La loi Hôpital, patients, santé et territoires a fait de la France le premier pays à reconnaître officiellement l’éducation thérapeutique du patient (ETP). Pratiquée depuis plusieurs dizaines d’années sans que les choses puissent être formalisées, au gré du volontarisme des professionnels de santé et des associations, elle acquiert ainsi une certaine importance, mettant un terme au modèle qui opposait le médecin qui sait au patient qui ne sait pas et affirmant au passage le rôle joué par les associations. En effet, un arrêté du 2 août 2010 pris en application de la loi de 2009 pose que les programmes d’éducation thérapeutique sont coordonnés par un médecin, par un autre professionnel de santé ou par « un représentant dûment mandaté d’une association de patients agréée ».
Cependant, ce même arrêté contraint à ce que la mise en œuvre des programmes d’ETP soit effectuée par au moins deux professionnels de santé. Une association seulement composée d’usagers ne pourra donc pas prendre en main un programme d’éducation thérapeutique à part entière. Se pose par conséquent la question de la pérennité des actions menées jusqu’ici par les associations de santé. De surcroit, alors que les programmes hospitaliers d’ETP agréés bénéficieront de financement Migac (missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation) et que les programmes de ville se verront allouer des moyens émanant du Ficqsv (Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins), il n’est pas prévu de financement s’agissant des programmes relevant des associations. « On est dans une politique de faux-semblant : on ouvre aux associations la capacité juridique d’être promoteur de programmes d’ETP, mais on ne prévoit aucun financement les concernant », dénonce Christian Saout.
L’entourage des malades, oublié de la loi
Manifestement, la motivation du monde associatif en a pris un coup. En témoigne la quasi inexistence des demandes d’autorisation déposées par les associations auprès des agences régionales de santé. La loi, en effet, prévoit que les programmes d’éducation thérapeutique du patient ne peuvent désormais être mis en œuvre au niveau local qu’après autorisation de l’agence régionale de santé. Le processus de demande d’autorisation pour les programmes déjà existants s’est déroulé au cours du second semestre 2010 et, d’après le collectif interrassociatif sur la santé, très rares ont été les demandes d’autorisation déposées par les associations. Il n’y en aurait eu qu’une dans la région Centre, de même qu’en Lorraine par exemple.
Le monde associatif considère enfin que la rédaction de l’article 84 de la loi HPST relatif à l’éducation thérapeutique du patient ne répond pas à tous les besoins relevant de l’éducation thérapeutique. Ainsi, dans un rapport publié en juillet dernier à la demande de Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé, Christian Saout, président du Ciss, Bernard Charbonnel, médecin à Nantes et Dominique Bertrand, membre du Centre national de gestion, regrettent par exemple que le législateur n’ait « pas ouvert le bénéfice des programmes à l’entourage du malade mais au seul malade ». L’éducation thérapeutique s’adresse aussi, selon eux, à l’entourage des malades.
Le décret sur l’accompagnement n’est pas encore paru
Du coup, les associations attendent impatiemment la parution du décret d’application de la loi HPST relatif aux actions d’accompagnement, où elles espèrent pouvoir jouer tout leur rôle, notamment s’agissant de la prise en charge et du soutien de l’entourage des malades. A la condition toutefois qu’à la différence des textes relatifs aux programmes d’ETP, le décret permette plus de souplesse. Ce qui est loin d’être gagné, si l’on en croit Christian Saout, selon qui on prépare un processus de labellisation des actions d’accompagnement. De son point de vue, alors que l’on avait besoin d’un « programme de promotion de l’ETP », on a mis en place une véritable « police administrative ».
Un rapport devait être remis fin 2010 au Parlement sur la faisabilité de la création d’un fonds de financement de l’ETP. Pas de trace de ce rapport à ce jour. S’il paraissait avant l’arrivée du mag’ dans les boites aux lettres des lecteurs, ça mettrait tout ce papier à plat… Vigilance, donc !
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