La sénatrice socialiste Raymonde Le Texier a beau trouver la copie des sénateurs « encore bien timorée », le Sénat qui discutera la semaine prochaine du projet de loi bioéthique devrait faire entendre sa différence par rapport aux députés et au gouvernement. En commission mercredi 30 mars, il a sensiblement modifié le texte de révision des lois de bioéthique en instaurant par exemple une levée de l'anonymat pour les donneurs de gamètes à partir de 2013 et en autorisant la recherche sur l'embryon sous conditions.
La commission des Affaires sociales a d’abord décidé de réintroduire la levée de l'anonymat pour les donneurs de gamètes à compter du 1er janvier 2013. Le fait de donner son sperme ou ses ovocytes vaudra donc consentement à donner son identité, selon le texte. Cette disposition, initialement incluse dans le projet de loi par Roselyne Bachelot quand elle était ministre de la Santé, avait ensuite été rejetée à l'Assemblée nationale sur demande du gouvernement et dans un consensus gauche-droite.
« C’est autorisé et non plus interdit »
S'agissant de la recherche sur l'embryon et les cellules souches, la commission a décidé d'une « autorisation réglementée » à la place du régime de l’interdiction assortie de dérogations. Alain Milon, rapporteur UMP du texte au Sénat, explique s'être « un peu calqué sur le régime anglais ». Sur le fond, le dispositif retenu par les sénateurs ne change pas grand-chose à celui adopté par les députés, puisque dans les deux cas, c’est quand même l'Agence de Biomédecine qui réglemente ces recherches. Mais au plan symbolique, le message adressé est différent. « L'image qu'on donne aux chercheurs du monde entier, c'est que c'est autorisé et non plus interdit » commente Alain Milon. En première lecture à l'Assemblée, le PS avait protesté contre le maintien du statu quo actuel concernant la recherche sur l'embryon et l'opposition tout entière y avait vu une occasion manquée.
Les sénateurs se sont en revanche montrés moins libéraux que les députés sur la possibilité de transférer post-mortem (après le décès du père) un embryon. Une disposition avait été votée en ce sens à l’Assemblée Nationale et le Comité national d’éthique vient lui aussi de se prononcer favorablement. L’opposition des sénateurs devrait arranger Xavier Bertrand qui s’était montré hostile à cette possibilité.
Le ministre devrait également se satisfaire d’une autre suppression du Sénat par rapport au texte des députés. Une disposition sur le diagnostic prénatal - introduite par le rapporteur UMP à l'Assemblée, Jean Leonetti, contre l'avis de Xavier Bertrand - donnait un rôle accru au médecin dans l’accès au dépistage prénatal pour éviter la systématisation de cette pratique. Cette disposition avait créé un certain émoi dans le monde médical. Le texte du Sénat intègre désormais également une proposition de loi du député NC Olivier Jardé, encore en discussion, sur les recherches impliquant la personne humaine.
En revanche, des amendements tendant à instaurer la gestation pour autrui ont été repoussés, comme l’avaient fait le mois dernier les députés. C’est bien un des rares points sur lesquels le Sénat se rallie sans bémol au statu quo prudent prôné par le gouvernement. Car pour le reste, le débat bioéthique devrait, en séance la semaine prochaine, confirmer la position plus libérale du Sénat sur les questions de société. Déjà, en début d’année, on se souvient qu’une proposition de loi légalisant l’euthanasie avait bien failli être adoptée par la Haute Assemblée.
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