Le syndrome d’apnée du sommeil (SAS) ou syndrome d’apnée-hypopnée est une maladie très hétérogène avec des phénotypes de patients très divers, allant du sujet jeune et mince présentant une rétrognathie à l’obèse atteint de nombreuses comorbidités. Son diagnostic repose sur l’index d’apnée-hypopnée (IAH ≥ 5), dont la valeur en qualifie la sévérité. Mais on sait que l’IAH est peu lié à la morbimortalité. Résultat, globalement les comorbidités sont de bien meilleurs prédicteurs de mortalité.
On suspectait déjà que la quantité de désaturations influait sur le pronostic cardiaque. Une analyse menée sur deux vastes cohortes de SAS (MrOS, rassemblant près de 3 000 hommes, et SHHS, de plus de 5 000 sujets) vient le confirmer : la charge hypoxique nocturne ou quantité d’hypoxies, définie par l’aire sous la courbe des désaturations (SaO2 inférieur à 90 %) divisée par le temps de sommeil, est fortement corrélée au risque cardiovasculaire (1). L’impact est quasi dose-dépendant sur la mortalité cardiaque. Dans les deux cohortes, les sujets dans le plus haut quintile ont une mortalité cardiaque deux fois plus élevée que celle des sujets dans le premier quintile. En pratique clinique, on doit donc être très attentif non seulement au score de gravité de l’IAH, mais aussi à la quantité d’hypoxies, systématiquement recueillie lors du diagnostic.
Ce résultat ouvre par ailleurs des perspectives en matière de dépistage. On estime aujourd’hui que près d’un milliard d’individus souffrent de SAS – en France, un million sont déjà sous pression positive continue (PPC). Et l’on sait que le SAS est un modulateur de réponse au traitement ainsi qu’un élément de gravité en cas d’HTA, de fibrillation auriculaire (FA)…, ce qui supposerait en théorie de dépister un grand nombre de sujets. Or, pratiquer une oxymétrie nocturne et en analyser les paramètres est aisé, et automatisable, alors qu'au contraire l’analyse des apnées-hypopnées exige de l’expertise. L’oxymétrie est d’ailleurs le critère diagnostique au Royaume-Uni, quand en France on se base sur l’IAH. Sans modifier les critères diagnostiques, on pourrait donc imaginer utiliser à l’avenir, dans les populations à risque – souffrant d’HTA, de FA… –, l’oxymétrie en amont pour le dépistage, et réserver la polysomnographie à la confirmation du diagnostic chez les sujets présentant un score de désaturation supérieur à 3 % associé à plus de 15 désaturations par heure.
Entretien avec le Pr Jean-Louis Pépin (CHU de Grenoble)
(1) Azarbarzin A et al. The hypoxic burden of sleep apnoea predicts cardiovascular diseased-related mortality: the Osteoporotic Fractures in Men Study and the Sleep Heart Health Study. Eur Heart J. 2018 Oct 30. DOI :10.103/eurheartj/ehy624
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