Début septembre, le BMJ a publié des données sur la retraite des médecins hospitaliers britanniques. Depuis 2008 – alors que l’âge de la retraite est passé à 66, puis 67 ans – la proportion de médecins qui fait valoir ses droits à la retraite de façon anticipée est passée de 13,6 % à 26,9 %. Parallèlement, le nombre de médecins qui arrête pour cause médicale a lui aussi crû de 1 % à 5,4 %.
Pendant cette période, le nombre de praticiens cessant leur activité hospitalière annuellement est passé 1 205 en 2008 à 1 475 en 2018. Cette hausse de 22 % a été en partie compensée par un recrutement de 21 % majoré des médecins du service public.
Trop de contraintes
La plupart des médecins qui ont souhaité prendre leur retraite de façon anticipée mettent en avant les conditions de travail qui ont été rendues encore plus difficile ces dernières années du fait de coupes budgétaires. Ils parlent de leur impossibilité de prendre en charge les patients selon leurs valeurs éthiques, mais aussi de l’hôpital-industrie qui impose des durées de séjours courtes alors que les budgets des aides au retour à domicile ont baissé de 11 % en 5 ans. Depuis 3 ans, on assiste en Grande-Bretagne à une multiplication des séjours hospitaliers de patients, parfois peu graves, mais très dépendants qui ne peuvent se suffire à eux-mêmes à leur domicile et qui n’ont plus comme alternative que de multiplier les séjours hospitaliers.
Et qu’en est-il des médecins généralistes de ville rattachés au NHS ? Début 2017, le BMJ publiait une étude qui montre que l’âge moyen de la retraite des promotions 1974 à 1977 est passé sous la barre de 60 ans : 62 % des généralistes qui ont demandé leur droit à la retraite étaient âgés de moins de 60 ans en 2017, contre 33 % en 2011
Une retraite de 24 heures
Si l’épuisement professionnel rentre là aussi en compte, des considérations financières sont aussi mises en avant par les praticiens.
En Grande-Bretagne, les médecins libéraux souscrivent une assurance retraite auprès du NHS tout au long de leur carrière. Lorsque la somme déposée sur le plan dépasse 1 million de £ (1,2 M €), des taxes sont appliquées (de 25 à 55 % sur les sommes dépassant le plafond).
Un médecin généraliste qui gagne en moyenne 100 000 £ (112 000 €) par an peut, s’il part à la retraite à 60 ans, toucher 49 000 £ (55 000 €) de pension et cumuler emploi et retraite à hauteur de 147 000 £ (165 000 €) sans taxes. Pour chaque année de retraite anticipée, le NHS déduit 5 % de la pension et des droits au cumul emploi-retraite (mais le médecin ne paye plus de cotisation retraite dans ce cas, contrairement à la France).
Et que font les généralistes quand ils ont pris leur retraite ? 25,9 % retravaillent dans la médecine et 1,4 % dans un autre domaine. En fait, ils profitent des avantages du cumul emploi-retraite et certains avouent même que leur retraite a été de courte durée. En effet, il suffit de 24 heures de cessation d’activité pour pouvoir bénéficier des avantages accordés aux seniors. Des agences d’intérim (locum) se sont spécialisées dans cette niche et les offres sont pléthoriques en particulier dans des zones de déserts médicaux. Le NHS et les médecins seraient donc gagnants, l’un trouvant facilement des effecteurs, les autres en ayant une activité à la carte et défiscalisée. Reste que les patients en pâtissent, en particulier dans les déserts médicaux.
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