LORSQUE, le 31 mai dernier, François Goulard, ministre délégué à l’Enseignement supérieur et à la Recherche, a présenté en Conseil des ministres les «nouveaux instruments de la politique de la recherche», il pensait «répondre aux attentes exprimées par la communauté des chercheurs» en engageant «une profonde et ambitieuse rénovation de la recherche française». «Plusieurs instruments nouveaux garantiront la cohérence de la politique de la recherche et amplifieront la dynamique existant au sein de la communauté de la recherche», promettait-il . Et d’annoncer que, pour accompagner la création du Haut Conseil de la science et de la technologie et de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Aeres), une «réforme importante de l’administration centrale du ministère chargé de la Recherche et de l’Enseignement supérieur a été réalisée».
Boycott.
Pourtant, aujourd’hui, les chercheurs semblent ne pas l’entendre de cette oreille. Ils abordent la rentrée très mécontents des décisions prises par le gouvernement pendant l’été. Et l’expriment par la voix de leurs syndicats qui, pour l’occasion, s’unissent dans la fronde.
Mercredi matin, ils ont boycotté le comité technique paritaire (lieu de discussion, composé pour moitié de représentants des syndicats, pour moitié de l’administration). Deux jours avant, le gouvernement avait présenté au Cneser (Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche) un décret relatif à l’organisation et au fonctionnement de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Aeres). C’est cette Agence à venir qui est particulièrement dans le collimateur. «Au lieu de valider les instances d’évaluation existantes, le projet de décret leur substitue une superstructure complexe et obligatoire», expliquent les syndicats dans une déclaration commune.
«Ce texte ignore certains des principes fondamentaux des évaluations contradictoires, plurielles et disciplinaires à l’oeuvre dans le champ des organismes de recherche et de l’enseignement supérieur. L’évaluation doit permettre un suivi et ne pas être seulement une expertise ponctuelle.»
Retour en arrière.
Ce sont d’abord les modes d’évaluation qui sont mis en cause. «L’Agence compte harmoniser l’évaluation, suivant la même philosophie alors que, jusqu’à présent, il existait autant d’évaluations qu’il y a d’établissements», explique un représentant de Force ouvrière. «Evaluer par thématiques et non plus par disciplines sera forcément le fruit de choix politiques.»
Par ailleurs, les futurs « évaluateurs » (ils seraient 5 000) seraient non plus élus, mais nommés par le gouvernement. «Il s’agit d’un retour en arrière considérable, c’est un putsch, intellectuellement parlant. Le retour non seulement vers le mandarinat, mais aussi l’administration autocratique de la recherche sur les personnes et sur les sujets (les thèmes). »
Lundi, le Cneser a rejeté le texte avec 28 voix contre 20 favorables. Le comité paritaire, annulé mercredi, est convoqué de nouveau vendredi prochain et, cette fois, il siégera même si le quorum n’est pas atteint. «Le gouvernement a bien compris que cette Agence représente un formidable outil pour piloter le système», analyse un membre de la CGT-Inra (Institut national de la recherche agronomique). C’est la raison pour laquelle il tente de passer en force.»
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