De notre envoyé spécial
à Washington
PLUSIEURS maladies ont fait l'objet, ces dernières années, de recherches thérapeutiques de transfert de gènes : sida, cancer, cardiopathies particulières... L'objectif est de modifier durablement la biologie des cellules et des tissus impliqués dans le processus pathologique. Dans le cadre des maladies de l'appareil locomoteur, l'intérêt potentiel principal du transfert de gène consiste en la mise en place, au niveau des tissus malades ou endommagés, de systèmes capables de libérer localement et de façon prolongée, des produits thérapeutiques contrôlés par les gènes en question.
Une douzaine d'années de mise au point.
L'introduction de la thérapie génique en chirurgie orthopédique remonte à une douzaine d'années, mais elle a eu à surmonter tout au long de son parcours de nombreux écueils pratiques avant de connaître ses premier succès. Il a fallu, par exemple, s'assurer de pouvoir conserver la fonctionnalité des gènes transférés et de pouvoir maintenir leur présence au sein des tissus cibles.
Si le principe du transfert de gène pouvait paraître séduisant, il convenait cependant de s'assurer que le vecteur lui-même ne comportait pas de risques. Après de multiples et longues expérimentations, un adénovirus associé de recombinaison (rAAV) est apparu comme un système efficace et dénué de risque. Cette méthode de thérapie génique basée sur r-AAV a servi de socle à deux évolutions technologiques destinées à rendre encore plus performant ce transfert : l'activation par la lumière ultraviolette de la transduction du gène et l'immobilisation du rAAV ; ce qui a permis d'obtenir une expression plus régulièrement efficace du gène, car rendue plus spécifique du site de transfert. Les avantages du transfert au rAAV sont multiples : innocuité (absence de pathologie humaine connue due à l'infection très répandue de ce virus) ; affinité de ce virus pour des cellules aussi bien en division que non divisibles ; statut particulier d'épisome de ces virus (sans risque de caractère mutagène ou carcinogène) ; capacité d'expression prolongée après transduction in vivo par r.AAV ; autorisation par la FDA de fabriquer à des fins cliniques des solutions virales à haute concentration en rAAV.
Protéines inhibitrices de cytokines.
Dans des modèles expérimentaux, on a obtenu la libération, sous contrôle des gènes transférés, de protéines inhibitrices des cytokines inflammatoires ou bloquantes du processus auto-immun, au niveau des articulations atteintes de polyarthrite rhumatoïde.
Dans les situations de risque de non-consolidation osseuse, le transfert de gène peut résoudre certaines difficultés soulevées par l'apport local de facteurs ostéogéniques (BMPs). Plutôt qu'apporter de tels facteurs, il apparaît possible de transférer des séquences d'ADN contrôlant la fabrication locale de ces facteurs ostéogéniques.
Dans les phénomènes d'ostéolyse périprothétique conduisant aux descellements, il paraît possible de transférer au moyen du rAAV un gène contrôlant l'expression d'une protéine, l'ostéoprotégérine, qui inhibe la progression ostéolytique par éradication locale des ostéoclastes.
Dans les situations où l'on souhaite favoriser l'intégration des allogreffes osseuses, un transfert de gène - soit morphogénétique, soit angiogénétique - peut induire soit une formation osseuse orthotopique autour de l'allogreffe elle-même, soit le remodelage et la revascularisation accélérée de cette allogreffe.
Au total, d'un stade de balbutiements désordonnés dans toutes les directions, la recherche sur les applications de la thérapie génique en chirurgie orthopédique se structure et s'organise de mieux en mieux. Elle finira sans doute par radicalement transformer l'approche thérapeutique des maladies de l'appareil locomoteur dans les années à venir.
D'après les communications des Drs P. Robbins et E. Schwarz.
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