quatre mois.
A la fin de l'étude, ont constaté les investigateurs, un même contrôle de l'asthme a été obtenu dans les deux groupes, en terme de symptômes, d'utilisation de prednisone, de crises d'asthme, et de fonction pulmonaire ou d'inflammation des voies aériennes, mais avec une dose moyenne de fluticasone qui a été de 40 % plus faible dans le groupe Feno (350 μg/j) que dans le groupe témoin (641 μg/j).
« Avec l'utilisation des mesures de la Feno, les doses d'entretien des corticostéroïdes inhalés pourraient être significativement réduites sans compromettre le contrôle de l'asthme », concluent les auteurs.
D'autres études sont nécessaires.
« Cette étude nous adresse un message en temps opportun concernant l'utilisation des biomarqueurs afin d'améliorer le traitement de l'asthme chez chacun des patients », commente dans un éditorial associé le Dr Aaron Deykin, du Brigham and Women's Hospital de Boston. « Cependant, plus de recherches dans ce domaine sont nécessaires, et les résultats exigent d'être interprétés et appliqués avec prudence », prévient-il.
Ainsi, la dose optimale moyenne de fluticasone dans le groupe témoin est anormalement élevée ; cela pourrait s'expliquer par une application trop rigoureuse des recommandations. De plus, il est possible que la valeur de la Feno soit davantage corrélée au taux d'exposition aux corticoïdes plutôt qu'à l'inflammation des voies aériennes. Enfin, il reste à savoir si ces résultats, observés chez des patients qui ont un asthme léger à modéré, s'appliquent à des patients dont l'asthme est plus léger ou plus sévère.
Le Dr Deykin recommande de conduire des études en double aveugle d'ajustement des doses avec l'utilisation de divers biomarqueurs, comparés à des réductions standardisées de dose uniforme et au traitement fondé sur les recommandations.
« New England Journal of Medicine », 26 mai 2005, pp. 2163 et 2233.
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