REALISEE en 1996 par Nicolas Joël, cette production dans trois décors de Nicolas de Lajartre avec les costumes de Gérard Audier, avait eu comme interprète de trois rôles féminins la grande Alexandrina Milcheva. Elle revient aujourd’hui, dix ans après, reprise par Stéphane Roche, assistant de Nicolas Joël, dirigée par Marco Armiliato. Devant un tel art du répertoire qui fait le succès de cette maison, on reste admiratif et on déplore tout le gaspillage parisien, la débauche de productions d’oeuvres d’intérêt très limité qui disparaissent totalement après huit représentations, sans avoir même rempli les salles…
Quelle aubaine pour les spectateurs que ce « Trittico » rêvé par Puccini et réussi non sans mal pour réunir trois livrets obéissant à ses impératifs théâtraux ! Unissant le sordide avec « Il Tabarro » (La Houppelande d’après Didier Gold), le sacré avec « Suor Angelica » et le comique grinçant avec « Gianni Schicchi » inspiré par un verset de « l’Enfer » de Dante, cette oeuvre tricéphale occupe une soirée entière, mais rares sont les théâtres à les monter ensemble ; celui ayant la faveur générale et souvent apparié, thématiquement ou non, à un autre opéra en un acte, étant « Gianni Schicchi ».
La distribution réunie à Toulouse est exemplaire en ce qu’elle comporte de fortes personnalités autant pour les grands rôles que pour les petits, à la limite de la silhouette, mais qui ont tant d’importance, autant dans « Tabarro » que dans « Schicchi ».
Une soirée lyrique de rêve.
Parmi les vedettes, l’Espagnol Juan Pons est un phénomène de longévité dans sa profession. Autant dans la gravité du batelier Michele du « Tabarro » que dans la verve comique de « Gianni Schicchi », il impose une santé vocale et une présence dramatique époustouflantes.
La jeune soprano géorgienne Tamar Iveri est déchirante de beauté et de simplicité dans les tourments de la soeur Angelica, et l’affrontement avec la très autoritaire, scéniquement comme vocalement, Principessa de la mezzo slovène Marjana Lipovsek est un grand moment de théâtre.
Dans les seconds rôles, il faut citer Giorgetta du « Il Tabarro » de la Roumaine Doina Dimitriu, Anne-Catherine Gillet que l’on vient d’applaudir sur cette scène en Poppée, qui campe avec charme le petit rôle de Lauretta (et quel petit rôle avec son seul air « O mio babbino caro » mondialement connu !), et son fiancé Rinuccio chanté avec une santé vocale parfaite par Ismaël Jordi que l’on attend la saison prochaine au Châtelet en Chanteur de Mexico. Il faut citer aussi Cinzia De Mola, hallucinante de vérité dans la vieille Zita avare de « Schicchi » et tant d’autres anonymes dans la foule des religieuses d’« Angelica » ou de la famille de « Schicchi », tous indispensables au fonctionnement dramatique de l’oeuvre.
Stéphane Roche a travaillé ce « Trittico » dans toutes ses dimensions avec une justesse psychologique, une précision théâtrale et une virtuosité impeccables. Marco Armiliato a tiré du magnifique Orchestre national du Capitole des sonorités, des couleurs, des accents merveilleux, fouillant cette somptueuse musique dans tous ses recoins pour en donner une interprétation à la hauteur du travail scénique. Une soirée lyrique de rêve dont le souvenir se prolongera longtemps.
Capitole de Toulouse : 05.60.22.24.30 et www.theatre-du-capitole.org. Prochain spectacle : « les Maîtres chanteurs de Nuremberg » de Wagner du 7 au 17 juin. Le « Triptyque » sera retransmis sur France Musique le 24 juin à 19 h 30. L’Orchestre national du Capitole sera en concert au Théâtre des Champs-Elysées le 24 mai à 20 h sous la direction de son directeur musical Tugan Sokhiev.
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