Prise en charge des troubles moteurs

L’activité physique, thérapeutique à part entière dans le Parkinson

Publié le 18/10/2010
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Handicap fonctionnel

La maladie de Parkinson affecte 2 % de la population après 65 ans et 4 % après 80 ans, soit une incidence de 10 à 15/10 000 dans les pays occidentaux. Cette pathologie est à l’origine de déficiences notamment motrices (bradykinésie, rigidité, troubles du contrôle de la posture, hypométrie, tremblement) entraînant un handicap fonctionnel progressif altérant rapidement la qualité de vie et l’autonomie du patient.

La découverte de la lévodopa (années 1960) a permis d’améliorer ces symptômes moteurs (effet moindre sur les troubles de l’équilibre et la marche). Cependant les thérapeutiques dopaminergiques seules s’avèrent incapables de contrôler toutes les déficiences et sont même à l’origine d’effets indésirables non négligeables (dyskinésies, fluctuations d’efficacité). D’autres thérapeutiques pharmacologiques ou neurochirurgicales se sont développées mais elles sont à ce jour insuffisantes et non dénuées de risque.

Malgré la faiblesse méthodologique des études scientifiques, l’activité physique, par une prise en charge spécialisée adaptée, est un atout majeur pour la prise en charge des troubles moteurs du patient atteint d’un syndrome parkinsonien typique ou atypique. Elle aurait même un effet neuroprotecteur. Cependant malgré son efficacité, le recours à l’activité physique en tant que thérapeutique reste sous-utilisé, moins de 30 % des patients ambulatoires en bénéficient.

Laquelle et pour qui ?

Quel type d’activité physique, et pour quels patients ?

L’activité physique doit être proposée à tous les patients parkinsoniens mais elle doit être adaptée au stade clinique. Deux groupes se distinguent : ceux ayant conservé leur capacité de se lever et de déambuler avec peu de troubles cognitifs (groupe A), et ceux ayant des difficultés à se mouvoir seuls avec des troubles cognitifs nécessitant le recours à un tiers (groupe B). Différentes prises en charge validées doivent se combiner.

Groupe A 

Renforcement musculaire (notamment des membres inférieurs) dans le but d’améliorer l’équilibre, les ajustements posturaux et ainsi limiter le risque de chute. Ce renforcement est possible par la réalisation d’exercices contre résistance croissante. Il permet également de limiter la rigidité musculaire.

Exercices globaux aérobiques dont l’objectif est d’améliorer l’absorption et l’utilisation de la lévodopa majorant donc la période « on » (lévodopa ayant surtout une efficacité sur les déficiences motrices). La marche en est améliorée : longueur du pas, vitesse de marche. Ce travail est réalisé sur tapis de marche ou cycloergomètre en séance d’une heure environ.

Stratégies attentionnées utilisant des signaux verbaux ou visuels, des stimulations rythmiques acoustiques ou visuelles permettant d’améliorer les capacités fonctionnelles notamment de déambulation. Il s’agit d’augmenter l’attention du patient vis-à-vis d’une tâche motrice par des stimulations diverses et répétées.

Exercices de mobilisation axiale active dans le but d’améliorer la mobilité du tronc et de faciliter le travail des membres supérieurs. Cette mobilisation peut se réaliser par des exercices de lancers de ballon, des travaux sur cible ou en hauteur.

D’autres techniques moins spécifiques telles que les étirements musculaires afin de limiter la raideur musculaire, la marche en terrain plat et accidenté, la balnéothérapie, la musicothérapie peuvent être utilisées. De récentes études montrent un intérêt particulier pour la danse comme alternative à l’exercice physique.

Entraînement moteur asymétrique afin de rééquilibrer l’asymétrie du syndrome extrapyramidal en travaillant l’ouverture et la fermeture des segments corporels.

Groupe B

Rendre conscient un mouvement automatique : le patient doit décomposer les étapes motrices pour réaliser un geste (marche : « gauche-droite-gauche »). Un tiers (thérapeute mais surtout entourage familial et social) peut aider à verbaliser ces gestes en s’assurant de toujours respecter le même schéma moteur.

Éviter les doubles tâches : toute tâche intercurrente (parler, le bruit de la ville…) ou distraction (porter un objet dans ses mains) aggrave la performance motrice du parkinsonien.

Adapter le domicile est essentiel pour maintenir le plus longtemps possible une autonomie fonctionnelle et ainsi permettre une activité minimale en sécurité. Par exemple, les fauteuils ou siège de toilette peuvent être surélevés afin de diminuer l’énergie nécessaire pour le lever ; le domicile peut être libéré des objets superflus (tapis, meuble de décoration).

Les aides techniques à la marche peuvent être utiles mais doivent être validées par le thérapeute afin que leur utilisation n’augmente pas le risque de chute par effet double tâche.

Quand et comment

Quand prescrire une activité physique adaptée et dans quelles conditions la réaliser ?

L’efficacité d’une activité physique n’est validée que si elle est réalisée précocement et quotidiennement. De nombreuses études ont démontré l’importance de débuter son apprentissage dès l’annonce du diagnostic (puisque basé sur des signes cliniques) avec un thérapeute (kinésithérapeute) qui, après avoir enseigné les exercices à réaliser, s’assurera de la bonne compréhension afin de permettre au patient de poursuivre leur réalisation quotidiennement en sécurité (temps spécifique pour la rééducation ou par les loisirs). Les exercices pourront être revalidés régulièrement par des stages de rappel (au cabinet, en hôpital de jour ou courte hospitalisation). La réalisation de l’activité physique est conseillée en période « on » après la prise du traitement notamment pour potentialiser ses effets.

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Dr VALÉRIE LECLERCQ-DONTGEZ Médecine physique et de réadaptation CHU Amiens Sud

Source : Le Quotidien du Médecin: 8838