Données de l'Insee sur la démographie

La France qui fait boom

Publié le 15/05/2005
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LA FRANCE de 75 millions d'habitants, c'est pour dans 45 ans, à en croire l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). La projection n'est pas nouvelle. Réalisée à partir du recensement de 1999 et de l'état civil du moment, elle figurait au côté d'un « scénario » dit « central », caractérisé par un taux de fécondité de 1,8 enfant par femme, prévoyant 64 millions de femmes et d'hommes en 2050. Cinq ans plus tard, ce « scénario super haut », à 75 millions d'habitants, devient « probable », dit au « Quotidien » Gilles Pison, directeur de recherches à l'Institut national des études démographiques (Ined). Il se trouve que les années 2001 à 2004 ont été annonciatrices, en quelque sorte, du scénario en question, hormis l'année 2003, avec ses 15 000 décès supplémentaires pour cause de canicule.
En effet, en quatre ans, la fécondité s'est élevée à 1,9 enfant par femme, le solde migratoire (entrées moins sorties) annuel à 100 000 (au lieu de 50 000 antérieurement), et l'espérance de vie a gagné un an. Enfin, 2004 est arrivé avec un gain d'espérance de vie de 10 à 12 mois par rapport à 2002. On ne peut pas parler de prédiction, mais d'un scénario désormais crédible, commente le démographe de l'Ined.

Les Français rajeunissent la vieille Europe.
Alors que le Vieux Continent perd des couleurs, l'Hexagone fait boom. En 2003, la population des 25 pays de l'UE a progressé de 216 000 habitants. Dans ce total, la contribution de la France est de 211 000.
La croissance française, soulignent les démographes, empruntent pour un quart à l'immigration et pour l'essentiel à l'excédent naturel de la population. Elle est qualifiée d' « unique », en raison d'un rythme annuel de 0,39 % entre 1990 et 1999, puis de 0,58 % de 1999 à 2003 et de 0,68 % en 2004.
Avec 75 millions d'habitants, contre 60,2 millions en 2004, la France prendrait la tête de l'Union européenne en 2050. L'Allemagne, actuellement forte de 82,5 millions d'habitants, passerait en deuxième position, avec 70,8 millions, le Royaume-Uni resterait stable à 58,9 millions d'habitants (59,6 en 2004) et l'Italie chuterait de 58,9 millions d'habitants à 43 millions. Sur un plan planétaire, l'Inde dépasserait la Chine, 1 572 000 000 (1 086 000 000 en 2004), contre 1 462 000 000 (1 300 000 000), tandis que les Etats-Unis gagneraient 14 millions d'habitants pour s'approcher des 400 000 0000. Dans ce contexte, à défaut de pouvoir assurer le plein-emploi, les autorités ont engagé une réflexion sur ce que devrait être une politique adaptée à la nouvelle donne démographique en matière d'aménagement du territoire et de logement. Un colloque sur ce thème, à l'initiative de Gille de Robien, s'est tenu au Sénat le 12 mai.
Certes, tous les démographes ne lisent pas dans l'avenir de la même manière. Il y a quelques bémols. Certains notent que, à travers l'histoire des deux derniers siècles, les périodes d'embellie démographique et de déclin se succèdent. De 1974 à la fin des années 1980, la France s'est montrée frileuse. Quoi qu'il en soit, les indicateurs du recensement de 2004 prêtent à l'optimisme. Les campagnes, par exemple, ne se vident plus, à l'exception de la région Champagne-Ardenne. Les localités de moins de 2 000 habitants s'ouvrent aux constructions nouvelles. Entre 1999 et 2004, elles ont accueilli le tiers de l'ensemble des logements neufs. Pourtant, il y a peu, les chantres du natalisme à tout crin criaient au loup : « La France a froid, la France se ride ! »

> PHILIPPE ROY

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7749