UNE ETUDE a évalué le risque des cancers non classant sida chez les patients séropositifs depuis le début des traitements Haart (1996). Dans une base de données comportant les dossiers de 57 428 hommes et 19 597 femmes, 678 cancers ont été analysés (base DMI2). Comparativement à la population générale, le risque est multiplié par deux à trois.
• Cancer pulmonaire
Le cancer pulmonaire n'est pas considéré comme « événement classant sida ». Pourtant, depuis 1996, on observe une tendance à l'augmentation du risque et notamment en relation avec les Haart, sans que l'on comprenne très bien pourquoi, explique Christos Chouaid (hôpital Saint-Antoine, Paris). Selon les études, le risque varie de 1 à 6,5 %. Différents facteurs s'associent. Le taux des fumeurs est de 90 %, ce qui est très élevé. On compte 57 % de gros fumeurs (contre 33 % dans la population générale). La population VIH+ a, en raison de l'immunodépression, une susceptibilité accrue à l'effet cancérogène. Le cancer pulmonaire apparaît aussi plus tôt : à 45 ans en moyenne, contre 60 à 65 ans dans la population générale. Il n'y a pas de différences en termes de présentation clinique. Les adénocarcinomes sont plus fréquents. Le pronostic du cancer pulmonaire dans le contexte du VIH est redoutable. Les taux de survie à un, deux et dix ans sont inférieurs à ceux de la population générale. La toxicité accrue des traitements chimiothérapiques (en particulier hématologique) et radiothérapiques, avec une toxicité additive avec les antirétroviraux, joue également. On tient compte de l'ensemble de ces éléments dans la prise en charge des patients, explique le Dr Chouaid. Quoi qu'il en soit, tout cela montre l'urgence de mettre en place des programmes adaptés d'aide au sevrage tabagique.
• Lymphomes
« Il existe une activation des lymphocytes B tout au long de la maladie VIH, indique François Boué (hôpital Antoine-Béclère, Clamart), soit directement, soit indirectement par l'activation du système immunitaire. » Ce qui explique que le risque général de développer un lymphome non hodgkinien (LNH) associé au VIH est deux cents fois plus élevé qu'en dehors du contexte VIH. Il est multiplié par vingt pour la seule maladie de Hodgkin. Il est d'autant plus élevé que les CD4 sont bas. Les lymphomes restent la principale cause de mortalité des patients infectés par le VIH, bien avant les infections opportunistes. Toutefois, il existe une baisse de l'incidence des lymphomes, associée à l'amélioration du statut immunovirologique apportée par les traitements, mais cela n'est pas vrai pour la maladie de Hodgkin. A côté de cela, une bonne nouvelle, la survie des patients souffrant d'un LNH s'est considérablement améliorée. Avant 1993-1994, la médiane de survie était de six mois ; en 1997-1998, elle était de vingt et un mois. La maladie conserve son profil - survenue avant 60 ans, contrairement à la population générale, masse tumorale plus importante et plus souvent abdominale qu'axillaire -, mais on voit maintenant moins de formes immunoblastiques. Dans le contexte du VIH, les bénéfices de la chimiothérapie standard « Choop » (cyclophosphamide, doxorubicine, vincristine et prednisone) associée à un anticorps monoclonal ciblant les lymphocytes B (rituximab), sont tout aussi importants qu'en dehors. Un essai Anrs montre que la mise en rémission complète est de 77 %, équivalente à celle des plus de 60 ans dans la population générale. « On peut traiter les lymphomes associés au VIH comme on traite les patients de 60-65 ans », précise F. Boué. Les lymphomes cérébraux primaires, dont l'incidence diminue depuis 1996, sont devenus rares.
« Depuis l'intervention des Haart, l'incidence des syndrome de Kaposi et de certains LNH a diminué », note Dominique Costagliola (Inserm U720). Mais on s'interroge sur un rôle cancérogène des antirétroviraux dans le cas de la maladie de Hodgkin.
Journée de réflexion scientifique TRT-5 (groupe interassociatif traitements et recherche thérapeutique).
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