PLUS DE TROIS ANS après son installation par Bernard Kouchner, le Comité national technique de l'échographie de dépistage prénatal présidé par les Prs Claude Sureau et Roger Henrion s'apprête à rendre son rapport au ministre de la Santé.
Révélée par le journal « la Croix », cette somme de 175 pages va bien au-delà des objectifs initialement fixés par son commanditaire - promouvoir une politique d'assurance de qualité de l'échographie de dépistage ; développer une stratégie d'information du public sur l'intérêt et les limites de l'échographie foetale. Les échographistes en crise (« le Quotidien » du 24 février et du 19 avril) espèrent bien qu'elle va convaincre Philippe Douste-Blazy de la nécessité d'une intervention de sauvetage.
Point de départ des réflexions du comité : l'état des lieux de l'échographie foetale. Le tableau, sans être catastrophique, n'est pas satisfaisant. Car le rapport note des « disparités en matière de performance de l'échographie ». D'une région à une autre, précise-t-il, « la sensibilité (de diagnostic) est très différente selon l'anomalie considérée. Certaines ne sont jamais détectées, d'autres le sont pratiquement toujours ».
Liés à l'expertise des opérateurs et à la qualité de leur matériel, les écarts peuvent être corrigés par une harmonisation des pratiques - ce qui passe, selon les experts, par la formation initiale et continue ainsi que par la justification d'un niveau de pratique tant qualitatif que quantitatif - et par un contrôle du matériel utilisé - des critères provisoires sont arrêtés (l'échographe, par exemple, doit avoir moins de sept ans et disposer du doppler pulsé et d'un ciné-loop d'une capacité d'au moins 200 images). Le travail des échographistes en réseau est également prôné par le comité pour lequel « le praticien effectuant l'examen de dépistage doit être en relation avec des confrères susceptibles de donner un avis dans un délai très bref ».
Traumatisme.
Au chapitre de l'offre de soins, le rapport des Prs Sureau et Henrion confirme la « crise » que traverse une profession notamment « traumatisée » par l'affaire Perruche (1). Désaffectée en masse depuis 2002, assurée aujourd'hui par des irréductibles qui ne résisteront pas longtemps aux tarifs en vigueur, l'échographie foetale se trouve face à un avenir à dix ans « préoccupant si l'on ne pallie pas les carences actuelles ».
D'ores et déjà, les patientes « voient s'allonger les délais d'obtention d'un rendez-vous », « certains cabinets ont délibérément limité leur activité en échographie foetale par des quotas à la prise de rendez-vous, n'acceptant qu'un pourcentage d'examens en échographie foetale et/ou en refusant les examens les plus longs » et la situation de « carence de l'offre de soins » est déjà une réalité dans quelques zones géographiques. Le « désinvestissement » du terrain de l'échographie foetale est même constaté par les industriels : « Les incertitudes sur l'avenir (...) ralentissent la demande de renouvellement du matériel et orienteraient le marché vers des machines moins sophistiquées, moins coûteuses ». Au total, le rapport est sévère qui juge que « dans la situation actuelle, les patientes les mieux informées trouvent les filières adéquates et peuvent bénéficier d'examens de qualité. En revanche, les patientes moins bien informées ou en situation précaire sont exposées aux inconvénients suivants : examens hors des périodes adéquates, examens sommaires, examens dans un contexte d'urgence ».
Comment redresser la barre ? En restaurant l'attractivité de l'échographie foetale, répondent les experts. Et cela passe par la qualité - « une nécessité de santé publique également facteur d'estime personnelle, favorisant l'investissement professionnel » - et, en ville, par la rémunération de l'acte. Car dans le domaine tarifaire, on est arrivé « à la fin d'un cycle d'espoir et d'attente », souligne le rapport. La réévaluation devrait être d'autant plus importante qu'elle devra prendre en considération tant le travail médical effectué que l'investissement en formation, en matériel, en responsabilité humaine et médico-légale. L'indispensable démarche qualité « a un coût, insiste le Comité, elle ne peut être envisagée sans la mise à niveau de la cotation des actes d'échographie foetale de dépistage » à la valeur cible initialement estimée - et finalement jamais atteinte - dans le cadre de la Ccam (classification commune des actes médicaux).
(1)Rendu le 17 novembre 2000, l'arrêt Perruche a établi un rapport de causalité entre l'intervention médicale (non-dépistage de la rubéole de la mère pendant sa grossesse, en l'occurrence) et l'existence d'une malformation foetale, en introduisant la notion d'une indemnisation du handicap. La loi du 4 mars 2002, dite anti-arrêt Perruche a empêché cette décision de faire jurisprudence en interdisant toute indemnisation pour le seul fait d'être né.
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