LES JOURS PASSENT et la grève des urgences orchestrée par l'Amuf (Association des médecins urgentistes de France) ne marque pas le pas. Bien au contraire.
Mercredi, au troisième jour du mouvement, le syndicat enregistrait en effet une participation moyenne de 90 % (supérieure à celle annoncée lundi - 85 %), plus forte dans les centres hospitaliers (où entre 90 et 95 % des urgentistes étaient déclarés grévistes) que dans les CHU (près de 80 % de grévistes). Des chiffres à peine revus à la baisse par la Dhos (Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, au ministère de la Santé).
L'adhésion au mot d'ordre du Dr Pelloux, qui s'insurge contre la saturation des services d'urgences, est donc spectaculaire. Le ministre des Solidarités ne pouvait éviter d'y réagir lors de sa présentation des premiers indicateurs de la réforme de l'assurance-maladie (voir ci-contre). « Il faut améliorer les conditions de travail des urgentistes », a-t-il reconnu à cette occasion, indiquant qu'il allait recevoir très rapidement, en compagnie du directeur des Hôpitaux, Jean Castex, trois organisations d'urgentistes : l'Amuf, bien sûr, mais aussi Samu de France et le SUH (Syndicat des urgences hospitalières). Philippe Douste-Blazy souhaiterait examiner les situations locales avec les responsables de ces syndicats. ARH (agence régionale de l'hospitalisation) par ARH, il voudrait recenser « les endroits les plus chauds pour qu'on puisse donner les moyens » de fonctionnement nécessaires.
Il était également difficile au ministre de rester sourd à la polémique qui enfle depuis plusieurs jours entre libéraux (accusés d'avoir déserté le terrain de la permanence des soins - PDS) et hospitaliers (« le Quotidien » d'hier). Sur ce terrain, appelant à un « rassemblement du corps médical », le ministre a plaidé pour le dialogue, soulignant que le futur décret réorganisant la PDS - un texte qui pourrait bien paraître dès aujourd'hui au « Journal officiel » - « oblige les préfets à organiser la concertation département par département ». « Je souhaite, a-t-il insisté, qu'il y ait le plus vite possible une entente possible entre urgentistes et médecins libéraux, secteur par secteur. »
Et la durée du « plus vite possible » est précisément arrêtée. « Si, dans six mois, à l'évaluation de ce décret, je vois que ça ne fonctionne pas, je prendrai mes responsabilités, prévient Philippe Douste-Blazy. Je ne peux pas accepter qu'il y ait un kilomètre carré dans ce pays où il n'y ait pas de garde. (...) Je dirai à tous les secteurs qu'il faut trouver un système pour qu'il y ait une garde obligatoirement dans tous ces secteurs. »
Le message s'adresse d'abord aux médecins libéraux. S'il ne remet pas pour l'instant en cause la notion du volontariat (inscrite dans le décret) pour les gardes médicales, le ministre se réserve la possibilité - c'est sous-entendu - de changer d'avis dans six mois et de recourir à des méthodes plus contraignantes.
Le « chiche ! » de Chassang.
La « période d'essai » qu'il impose aux médecins libéraux ne leur fait pas peur. En tout cas, le président de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf), Michel Chassang, n'a pas attendu longtemps pour répondre « chiche ! » à Philippe Douste-Blazy. « Je fais le pari, a-t-il répliqué, que les généralistes s'engageront encore plus dans la permanence des soins », une fois le décret paru. « Retroussons nos manches, dégageons les fonds, faisons en sorte que les préfets réunissent au plus vite les Codamups (comité départemental de l'aide médicale urgente et de la permanence des soins) , mettons en place un financement, et je suis sûr qu'il n'y aura pas besoin (que le ministre) exerce ses menaces », ajoute le Dr Chassang, qui demande à Philippe Douste-Blazy de « mettre les menaces au placard ».
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