Inflammation et athérosclérose
L'INTERLEUKINE 18 (IL18) est connue pour jouer un rôle important dans la réponse immunitaire. Elle a été initialement identifiée en tant que molécule pouvant stimuler la sécrétion d'interféron (IFN) gamma. En synergie avec les interleukines 12 et 15, l'IL18 entraîne, en effet, la production d'IFN gamma par les macrophages et les cellules T, explique le Pr Laurence Tiret (Inserm U525, Paris). Et, via la stimulation du contact entre ces deux populations de cellules, elle est également impliquée dans la production de différentes molécules inflammatoires, à savoir le TNF alpha, l'IL1 bêta, la Cams. A l'inverse, l'IL18 réprime les molécules anti-inflammatoires que sont les métalloprotéases (MMP), l'IL10, le TGF bêta. Des travaux ont montré que, par son rôle clé dans la réponse inflammatoire, l'IL18 contribue à la formation de la plaque athéromateuse et à sa fragilisation. On sait, en outre, qu'un inhibiteur endogène puissant de l'IL18, l'IL18 BD (Binding Protein), l'empêche de se lier à ses récepteurs et, de ce fait, supprime son activité biologique.
Plus de 71 000 patients.
L'étude AthéroGène, réalisée par une équipe franco-allemande, a fourni des informations intéressantes sur l'IL18. Cette étude prospective porte sur une cohorte de 1 299 patients âgés en moyenne de 62 ans, recrutés à l'occasion d'une coronarographie diagnostique et présentant au moins une sténose supérieure à 30 %. Les deux tiers d'entre eux avaient un angor instable et un tiers, un syndrome coronaire aigu. Durant le suivi, qui a duré en moyenne 5,4 ans, 168 décès d'origine cardio-vasculaire et 67 infarctus du myocarde non fatals ont été notés. Grâce à la plasmathèque et à la banque d'ADN constituées à cette occasion, un grand nombre de paramètres biologiques continuent d'être mesurés et analysés. Il a ainsi été montré que le taux sérique d'IL18 est lié à la mortalité cardio-vasculaire : par rapport aux sujets situés dans le premier quartile, le risque relatif est quatre fois plus élevé chez ceux du quartile le plus élevé d'IL18 (S. Blankenberg et coll. « Circulation » 2002). Ces patients ont également un taux de survie à 5 ans très bas. En revanche, dans ce travail, le rôle prédictif de la CRP n'est pas significatif. Autre donnée intéressante, l'IL18 est très faiblement corrélée, d'une part, avec les facteurs de risque cardio-vasculaire classiques et, d'autre part, avec marqueurs de l'inflammation.
Des résultats comparables ont été observés dans l'étude prospective franco-irlandaise Prime (P. Ducimetière et coll., Inserm U258) menée sur environ 10 600 hommes de 50-59 ans, en bonne santé, suivis pendant cinq ans. Trois cent trente-cinq participants ont développé un événement cardio-vasculaire fatal ou non. L'analyse cas-témoins « nichée » (appariement de chacun des cas survenus à deux témoins) montre, là encore, qu'il existe une corrélation significative entre le taux d'IL18 et la mortalité cardio-vasculaire. A noter également que l'étude d'échantillons sanguins prélevés lors des études Hope et Lipid (prévention secondaire en postsyndrome coronarien aigu) a mis en évidence une association entre l'IL18 et le risque de survenue d'un événement cardio-vasculaire (S. Blankenberg).
Afin de déterminer si l'IL18 est un acteur ou un marqueur de l'athérosclérose, des travaux sur les gènes codants pour cette interleukine, son inhibiteur endogène et ses deux récepteurs ont été réalisés dans l'unité 525 de l'Inserm. Au total, 29 polymorphismes ont été phénotypés, dont 20 utilisés dans AthéroGène. D'après les résultats de ces études génétiques, le polymorphisme module le risque chez les sujets qui ont déjà un taux élevé d'IL18. On peut penser que cette dernière intervient surtout dans la fragilisation de la plaque et que les sujets porteurs d'haplotypes protecteurs ou délétères peuvent avoir un risque élevé ou diminué de complications.
D'après la communication du Pr Laurence Tiret, Inserm U525, Paris.
De nombreuses conditions
Pour que les marqueurs de l'inflammation impliqués dans l'athérogenèse puissent passer dans la pratique clinique, ils doivent faire l'objet de nombreuses démonstrations. Sont concernés : la valeur ajoutée, la cohérence dans différentes populations, la stabilité du marqueur, la fiabilité, ainsi que la sensibilité, la spécificité du dosage, la standardisation des méthodes de dosage, l'acceptabilité du coût, et, enfin, l'intérêt pour guider la démarche thérapeutique et améliorer le pronostic du patient. A l'exception de la CRP, on est loin de toutes ces conditions.
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