Deux mois après la hausse du C d’un euro et alors que vont s’ouvrir très bientôt les négociations en vue de la prochaine convention médicale qui devra inaugurer la refonte des modes de rémunération des généralistes, le ministère de la Santé vient de recevoir un travail de deux économistes de la santé qui se sont demandés si « les revenus des médecins généralistes sont suffisants ».
Éternelle question à laquelle deux chercheuses de l’Université Paris-Dauphine ont choisi de répondre en comparant les revenus de ces praticiens aux revenus de « salariés d’un niveau de capital humain comparable, » autrement dit les cadres supérieurs.
Approche pertinente
Et pour ne pas comparer des carottes avec des oranges, Brigitte Dormont et Anne-Laure Samson ont entré dans leurs ordinateurs un certain nombre de paramètres : âge moyen dans ces professions, durées d’expériences, longueurs des études, notamment. « L’approche pertinente consiste à comparer la chronique des revenus d’un médecin avec celle qu’il aurait eue si, au lieu de faire des études de médecine, il avait fait des études supérieures pour devenir cadre dès son entrée sur le marché du travail, » estiment les chercheuses dans ce travail tout à fait original. Les cadres sup’ auxquels elles ont comparé les généralistes répondent à une certaine définition : cadres supérieurs dès la première année de carrière, dans le privé (administratif, commerciaux, ingénieurs), niveau d’étude initial à Bac+5 et ayant débuté leur vie professionnelle entre 22 et 27 ans. Le panel couvre la période 1976-2005.
Ecarts plus marqués chez les plus jeunes
Ainsi, si on compare les revenus des cadres et des médecins à expérience identique, on s’aperçoit que pour les cohortes les plus anciennes (début de carrière en 1978), les revenus des deux catégories sont très proches. En revanche, les écarts de rémunération sont beaucoup plus marqués et en faveur des médecins pour les cohortes suivantes surtout après 1990. En outre, en raison de la longueur des études médicales et des années de remplacements, il faut attendre l’âge de 33 ans pour que les revenus annuels des médecins dépassent ceux des cadres. Mais le manque à gagner des années d’externat et d’internat par rapport aux cadres qui « travaillent » plus jeunes se rattrape de plus en plus tôt : les revenus cumulés des médecins deviennent non significativement différents de ceux des cadres à partir de 43 ans pour la cohorte 1984, 39 ans pour la cohorte 1986, 37 ans pour la cohorte 1988 et 35 ans pour la cohorte 1990. Les plus jeunes ont en effet tiré profit financièrement de la baisse du numerus clausus. « Ils amortissent beaucoup plus rapidement que les cohortes anciennes leur manque à gagner de début de carrière » notent les économistes.
Globalement, l’étude estime que les revenus nets des médecins sont supérieurs aux salaires nets des cadres. Sur la période 1980-2004, un médecin généraliste gagne en moyenne 4 257 euros nets mensuels contre 3 355 euros pour un cadre. Le revenu médian des médecins est très proche du 3e quartile des salaires des cadres supérieurs: les médecins généralistes se positionnent dans les déciles élevés de la distribution des salaires des cadres. En revanche, cette étude ne rapporte pas les revenus des catégories professionnelles au temps de travail hebdomadaire qui reste supérieur d’au moins dix heures chez les médecins que chez les cadres.
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