«IL EXISTE une association inverse, dose dépendante, entre le carbone contenu dans les macrophages des voies aériennes et la fonction respiratoire des enfants. Nous n’avons trouvé aucune preuve que la réduction de la fonction respiratoire elle-même soit responsable du contenu en carbone.» Constat fait par Neeta Kulkarni (Leicester, Royaume-Uni) et coll. à la suite d’une enquête réalisée auprès de 114 enfants (de 8 à 15 ans) de cette agglomération britannique.
Le carbone, rappellent les auteurs, est un composant majeur des particules inhalables de moins de 10 µ de diamètre. Il semble responsable d’une grande partie des effets néfastes de ces particules, qui contiennent également des traces de métal et de composés organiques. Les enfants y sont particulièrement sensibles, notamment en raison d’effets cumulatifs sur le développement de la fonction respiratoire.
Particules de moins de 10 phagocytées.
µ Un autre préalable à la compréhension du travail porte sur le rôle des macrophages respiratoires. Il s’agit des premiers éléments qui phagocytent les particules de moins de 10 µ. Leur taux de pigmentation est considéré, selon les études animales, comme le reflet direct de la quantité inhalée et de la charge pulmonaire en particules.
L’étude britannique s’est donc attachée à déterminer l’association entre la teneur en carbone des macrophages et la fonction respiratoire chez ces enfants en bonne santé. De plus, la même relation a été recherchée dans un groupe atteint d’un asthme sévère. Une modélisation mathématique a permis d’évaluer la teneur en particules de moins de 10 µ dans ou à proximité de la résidence des sujets étudiés.
L’analyse a été menée sur des expectorations de 64 des 114 enfants enrôlés (56 %). Des explorations fonctionnelles respiratoires ont permis d’évaluer leur fonction respiratoire.
Pour chaque augmentation de 1 µg de particules par mètre cube d’air ambiant, les chercheurs ont relevé une augmentation de contenu en carbone de 1 µ/m2 dans les macrophages respiratoires. De plus, chaque élévation de 1 µ/m2 était associée à une réduction du Vems (volume expiratoire maximal seconde) de 17 %, de 12,9 % de la capacité pulmonaire totale et de 34,7 % du volume expiratoire forcé (entre 25 et 75 % de la capacité pulmonaire totale).
Cause et non conséquence.
D’aucuns, expliquent les auteurs, pourraient suggérer que l’atteinte de la fonction respiratoire est cause et non conséquence de l’accumulation de carbone dans les macrophages. Pour répondre par avance, une partie de l’étude a été menée chez des enfants atteints d’un asthme sévère. Si l’objection était valide, ces enfants auraient un contenu macrophagique en carbone élevé. L’étude a mis en valeur, dans ce groupe d’enfants, un taux plus faible de carbone dans les macrophages. Ce qui permet de conclure que, d’une part, les particules de moins de 10 µ sont bien délétères et que, d’autre part, la fonction de phagocytose des macrophages est altérée au cours de l’asthme sévère.
Cependant, le travail britannique rencontre quelques limites. La première concerne la durée d’exposition. L’atteinte respiratoire est-elle due à une exposition à court ou long terme ? Un traitement par bronchodilatateur exclut une action à court terme. Toujours à propos de cette durée d’exposition aux particules de moins de 10 µ, le carbone en est-il le reflet fidèle ? Il est probable qu’il est accumulé depuis plusieurs mois. A titre de comparaison, des traces de suie ont été retrouvées, plusieurs mois plus tard, chez des individus exposés brièvement. De plus, l’expérimentation a montré la persistance du carbone dans les macrophages jusqu’à 3 mois après des instillations dans les voies respiratoires. Dernier obstacle : les prélèvements ont été obtenus sur des expectorations reflet des voies aériennes proximales et non distales. On sait toutefois que, chez l’adulte, il n’existe pas de différence entre les macrophages alvéolaires et bronchiques.
« New England Journal of Medicine », vol. 355, n°1 , pp. 21-30 et 78-79 (éditorial).
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