Si les corticoïdes, les œstroprogestatifs et certains diurétiques restent les classes thérapeutiques le plus souvent incriminées dans les hyperglycémies iatrogènes, d’autres molécules, d’utilisation plus récente, ont récemment été mises en cause comme l’ont expliqué les Prs Jean François Gautier (Paris) et Pierre Gourdy (Toulouse) lors d’un atelier dédié aux diabètes iatrogènes
Des soupçons pèsent notamment depuis peu sur les inhibiteurs de tyrosine kinase ; plusieurs cas de diabète ayant été observés chez des patients traités par ces anti-cancéreux. En fait, « faute de littérature sur ce sujet entièrement nouveau pour nous, les choses ne sont pas encore très claires » reconnaît le Pr Jean François Gautier. Cependant, les données issues des études de phases III de Glivec (imatinib) et de Tasigna ( nilotinib)) montrent que ces produits entraînent des modifications biologiques avec augmentation des lipases, des transaminases, etc… mais aussi de la glycémie. Ainsi, 38 % des patients sous tasigna 300mg ont une augmentation de la glycémie dont 6 % de grade 3 et 4. Même constat pour l’imatinib « dont on a dit plutôt jusqu’à présent que ça améliorait la sensibilité à l’insuline » rappelle le Pr Gauthier. En réalité on observe une augmentation de la glycémie chez 22 % des patients traités .
Cet effet des inhibiteurs de tyrosnine Kinase sur la glycémie pourrait s’expliquer par leur impact sur la phosphorylation dont on sait qu’elle joue un rôle majeur dans la voie de signalisataion de l’insuline. Mais pour le moment rien n’a été encore démontré et des études, à l’image de celle débutée dans le service du Pr Gautier, sont encore nécessaires pour mieux comprendre le phénomène.
Décompensations cétosiques
Suspectée depuis plus longtemps, la relation neuroleptiques atypiques / hyperglycémie est aussi mieux documentée. Aujourd’hui plusieurs études ont clairement démontré le lien entre ces médicaments et le risque de surpoids. Avec par exemple, une prise de poids de 7 % retrouvée, dès 4 à 12 semaines de traitement, chez près de la moitié (47 %) des patients sous olanzapine. Concernant le risque de diabète induit, l’analyse de littérature montre « que les molécules de seconde génération ont globalement un impact beaucoup plus marqué [sur la glycémie] et ce de manière cohérente entre les différentes cohortes » résume le Pr Gourdy. Avec toutefois des différences selon les molécules, le risque d’hyperglycémie semblant plus marqué sous clozapine et olanzapine.
Plusieurs éléments ont été avancés pour expliquer ce lien antre psychoses, neuroleptiques et diabète. « Il y a eu des discussions quand à d’éventuelles prédispositions génétiques communes aux maladies psychotiques et au diabète » rappelle le Pr Gourdy mais cela reste hypothétique. « Par contre ce qui semble certain c’est qu’il y a un effet direct des neuroleptiques vis-à-vis du développement de la masse grâce et de l’insulinorésistance » rapporte le Pr Gourdy. Un impact direct sur les cellules bêta a aussi été évoqué ; des modèles animaux ayant mis en évidence une sidération fonctionnelle et réversible de la cellule bêta sous olanzapine.
Avec à la clef, deux tableaux cliniques de diabète induit par les neuroleptiques bien distincts. Le plus fréquent ressemble à un DT 2 d’installation assez progressive, très relié à l’impact des neuroleptiques sur la masse grasse et l’insulino résistance. Plus rarement, le diabète induit peut mimer un DT 1, avec plusieurs cas de décompensations inaugurales sur un mode cétosique rapportés dans la littérature, traduisant alors un impact pancréatique dominant. « C’est important d’avoir ce type de tableau en tête souligne le Pr Gourdy et de savoir l’évoquer dans l’urgence chez un patient psychotique traité par neuroleptique de seconde génération ».
En dehors de l’urgence, la prise en charge d’un diabète survenant sous neuroleptiques atypiques a récemment été codifiée par des recommandations françaises (voir encadré).
L’intérêt de la metformine dans ce cas de figure a été démontré par plusieurs travaux de même que l’efficacité des mesures hygénodiététiques.
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