EST-IL LÉGITIME de recommander systématiquement une activité physique après un cancer ? Certes l’activité physique peut améliorer le pronostic après traitement, mais ce ne semble pas être le cas pour tout le monde. Selon des oncologues de Harvard, la pratique sportive n’améliore pas la mortalité après cancer colorectal chez les sujets exprimant la bêta caténine (CTNNB1). Le Pr Shuji Ogino et ses collègues ont montré par ailleurs que l’activation de cette protéine associée à la cadhérine améliore la mortalité spécifique et totale chez les sujets obèses.
Le double rôle de la caténine bêta suscite la curiosité des chercheurs depuis quelques années. En tant que médiateur clef dans la voie de signalisation WNT, elle est à la fois impliquée dans la carcinogénèse colorectale et le métabolisme énergétique. L’équipe de Boston a alors voulu tester l’hypothèse selon laquelle l’activation de la caténine bêta modifierait le pronostic du cancer digestif, ce d’autant qu’il existe de plus en plus de preuves en faveur d’une responsabilité de l’obésité dans la génèse des cancers.
Balance énergétique
L’étude a inclus les données de deux cohortes américaines totalisant 995 sujets ayant eu un cancer du côlon ou du rectum, de stade I, II, III ou IV, entre 1980 et 2004. L’expression de la caténine bêta était fournie par l’immunohistochimie. L’équipe de Boston a cherché à savoir si l’activation de CTNNB1 modifiait les associations pronostiques avec l’indice de masse corporelle (IMC) et l’activité sportive.
Au cours du suivi jusqu’en 2009, 440 décès sont survenus, dont 266 spécifiques par cancer colorectal. Il apparaît clairement que la corpulence joue un rôle significatif. Chez les sujets obèses ayant un IMC≥30, un statut positif pour le CTNNB1 était significativement associé à un meilleur pronostic. La survie spécifique par cancer colorectal à 5 ans était de 0,85 chez les sujets positifs pour le CTNNB1 et de 0,78 chez ceux négatifs. Quant à la survie globale à 5 ans, elle était de 0,77 pour les premiers et de 0,74 pour les seconds. De plus, parmi les sujets ayant un statut négatif, un haut niveau d’activité physique était associé à une meilleure survie spécifique à 5 ans (0,97 versus 0,89). A contrario, chez les sujets positifs, l’activité physique ne semble pas jouer de rôle particulier.
« Il semble bel et bien exister une interaction sur le comportement tumoral entre la signalisation CTNNB1 et la balance énergétique, concluent les auteurs. Si la voie de signalisation CTNNB1 est inactive, la progression tumorale serait influencée par les apports et les dépenses énergétiques. En cas de statut négatif, l’évolution du cancer se ferait indépendamment de la balance énergétique. Le statut CTNNB1 permettrait ainsi d’identifier les patients à qui prescrire une activité physique en pratique ».
JAMA.2011;305(16)1685-1694.
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