Prévention de la maladie d’Alzheimer

L’EGb 761® évalué dans deux essais cliniques prospectifs

Publié le 27/04/2006
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EN RAISON du vieillissement de la population, la maladie d’Alzheimer (MA), dont l’incidence s’accroît avec l’âge, constitue et constituera plus encore dans les années futures un problème médico-social majeur. «Ce problème concerne tous les pays occidentaux, qui connaissent des évolutions démographiques similaires. Les patients ayant un déclin cognitif modéré gardent leur autonomie en s’aidant de moyens simples: aide-mémoire, appels téléphoniques de la famille ou de voisins, recours à des boîtes à pilules, aide-ménagère ponctuelle... Avec le temps, la maladie devient plus sévère et le patient doit alors être aidé à plein-temps, ce qui signifie vivre dans sa famille ou dans un établissement adapté, avec toutes les conséquences sociales et économiques que cela représente. Pouvoir prévenir la maladie ou ralentir le déclin cognitif des patients par un traitement peu coûteux et dénué d’effets secondaires notables est donc un enjeu essentiel afin de réduire le nombre de sujets présentant une perte d’autonomie, estiment les Prs Bruno Vellas (Toulouse) et Steven Dekosky (Pittsburgh, Etats-Unis). Les projections démontrent en effet que si l’on arrivait à retarder de cinq ans l’évolution de la maladie, le nombre de patients en perte d’autonomie serait réduit de moitié.»

Des études jusqu’alors peu concluantes.

Plusieurs approches thérapeutiques préventives ont déjà été évaluées dans des essais cliniques, dont certains ont dû être interrompus en raison d’effets secondaires. C’est notamment le cas des études WHIMS (Women’s Health Initiative Memory Study) ou PREPARE (Post-Menopausal Memory Loss and Alzheimer’s Disease with Replacement Estrogens), fondées sur un traitement estroprogestatif et arrêtées avant leur terme en raison de l’augmentation du risque de cancer du sein et d’événements cardio-vasculaires.

«De même, l’essai ADAPT (Alzheimer’s Disease Anti-inflammatory Prevention Trial) qui devait évaluer les bénéfices potentiels d’un traitement par Ains a dû être arrêté en raison des effets secondaires», rapportent les Prs Vellas et Dekosky.

D’où l’intérêt porté actuellement à deux études spécifiquement dédiées à la prévention de la MA, comparant l’EGb 761® à un placebo. L’EGb 761®, déjà indiqué dans les troubles cognitifs du sujet âgé en France ou dans la démence dans des pays comme l’Allemagne ou la Belgique, constitue en effet un bon traitement candidat pour la prévention de la MA. Il a fait la preuve de ses propriétés anti-oxydantes et neuroprotectrices, est bien toléré, peu onéreux et facile à administrer.

Plainte mnésique dans GUIDAGE.

La première de ces études, GUIDAGE, coordonnée par le Pr Bruno Vellas, est un essai multicentrique, prospectif, randomisé, contrôlé en double aveugle EGb 761® versus placebo. Les patients exprimant spontanément une plainte mnésique auprès de leur médecin généraliste ont été référés à un centre d’évaluation de la mémoire (examen neurologique et tests neuropsychologiques), puis randomisés pour recevoir le principe actif ou le placebo. Ils seront ensuite suivis pendant cinq ans, à raison d’une visite chez leur généraliste tous les trois mois et d’un examen annuel dans un centre expert. Les sujets chez lesquels des signes de démence de type Alzheimer seront détectés seront sortis de l’étude.

Les quelque 3 000 patients inclus sont des femmes et des hommes âgés de plus de 70 ans, ayant un score Mmse > 25, mais ni anxiété (COVI < 6) ni dépression (GDS < 15). Le critère principal d’évaluation est l’incidence et le délai d’apparition d’une démence de type Alzheimer. Les modifications des scores obtenus sur les échelles cognitives, la survenue de pathologies concomitantes, l’évolution de la dégénérescence maculaire liée à l’âge, les troubles de l’équilibre et la sarcopénie sont des critères d’évaluation secondaires.

«Les premières données portant sur l’observance thérapeutique, très bonne, sont encourageantes», précise le Pr Vellas, tout en insistant sur la réelle motivation des sujets âgés à prendre un traitement susceptible de prévenir la MA. «Le taux de décès est faible, de l’ordre de 1% par an», poursuit le coordinateur de l’étude.

Aucun trouble ou MCI dans GEM.

Dans l’essai GEM (Ginkgo Evaluation of Memory) coordonné par le Pr Dekosky, également multicentrique, randomisé en double aveugle versus placebo, 1 500 sujets déjà suivis dans le cadre de la Cardiovascular Health Study (CHS) et 1 500 issus de la population générale ont été présélectionnés par entretien téléphonique, puis ont bénéficié de tests psychométriques. Ont finalement été inclus dans l’étude ceux considérés comme normaux ou ayant un MCI (Mild Cognitive Impairment) à l’issue des tests. Il s’agit donc de patients sans trouble cognitif ou avec un trouble cognitif modéré, tous âgés de plus de 75 ans. «Le choix du critère âge est toujours délicat dans ce type d’étude, explique le Pr Dekosky. S’ils sont trop jeunes, l’étude doit être de très longue durée, pour espérer mettre en évidence une différence entre le traitement par l’EGb761®et le placebo. S’ils sont très âgés, le nombre de perdus de vue ou de sujets arrêtant l’étude pour une pathologie intercurrente augmente. L’étude, dont la durée initialement prévue était de cinq ans, sera ainsi prolongée de trois années. Tout comme dans l’étude GUIDAGE, l’observance thérapeutique est très bonne et le taux de décès plus faible qu’estimé.»

Les résultats de ces deux études sont attendus avec beaucoup d’espoir par les spécialistes, qui soulignent le manque crucial de médicaments capables de prévenir une pathologie dont la prévalence est en constante augmentation.

9th International Geneva/Spingfield Symposium on Advances in Alzheimer Therapy. D’après un entretien avec les Prs Bruno Vellas (Toulouse) et Steven Dekosky (Pittsburgh, Etats-Unis).

&gt; Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7950