IL EST normal, dans un pays développé, que l'on dépense de plus en plus pour la santé : c'était du moins le sentiment de 68 % des Français en 2004. Mais ce pourcentage a baissé de 5 points par rapport à 2002 et de 7 points par rapport à 2000. C'est l'un des enseignements de l'enquête (1) que vient de rendre public la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), qui dépend du ministère de l'Emploi et du ministère de la Santé et qui porte sur « l'évolution entre 2002 et 2004 des opinions des Français en matière de soins et de protection sociale ».
Cette étude montre donc un changement sensible de l'attitude des Français sur les problèmes de Sécurité sociale. Certes, 62 % des personnes qui ont répondu à cette enquête affirment toujours qu'il n'y a aucune raison de limiter les dépenses, « car la santé n'a pas de prix » ; mais, au cours de la période 2002-2004, ils étaient dix pour cent de plus à penser la même chose. A n'en pas douter, les discours sur les difficultés du système de protection sociale et sa remise en cause si les déficits se creusaient davantage, commencent à porter leurs fruits. « L'opinion, selon laquelle le système doit être rationalisé, semble se diffuser depuis 2002, et l'idée de maîtriser les dépenses de santé progresse », commentent d'ailleurs les auteurs de cette étude.
Haro sur les consultations multiples.
C'est en particulier le nomadisme médical qui cesse de trouver grâce aux yeux des patients, puisque 55 % des personnes qui ont été interrogées en 2004 estiment qu'il ne faudrait « pas rembourser les consultations pour les gens qui vont consulter plusieurs médecins pour la même chose ». L'évolution sur ce point est remarquable : plus 28 points par rapport à 2002. Cette mesure est la première préconisée par les Français pour réduire les dépenses ; et on notera avec intérêt qu'à l'inverse, la limitation du remboursement pour certaines prestations connaît un net recul : moins 25 points. Cependant, il faut nuancer ce résultat par le fait que, il y a deux ans, la limitation du remboursement n'était envisagée que pour les médicaments alors que dans l'enquête de 2004, d'autres prestations ont été citées : notamment un meilleur remboursement pour les patients qui rendent visite à leur généraliste avant d'aller consulter un spécialiste. Cette mesure, qui rappelle évidemment celle du médecin traitant de la réforme de l'assurance-maladie, est la première qui soit préconisée par 12 % des personnes interrogées. A noter que 8 % affirment qu'il faudrait d'abord encadrer les revenus des médecins.
Pas touche au monopole de la Sécu.
Pour les Français, il ne faut pas, en tout cas, toucher au monopole de la Sécurité sociale. Seulement 20 % (soit 8 points de moins qu'il y a quatre ans) pensent que s'ils n'y avait pas ce monopole, « la Sécurité sociale marcherait mieux ».
De même, le principe de solidarité du système de protection sociale est salué par 73 % des personnes interrogées ; 5 % sont pour un changement drastique alors que 21 % seraient partisans d'une transformation moins brutale. Ce résultat est sans doute à rapprocher de celui qui concerne les inégalités d'accès aux soins qui sont considérés « comme les moins acceptables » suivies de près par les inégalités de revenus et de logement.
63 % des personnes interrogées veulent conserver les hôpitaux de proximité, même si cela coûte cher, mais 34 % accepteraient la fermeture des établissements de ce type lorsque la sécurité n'est plus vraiment assurée, mais à condition toutefois de pouvoir accéder sans problème aux « grands établissements ».
A noter enfin qu'une grande majorité de Français se déclarent satisfaits de leur système de santé ; neuf sur dix estiment qu'ils sont en bonne santé. Un pourcentage qui décroît évidemment avec l'âge. En revanche, ils sont pessimistes sur l'état de santé de la population en général : seulement 50 % des personnes interrogées (contre 62 % en 2000 et 60 % en 2002) estiment que l'état de santé de la population s'est amélioré, alors que 31 % (plus cinq points) affirment qu'il s'est détérioré. Un résultat qui confirme, notent les auteurs, « qu'un certain pessimisme gagne l'opinion ».
(1) Drees. Etudes et résultats. N° 395. Avril 2005. Internet. www.sante.gouv.fr/htm/publication
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