LE PROGRAMME Décrypthon, lancé cette semaine par une association de malades, l'AFM, organisme de recherche, le Cnrs, et une société d'informatique, IBM, et parrainé par le comédien Thierry Lhermitte, consiste à mettre en place une plate-forme technologique de pointe reposant sur le « Grid computing » pour apporter à des équipes de chercheurs des moyens de calcul très importants. Le but de cette opération est d'accélérer la recherche en génomique et en protéomique pour progresser plus rapidement dans la compréhension des maladies génétiques, et notamment des maladies neuromusculaires.
Qu'est-ce-que le « Grid computing »? Les technologies dites de « grille », ou « Grid computing », permettent de mettre en partage de façon sécurisée les données et les programmes de multiples ordinateurs, qu'ils soient de bureau, personnels ou supercalculateurs. Mises en réseau, ces ressources peuvent produire, à un instant donné, un système virtuel doté d'une puissance gigantesque de calcul et d'une capacité de stockage considérable. En 2001 déjà, l'AFM s'était associée à IBM pour la première opération Décrypthon afin de réaliser la cartographie du protéome. Grâce à la mobilisation de plus de 75 000 internautes, le projet avait permis la réalisation, en quelques semaines, d'une première base de données : 550 000 protéines du monde du vivant (animal, végétal, humain) avait été cartographiées.
Mais aujourd'hui, l'enjeu scientifique est de plus en plus important. Le déchiffrage complet du génome humain, en 2003-2004, montre que les liens biologiques entre les éventuelles modifications du génome et les maladies qui en découlent sont plus complexes : l'approfondissement des connaissances dans le domaine de la protéomique constitue un axe prioritaire de la recherche génétique.
Une dizaine de projets.
Pendant trois ans, la plate-forme technologique du programme Décrypthon doit accueillir une dizaine de projets de recherche ayant pour but de « mieux comprendre le fonctionnement et le rôle des protéines, de prédire leur fonction, de progresser dans la connaissance de leur structure en trois dimensions, ou de croiser les données du génome avec celles du protéome ». Toutes les équipes peuvent participer à ce programme, qu'elles soient nationales ou internationales. La plate-forme du Décrypthon est composée de deux grilles spécifiques pour produire la puissance de calcul nécessaire. Le recours à l'une ou à l'autre des grilles, voire à la combinaison des deux, s'effectuera en fonction des spécificités des programmes de recherche sélectionnés.
La première grille, dite « universitaire », est constituée des supercalculateurs des centres universitaires de Bordeaux-I, Lille-I et Paris-VI-Jussieu (Pierre-et-Marie-Curie), auxquels sont ajoutés des serveurs à base de technologies (power 4+ et power 5) de dernière génération offerts par IBM. La société d'informatique met également à la disposition de l'université d'Orsay un serveur central, fédérant l'ensemble de ces ressources. Orsay en assurera l'exploitation.
La seconde grille, dite « d'internautes », pourra être activée dans un deuxième temps en fonction des projets scientifiques à venir. Elle accueillera les ordinateurs individuels d'internautes souhaitant participer au programme Décrypthon en mettant à disposition des scientifiques des « cycles de calcul » non utilisés par leurs machines.
Deux projets pilotes, sélectionnés auprès de la communauté scientifique française et étrangère, s'inscrivent déjà dans le cadre du programme Décrypthon. Le premier projet, « Les mutations structurales avec leurs conséquences sur le phénotype des pathologies humaines », coordonné par Olivier Poch (Strasbourg-I) et Gilbert Deléage (Lyon-I), a deux objectifs : mettre au point une grille d'analyse descriptive des protéines avec des mutations connues et élaborer un outil prédictif pour faciliter la compréhension de ces mutations dans les maladies humaines. Son démarrage est prévu en mai. Le second projet, « Développement et utilisation d'approches informatiques pour l'analyse des liens existant entre les défauts d'épissage et les maladies génétiques », piloté par Christiane Branlant, Fabrice Leclerc et Yann Guermeur à Nancy, devrait permettre le développement de thérapies basées sur la réparation de l'épissage, impliquant, par exemple, le saut d'exon. Son démarrage est prévu cet automne.
L'adhésion des entreprises
Le programme Décrypthon s'appuie sur un financement innovant, reposant sur un le principe suivant : « A calcul informatique partagé, financement partagé. » L'AFM organise une opération de collecte spécifique baptisée « Décrypthon Entreprise ». Toutes les entreprises sont invitées à souscrire au programme en achetant une ou plusieurs parts du projet : une part du programme Décrypthon est égale à 1 000 euros. Le coût prévisionnel du programme est estimé à 1,8 million d'euros par an (sur trois ans), dont 40 % sont assurés par des contributions en nature d'IBM, du CNRS et de l'AFM.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature