AU SORTIR des cinq heures de spectacle culminant sur la plus frustrante des fins, le renoncement à visualiser le dévoilement du Graal par Parsifal et la mort de Kundry, on s'interroge une fois encore sur la pertinence du choix du metteur en scène. Eichinger ne croit pas en cette rédemption finale qui fait partie de la texture du drame wagnérien. Pourquoi accepter alors d'y participer ?
Dans cette réalisation qui s'appuie sur un important dispositif vidéo, les deux premiers actes passent plutôt bien avec une impressionnante transformation du « temps en espace » au I à l'aide d'images qui traversent siècles et civilisations et malgré la première scène du Graal transformée en cannibalisme, les Chevaliers découpant sur un billot le cœur d'Amfortas. Malgré aussi une scène des Filles-Fleurs au II si terne mais débouchant sur un duo Parsifal-Kundry très intense. Au III, on est à New York et les Chevaliers sont des voyous échappés des bas-fonds pour régler son compte à Amfortas que Parsifal sauve in extremis de la mort avant de se croiser les bras en attendant que se termine la musique sur une fin que Wagner n'avait pas prévue.
Musicalement, il faut rendre justice à ces représentations d'un très haut niveau. Barenboïm a mûri sa conception dramatique de l'œuvre depuis le « Parsifal du centenaire » à Bayreuth en 1987 et son enregistrement de 1990. Le Staatskapelle Berlin avec ses cordes aux sonorités splendides apporte un soutien de rêve à sa direction très ample et désormais beaucoup plus proche du récit.
Dominée par le Gurnemanz de René Pape à la voix splendide et à la diction exemplaire, qui pourrait bien, avec les années, égaler en intensité Kurt Moll, le dernier grand titulaire du rôle, la distribution réservait d'autres belles surprises avec le Parsifal de Burkhard Fritz, très à l'aise dans toute la tessiture du rôle, l'Amfortas très torturé de Roman Trekel et le Klingsor de Jochen Schmekenbecher. Seule la Kundry de Michaela Schuster décevait par un manque d'aigus pour posséder pleinement le rôle mais pas pour son engagement dramatique, tout à fait entier. Le magnifique Staatsopernchor préparé par Eberhard Friedrich était aussi un pilier de cette réussite musicale.
Trois œuvres symphoniques.
Parmi les trois concerts donnés dans l'acoustique miraculeuse de la Philharmonie par le Chicago Symphony Orchestra, formation invitée dont Barenboïm est aussi le chef depuis 1991, on a pu entendre celui consacré à Ravel avec pas moins de trois œuvres symphoniques (« Rhapsodie espagnole », « Ma Mère l'Oye » et « Daphnis et Chloé ») jouées avec des luxes de sonorités par cette excellente phalange, encadrant le Deuxième concerto pour piano de Bartók.
Ce monument du répertoire enlevé de façon ébouriffante par le jeune pianiste chinois Lang Lang a été suivi par un rare moment de musique pure quand soliste et chef (Barenboïm étant toujours à son mieux dans la pratique de la musique de chambre) se sont mis côte à côte pour jouer à quatre mains deux pages de « Ma Mère l'Oye », anticipant sur la suite du programme d'un concert exceptionnel
Staatsoper Unter den Linden Berlin (+ 49. 30.20.35.45.55 et www.staatsoper-berlin.de). Ce « Parsifal » sera au programme des Festtage 2006 (du 8 au 16 avril) ainsi qu'une nouvelle production de « Tristan et Isolde », mise en scène par Stefan Bachmann et dirigée par Daniel Barenboïm avec Peter Seiffert, René Pape, Katarina Dalayman et Michelle De Young. Daniel Barenboïm jouera au piano l'intégrale du « Clavier bien tempéré », de Jean-Sebastien Bach, à la Philharmonie.
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