DE NOTRE CORRESPONDANTE
LE DEFI MEDICO-SOCIAL est majeur : la population âgée ne cesse d'augmenter et la grande majorité des plus de 80 ans vivent aujourd'hui à domicile. Or « il n'existe pas forcément de dialogue entre les pôles sanitaires et sociaux. Les problèmes sont donc réglés au mieux, sans qu'il y ait de mise en cohérence », estime le Dr Emile Olaya, généraliste à Annonay (Ardèche). Responsable de la commission dépendance instaurée au sein de l'Urml Rhône-Alpes dès sa création en 1994, il souhaite aujourd'hui sortir du cliché en vertu duquel « le généraliste est au cœur de la prise en charge des personnes âgées », sans qu'on sache ce qu'il y fait concrètement.
Jalons.
Le généraliste est l'un des premiers ordonnateurs des dépenses médicales et sociales. « Si on ne l'associe pas directement, poursuit le Dr Olaya, on va vers une cacophonie inefficace et coûteuse. » D'où l'organisation, samedi, d'un séminaire dont l'objectif est de poser les jalons d'une collaboration entre tous les acteurs de ce grand dossier. Les généralistes de la région, les collectivités locales, les responsables de réseau et les interlocuteurs habituels des omnipraticiens y ont été conviés, « y compris les trois patrons de la gériatrie en Rhône-Alpes, qui seront appelés à expliquer comment se positionnent leurs services ». Pour identifier les liens à créer, les participants disposeront, entre autres, des résultats d'une première étude sur la place du généraliste dans les dispositifs de gérontologie en Rhône-Alpes*. Ce travail, qui a conduit les enquêteurs à rencontrer les huit conseils généraux, montre qu'il existe autant de politiques gérontologiques que d'institutions concernées. Avec deux départements pionniers, tout de même, l'Ain et la Haute-Savoie, « qui intègrent depuis très longtemps les généralistes dans leurs dispositifs, notamment pour l'élaboration et le suivi du dossier d'Allocation personnalisée d'autonomie (Apa) et le plan de soins », observe Emile Olaya. Le Rhône souhaite s'engager dans cette voie, mais, dans les cinq autres départements, les contours de la politique menée sont flous et la communication avec les libéraux est plus ou moins distante.
Le social au quotidien.
Les généralistes et les internes qui ont participé à l'enquête revendiquent la dimension sociale de leur pratique, notamment vis-à-vis des personnes âgées. Mais tous soulignent la difficulté de l'intégrer au quotidien : la simple nécessité de contacter l'assistante sociale de secteur relève parfois de la gageure. Parmi les 80 généralistes en exercice qui ont été interrogés, les deux tiers évoquent des « difficultés relationnelles » avec les structures de prise en charge des personnes âgées. Les généralistes de Rhône-Alpes connaissent assez bien l'Apa et les réseaux de soins de leur secteur géographique, ainsi que les centres locaux d'information et de coordination (Clic), mais un peu moins. Cependant, ils gardent de la coordination médico-sociale une vision chronophage et paperassière. « Quand on demande aux généralistes si le fait de remplir l'Apa leur apporte quelque chose, ils répondent "rien", tout en précisant que cela apporte "beaucoup" aux familles et aux patients », rapporte le Dr Olaya. Il en déduit que les généralistes ne se sentent « pas très intégrés » dans la chaîne décisionnelle qui conduit au plan de soins.
Les résultats de l'enquête mettent l'accent sur la nécessité de trouver de nouveaux outils de communication et de gestion du temps pour rapprocher institutionnels et libéraux. Enfin, les questions financières inhérentes à l'implication des généralistes ont été soulevées : les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie sont les seuls à y avoir répondu, en rémunérant les généralistes qui élaborent et suivent le dossier Apa.
Pour résumer, les généralistes souhaitent majoritairement s'impliquer dans la prise en charge des personnes âgées, mais dans un cadre et avec des outils à définir. Au-delà des pistes de travail que ce séminaire devra dégager, les unions de Rhône-Alpes, d'Ile-de-France et d'Alsace présentes à cette réunion entendent « réaffirmer leur rôle de facilitatrices d'échanges », souligne le Dr Olaya. Elles projettent de rédiger une sorte de « charte minimale », qui servira de base au développement des liens entre la médecine générale et les institutions.
* Réalisée par le Dr Pascale Gayrard et Christian Harzo, observatoire social de Lyon.
La médecine générale récompensée
Sur le modèle des Urml d'Ile-de-France et d'Alsace, l'union de Rhône-Alpes lance à son tour un prix de thèse en médecine générale. D'un montant de 2 000 euros, il récompensera une thèse de recherche en médecine générale portant sur l'organisation, les méthodes de diagnostic ou thérapeutiques. Un prix devrait être décerné pour chacune des universités de Lyon, de Grenoble et de Saint-Etienne.
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