JETÉES dans des bennes... Victimes d'un grand nettoyage de printemps au Musée d'anatomie Testut-Latarjet de Lyon au début des années 1980, trois momies coptes ne doivent leur salut qu'aux couleurs très vives de leurs sarcophages, qui ont attiré l'attention du Pr Louis-Paul Fischer, de passage dans la cour du musée. A l'époque chef du service de chirurgie orthopédique à l'hôpital Edouard-Herriot, il les fait sortir des bennes afin de les étudier.
Ces momies, arrivées en France à la fin du XIXe siècle, proviennent des fouilles d'Antinoé (ou Antinopolis, fondée par Alexandre le Grand), financées par l'industriel lyonnais Emile Guimet. Passionné d'archéologie et disposant d'une des gosses fortunes lyonnaises, M. Guimet procède à de nombreuses fouilles « sauvages ». Autour de lui se constitue à l'époque un petit groupe à l'origine de l'arrivée en masse de momies égyptiennes dans la ville de Lyon, et plus particulièrement au Muséum dirigé par Louis Lortet, professeur d'histoire naturelle et premier doyen de la faculté de médecine en 1877. Professeur d'anatomie au musée d'anatomie de Lyon, Léo Testut profite de sa proximité avec Guimet pour étudier les découvertes d'Antinoé et reçoit ainsi en 1901 les trois momies coptes. Celles qui finiront oubliées dans les réserves jusqu'à ce qu'elles soient sauvées de justesse par le Pr Fischer.
C'est sans aucun crédit et de façon presque clandestine que le médecin étudie les trois rescapées. Leur examen à la radiographie et au scanner ne révèle aucune pathologie particulière, mais indique qu'il s'agit de deux femmes, âgées de 35 à 40 ans, dont l'une avec son enfant de 9 mois couché sur le thorax. L'examen radio révèle des dégâts morphologiques sans doute liés au transport et à la conservation dans le musée. Quant à l'examen au scanner, il permet de voir que les yeux ne sont pas énucléés. L'encéphale est retiré, conformément aux techniques de momification coptes. On ne remarque aucune trace d'éviscération. Les masses musculaires sont remarquablement bien conservées, vraisemblablement grâce à des bains de produits conservateurs. Les corps ne sont pas enveloppés de bandelettes, comme à l'époque pharaonique, mais de simples tuniques. Ces habits comportent de nombreux motifs, végétaux et animaux : fruits, arbres, canards, tous très colorés. Les momies ont été datées de l'époque chrétienne, entre le IIIe et le VIe siècle après J.-C.
Le Pr Fischer regrette qu'il y ait peu de travaux sur les momies coptes à part ceux de Castel portant sur des momies de moines du IXe siècle. Les Coptes ont en effet pratiqué la momification jusqu'aux Xe-XIe siècles et leurs techniques ont été peu étudiées, contrairement aux momies de l'époque pharaonique, toujours très prisées du public et des chercheurs. Les trois momies coptes de Lyon ont certes fait l'objet d'une thèse. Mais l'étude reste incomplète faute de crédits. Le Pr Fischer voudrait au moins qu'elles puissent passer une IRM.
Les premiers traités du coeur.
L'étude des papyrus médicaux de l'Egypte ancienne permet de découvrir une approche « moderne », que ce soit sur le plan de la conception du coeur ou de l'examen cardio-vasculaire, souligne Bernard Ziskind, lui-même cardiologue. Le papyrus Ebers constitue le principal témoignage : ce document datant de 1550 avant J-C révèle les secrets de la marche du coeur en stipulant que les artères marchent grâce au coeur.
Le coeur est souvent évoqué dans les papyrus égyptiens, qu'ils soient médicaux ou non. La première représentation du coeur remonte à 3000 avant J.-C., dans la titulature - ou introduction - de l'Horus Qâ, un papyrus qui date de la première dynastie pharaonique. On y évoque huit vaisseaux qui partent et arrivent au cœur, ainsi que des structures qui ressemblent curieusement à des ventricules et à des oreillettes. C'est déjà précis et impressionnant sur le plan médical. Ce papyrus contient également une conception de la marche du cœur : il évoque un « contenant », une enveloppe qui contient trois éléments : le cœur haty (muscle cardiaque), l'intérieur ib (le coeur) et matou (les vaisseaux), qui établit une intercommunication entre le cœur haty et l'intérieur ib.
Le papyrus Smith fait état de l'examen du coeur, effectué par le sounou, le médecin laïc : il recommande de « faire le bilan des endroits atteints (...) dans le but de savoir ce qu'il se passe en lui ». Le même papyrus mentionne l'interrogatoire - « Si tu le questionnes sur l'endroit atteint en lui » - et stipule déjà l'état de conscience, les douleurs thoraciques ainsi que les palpations. Les syndromes et les symptômes sont également étudiés dans le papyrus Ebers : les « douleurs dans son bras et dans sa poitrine » évoquent, sans le nommer, un infarctus et le « coeur muet, les artères mal palpées », un collapsus cardio-vasculaire.
Grâce à leur précision, les papyrus égyptiens constituent les premiers traités du coeur, des vaisseaux, de pathologie et de thérapeutique cardio-vasculaire.
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