À rebours de la position exprimée par le ministre de la Santé à l’Assemblée nationale, le Comité consultatif national d’éthique s’est prononcé ce mercredi une nouvelle fois en faveur du transfert d’embryons dans l’utérus de la mère après le décès du père. Cette demande rarissime mais aussi ancienne que l’aide médicale à la procréation a connue des réponses judiciaires variables jusqu’à ce que la loi de bioéthique de 1994 mette un terme à ces hésitations en interdisant définitivement la possibilité. Pourtant le CCNE avait répondu par l’affirmative à la question dès 1993 (avis n° 40). Une position réaffirmée et précisée en 1998 (avis n° 60) et en 2000 (avis n° 67). Ainsi encore une fois, les avis divergent entre le CCNE et le gouvernement. L’autorisation du transfert d’embryons post-mortem n’apparaissait pas dans le projet de loi de révision de bioéthique du gouvernement au départ. Mais cette disposition a été rajoutée par voie d’amendement, contre l’avis du gouvernement, à l’Assemblée nationale. Dans cette hypothèse, le transfert serait possible au plus tôt si mois après le décès du père et au plus tard dix-huit mois après et nécessiterait l’autorisation de l’agence de biomédecine. Des précisions pour parties semblables aux recommandations du CCNE. « Un délai de réflexion minimum devra être respecté après le décès, de façon à ce que la décision de la femme ne soit pas prise dans un moment où elle est dans un état de grande vulnérabilité » indique ainsi cet avis n° 113. Pendant cette période, le CCNE préconise également qu’un « accompagnement » devra être proposé à la patiente pour « lui permettre d’envisager tous les aspects psychologiques, juridiques, sociaux et médicaux de sa décision ». Il souligne aussi que des « modifications devront être apportées à notre droit de façon à ce que la filiation paternelle de l’enfant soit assurée ». La dernière condition est que l’homme « aura dû, de son vivant exprimer sa volonté en donnant son consentement exprès au transfert – après son décès- d’un embryon cryoconservé ». Cet avis semble avoir fait relativement consensus au sein du CCNE, seuls deux de ces membres ayant véritablement exprimé des réserves. « Ce qui a véritablement emporté la décision est le sort réservé aux embryons après le décès de l’homme, a expliqué la juriste Danièle Siroux, rapporteur de l’avis. Aujourd’hui dans ces situations, la femme est obligée de prendre une décision impossible : demander la destruction de l’embryon, le donner à la recherche ou le confier à un autre couple engagé dans un processus d’AMP ». Une situation différente de celle où un homme qui avait fait congeler ses gamètes décède : les paillettes sont alors systématiquement détruites. Il peut néanmoins arriver que la veuve de l’homme décédé demande une insémination artificielle avec le sperme de son époux décédé. Après un long débat, le CCNE ne s’est pas prononcé en faveur de cette autorisation même si un projet parental était effectivement engagé par le couple. Dans les pays européens où le transfert d’embryon post-mortem est autorisé (Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni et Espagne), l’insémination post-mortem, situation de fait beaucoup plus fréquente, l’est également. Il n’existe pas de chiffre officiel en France sur les demandes de transfert d’embryons post mortem. Mais le CCNE estime qu’il y aurait un ou deux cas par an. Le texte doit être à présent examiné par le Sénat à partir du 29 mars. Mais a priori c’est la dernière fois que les lois de bioéthique seront réexaminées de manière quinquennale. C’est aussi pourquoi, le CCNE a décidé de créer en son sein une commission permanente de réflexion sur assistance médicale à la procréation, domaine de la médecine où les progrès techniques posent le plus souvent de nouvelles questions éthiques.
Le CCNE dit oui aux transferts d’embryon post-mortem
Publié le 09/03/2011
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Source : lequotidiendumedecin.fr
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