?Tous les syndicats de libéraux étaient montés au créneau pour s’élever contre la taxe sur les feuilles de soins papier (FSP). Mais c’est finalement, le plus discret et le plus petit de tous qui pourrait réussir à faire annuler la « contribution forfaitaire » de 50 centimes par feuille de soins non télétransmise. Le syndicat des médecins d’Aix-en-Provence (SMAER) emmené par le jovial Dr Gilles Vidal avait, en effet, déposé en toute discrétion un recours contre la décision du directeur de l’UNCAM. Celui-ci a été examiné par le Conseil d’Etat le 2 mars dernier et le commissaire du gouvernement (bien mal nommé puisqu’au Conseil d’État, il joue plutôt le rôle d’un avocat général) a requis une annulation pure et simple de la taxe.
À Aix-en-Provence, le Dr Vidal savoure son succès même si la décision finale du Conseil d’État ne sera connue que dans quelques semaines. « La requête du syndicat des médecins d’Aix à 90 % de chances d’aboutir », estime son secrétaire général. Une analyse peut-être un brin optimiste. Il demeure que les juristes estiment qu’au Conseil d’État, l’avis du commissaire du gouvernement est suivi dans deux cas sur trois. « S’il devait y avoir une nouvelle décision de taxation des FSP, nous l’attaquerions aussi?», ajoute le Dr Vidal. «?La loi est tellement mal faite que, quelle que soit la décision que publierait le directeur de l’UNCAM, elle serait attaquable?», s’amuse son avocat, Me Thibaud Vidal.
Dans les faits, c’est vraiment pour une question de forme que la décision de l’UNCAM risque d’être retoquée. L’article 53 de la loi Bachelot, votée en juillet 2009, enjoignait les partenaires conventionnels à s’entendre sur les modalités d’application de la taxe avant la fin de l’année, faute de quoi, il revenait au directeur de l’UNCAM d’intervenir. L’article donnait compétence à Frédéric Van Roekeghem pour fixer le montant de la taxe, mais pas modifier les conditions de la taxation. Ce qu’il fit en réalité?: dans sa décision publiée en mai, il créait un seuil de 25 % de FSP au-delà duquel s’applique la taxe et prévoyait de sortir du calcul les soins donnés aux bénéficiaires de l’AME ou aux nourrissons de moins de trois mois. Des précisions qui dépassaient ce qu’il lui était permis de faire et qui relève en droit de « l’excès de pouvoir?».
Le SMAER conteste aussi le montant de la taxe. « Les médecins perçoivent une aide de 0,07 euros par feuille de soins télétransmise et paye une contribution forfaitaire de 0,50 euros dans le cas contraire, relève Me Vidal. Vu la différence entre les deux montants, on ne devrait pas parler de contribution forfaitaire mais plutôt de sanction pécuniaire. »
Trois hypothèses pour la suite
Cet épisode inattendu risque de donner un nouveau tournant à l’affaire. En février dernier, une consigne de la CSMF de répercuter la taxe, entrée en vigueur depuis le 1er janvier, a été révélée au grand public via l’AFP. Le conseil de l’UNCAM avait alors vivement réagi. Quant au ministre de la Santé, Xavier Bertrand, il a été obligé d’expliquer à l’Assemblée nationale qu’il n’était « pas question?» de taxer les patients avant de préciser qu’il « n’y aurait pas d’application aveugle de la taxe?».
Après avoir reculé sur les contrats santé solidarité et les déclarations de congés, le gouvernement avait voulu donner une apparence de fermeté en ne cédant pas sur toutes les revendications. Trois hypothèses sont désormais possibles: le gouvernement demande à l’Assurance-maladie de renoncer à la taxe, il maintient la taxe mais sans plus aucune exonération ni seuil ou, enfin, et c’est le plus probable, la loi est réécrite via la proposition de loi Fourcade, en cours d’examen au Sénat, pour ne plus poser de problème de droit et calmer le jeu avec la profession en assouplissant le dispositif.
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