L’ANGIOGENESE tumorale est le processus par lequel de nouveaux vaisseaux se développent à partir de vaisseaux préexistants pour permettre l’apport en oxygène et en nutriments indispensable à la croissance de la tumeur.
L’idée de bloquer l’angiogenèse pour traiter les pathologies tumorales est née en 1971 (1) et a suscité un immense intérêt (2). En effet, les cellules endothéliales constituent des cibles thérapeutiques potentielles pour trois raisons principales : elles sont génétiquement stables et ne présentent pas de résistance acquise, elles ne sont ni invasives ni prolifératives et, enfin, leur accès par voie veineuse est facile.
Par ailleurs, les cellules endothéliales, normalement quiescentes, ont un développement accéléré dans les tumeurs. En raison de cette conversion (ou « switch ») angiogénique, il était tentant de chercher à développer des thérapeutiques angiostatiques dénuées de toxicité aiguë et chronique, pouvant être administrées par voie orale en combinaison avec les chimiothérapies.
Trois pistes.
Depuis une dizaine d’années, trois pistes pharmacologiques différentes ont été envisagées. La première voie a consisté à tenter d’entraver l’angiogenèse lors de ses premières étapes, au moment de la dégradation de la matrice extracellulaire de la membrane basale par les métalloprotéases, des endopeptidases naturelles. Des inhibiteurs des métalloprotéases ont donc été développés. Toutefois, en termes de survie, aucun bénéfice n’a été mis en évidence au cours des essais cliniques.
Une deuxième possibilité thérapeutique consiste à détruire sélectivement la vascularisation tumorale. La combretastatine A4, issue de l’écorce d’un arbre du bush sud-africain, très sélective des vaisseaux immatures, suscite beaucoup d’intérêt. Les essais cliniques ont été au début interrompus en raison de sa toxicité cardiaque potentielle. D’autres produits sont en cours de développement en association. Enfin, la troisième voie thérapeutique cherche à inhiber le signal de l’angiogenèse émis par le Vegf (Vascular Endothelial Growth Factor), normalement quiescent. Deux possibilités ont été envisagées dans ce sens. La première consiste à bloquer son récepteur par un anticorps monoclonal, les molécules de ce type ayant une dénomination commune qui se termine en « -mab », la seconde à inhiber de façon compétitive le site tyrosine kinase du récepteur par des enzymes, dont la dénomination commune se termine en « -tinib ». Le bévacizumab est le premier anti-Vegf qui a fait la preuve de son efficacité. Il a fait l’objet d’études cliniques très récentes qui ont montré que cette molécule améliore la survie des patients ayant un cancer métastatique rénal ou une tumeur colo-rectale, mammaire ou bronchique. Concernant l’inhibition compétitive de la tyrosine kinase, différentes molécules sont en développement avec déjà un enregistrement dans le cancer du rein (sorafenib). D’autres approches sont en cours d’évaluation préliminaire, utilisant une protéine de fusion (Vgftrap) ou des oligonucléotides antisens.
Ainsi, des avancées majeures dans la compréhension de la signalisation et de la régulation de l’angiogenèse ont été accomplies. Il reste encore à déterminer les meilleures combinaisons de ces agents entre eux et/ou avec la chimiothérapie ou la radiothérapie.
D’après un entretien avec le Dr Jean-Pierre Armand, institut Gustave-Roussy, Villejuif.
(1) Folkman J, Tumor Angiogenesis: Therapeutic Implications. « New Engl J Med » 1971 ; 285 : 1182-1186.
(2) Soria JC, Fayette J, Armand JP. Molecular Targeting: Targeting Angiogenesis in Solid Tumors. « Ann Oncol » 2004 ; 15 Suppl 4 : iv223-227.
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