« Désormais, le simple remplacement des cellules détruites ou non fonctionnelles pour sauver un organe appartient à la réalité et débouche sur de passionnantes perspectives », affirme le Pr Luc Douay, qui dirige la nouvelle unité d’Ingénierie et de thérapie cellulaire de l’EFS, inaugurée la semaine dernière et qui est leader dans ce domaine. Doté d’une capacité de stockage de 5 000 poches de cellules souches et de 4 500 poches de sang de cordon, le bâtiment réserve 900 m² aux activités de laboratoires d’analyses et de recherche. Des moyens ambitieux pour aller plus loin dans un domaine où la recherche avance à pas de géant. De la greffe de moelle osseuse à la thérapie cellulaire puis à l’ingénierie cellulaire, les chercheurs préparent désormais la cellule médicament.
À terme, 60 chercheurs, cliniciens et hospitalo-universitaires, sont appelés à rejoindre la plate-forme qui a une double feuille de route : produire et chercher. Dédiée à la production de produits de thérapie cellulaire et tissulaire pour la région Île-de-France, cette plate-forme va constituer une banque de sang de cordon qui devrait stocker 270 greffons dès cette année et 3 000 d’ici 5 ans, ce qui implique de recueillir plus de 10 000 cordons. Le partenariat établi avec les maternités du groupe Générale de santé, n’est qu’un début, pour le Pr Luc Douay, qui espère une plus grande mobilisation des maternités de l’AP-HP dans cet approvisionnement.
« Nous sommes un laboratoire d’accueil pour mettre en uvre les techniques de production industrielle des greffons et établir le lien entre cette production et les services cliniques. Nous disposons de toutes les compétences pour qualifier de nouveaux produits de thérapie cellulaire, les développer et aider à la préparation des dossiers pour les agences de régulation organisant les essais cliniques en relation avec le centre d’investigation clinique en biothérapies », explique Luc Douay.
Mille produits cellulaires par an.
Le travail sur les cellules souches hématopoïétiques s’accélère et 500 greffons ont été préparés l’an dernier. Cette technique éprouvée permet désormais de réparer d’autres lésions. En travaillant sur la plasticité des cellules souches, la réparation d’autres tissus, comme l’os, devient possible et plus de 200 greffons sont réalisés. L’unité va donc développer une activité de banque de tissus pour développer de nouvelles voies de réparation, possible aujourd’hui pour l’os, les artères, la cornée. « En préparant la thérapie cellulaire de demain, nous travaillons aussi sur la multiplication des globules rouges dans un but transfusionnel. »
Dans ces locaux, une équipe va très prochainement fabriquer les premiers globules issus de cellules souches hématopoïétiques qui seront injectées à des receveurs dans le cadre d’un protocole de faisabilité.
« La transfusion de demain se prépare ici et nous nous intéressons désormais aux souches pluripotentes adultes, qui peuvent être fabriquées à partir du sang, de la peau ou d’un simple cheveu », confie, heureux le Pr Douay, qui s’apprête à constituer une première banque de ces cellules si prometteuses, qui, dans un premier temps, vont lui permettre de produire des globules rouges.
Bon sang déjà 10 ans.
Le bâtiment qui abrite la nouvelle unité, portera certainement le nom de Félix Reyes, qui, dès le départ, y a cru avec ferveur. Le projet a pris dix ans. C’est aussi l’âge de l’EFS. L’occasion d’un bilan pour son président, le Pr Gérard Tobelem. « Tous les personnels peuvent être fiers, puisque, conformément aux attentes du législateur et des décideurs politiques, la transfusion sanguine de notre pays a su se refonder, affirme-t-il. L’autosuffisance et la sécurité des receveurs sont assurées et j’estime que nous avons regagné la confiance des patients et de l’ensemble de notre pays. »
Un contrat d’objectifs et de moyens doit être signé en mars avec les tutelles. La sécurité, l’anticipation et l’efficience resteront les maîtres mots de cet accord, par lequel l’EFS et l’État prendront des engagements, assure le Pr Tobelem. Nous n’en saurons pas davantage pour le moment. Rappelons simplement que la structure et l’organisation de l’EFS en font un modèle unique. Nous en sommes tous les actionnaires, puisque l’établissement, placé sous la tutelle du ministre chargé de la Santé, ne bénéficie d’aucune subvention de l’État. C’est un modèle économique unique qui repose sur la générosité des donneurs, dont les actes ne sont pas rémunérés et sur la vente des produits sanguins à près de 2 000 établissements de santé publics et privés, enregistrant un chiffre d’affaires de près de 780 millions d’euros par an.
En tournant le dos au scandale du sang contaminé, page la plus sombre de l’histoire de la sécurité sanitaire de notre pays, l’EFS estime donc que la confiance semble revenue. Mais les 3 millions de prélèvements réalisés chaque année, auprès de 1 650 000 donneurs de sang ne sont pas suffisants. À la fin de 2009, 181 806 donneurs volontaires de moelle osseuse étaient inscrits au fichier national. L’EFS a réalisé 95 % du recrutement, représentant les trois quarts des inscriptions prévues dans le plan greffe initié par l’Agence de la biomédecine. Le pari est tenu et l’EFS se donne les moyens de prendre la place qui lui revient en ingénierie cellulaire.
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